Toujours désireuse de découvrir des groupes de deathcore français vu leur présence anecdotique sur notre territoire, je suis impatiente d’écouter ce premier album du groupe Prypiat. 5 garçons composent ce projet fondé en 2021 à Metz : Joce au chant remplaçant Lucas dont le chant a été enregistré sur l’album, Damien à la batterie, Romain à la basse et Matt et Max aux guitares. Ils annoncent une série d’influences plutôt alléchantes parmi les groupes les plus connus des scènes deathcore et metalcore actuelles : Chelsea Grin, Thy Art is Murder, Lorna Shore, Architect, Wage War… Le nom du groupe également m’intrigue. Ils expliquent qu’il s’agit bien d’une référence à la ville Ukrainienne victime de l’accident nucléaire de Tchernobyl et semblent vouloir porter un message plutôt sombre, nihiliste, fataliste et mélancolique. Le groupe a déjà une imagerie plutôt travaillée et pas mal de contenu sur différents réseaux sociaux et supports. Plusieurs dates aussi à leur actif entre festivals et concerts, un clip, etc., il semble donc y avoir pas mal de travail et de potentiel derrière ce jeune groupe messin…
Ayant déjà vu par le passé des groupes de métal français annoncer du deathcore quand ils faisaient plutôt un metalcore un peu heavy, voire carrément autre chose, la première bonne surprise avec Prypiat c’est que c’est bien du deathcore. Je suis plutôt d’accord avec les influences qu’ils mentionnent puisqu’on est en effet sur un deathcore assez mélodique et sombre, un scream très présent et une construction de morceau assez traditionnelle dans le deathcore. De la même manière, l’imagerie, les thèmes, les paroles sont assez classiques de cette scène. On est rassurés, on sait où on met les pieds. J’aime assez la pochette de l’album et la direction artistique, plutôt sombre, l’ambiance apocalyptique. Les morceaux sont aussi relativement longs, 4 à 5 min de moyenne. C’est un groupe avec beaucoup de potentiel et un joli premier album. Je suis assez contente de voir du deathcore français mais s’il reste assez classique et plutôt mélodique.
L’album commence avec une intro instrumentale au nom énigmatique en alphabet cyrillique. Après une petite recherche, il s’agit simplement de Prypiat en ukrainien. Je m’attendais à quelque chose de plus mystérieux pour être honnête. J’aime bien cette intro, elle pose l’ambiance de l’album, elle est sombre et mélancolique à souhait. Je suis assez fan de l’usage d’intro, samples, etc. pour donner un peu de respiration dans un album et poser l’atmosphère d’un projet. Les sonorités sont assez inquiétantes, glauques.
On enchaîne avec le premier morceau Prypiat qui démarre sur une intro en continuité avec le morceau précédent. Ça démarre fort immédiatement entre les guitares et le chant et j’aime assez la mélodie générale. Le travail sur le scream est assez intéressant avec pas mal de variations, bien qu’assez aigu pour du deathcore. Le chanteur ayant depuis changé, je suis curieuse de voir ce que donnera le chant dans les prochains opus ou en live. Les breaks sont assez cool, dans un style très emprunté à Lorna Shore, assez efficace et concentré sur le scream. Ce premier morceau est très convaincant et me plait bien.
La chanson suivante To The Ground m’a en revanche laissée assez perplexe. Je dois avouer que c’est un peu le fouillis et là on a du mal à suivre. On retrouve des sonorités djent intéressantes mais rapidement il y a quelque chose de gênant dans la rythmique qu’il s’agisse du chant comme des guitares. Je ne suis pas très fan non plus de la post production, les sonorités des guitares me plaisent beaucoup moins et le morceau sonne plutôt fouillis. C’est dommage, les samples d’alarmes à la fin pour le break sont une bonne idée et cette dernière partie est finalement la plus réussie du morceau. Moins fan du scream également sur ce morceau que je trouve moins bien réalisé.
On continue avec le morceau I Can’t Breath. Je vais conserver avec les morceaux suivants cette même gêne quant à la production de l’album qui je trouve ne rend pas vraiment grâce au travail du groupe. Ça sonne un peu trop plat à mon goût, pas assez rond et puissant et un peu brouillon et pourtant ça aurait pu l’être, vu l’ambiance que le groupe travaille, leur thème et leur style. Ce morceau a été utilisé pour leur premier clip. La mise en scène du clip est assez intéressante, bien tourné, pas trop cliché mais cohérente avec la direction artistique du groupe. Le passage avec un chant juste saturé est vraiment sympa et annonce un break assez cool ensuite, même si toujours dans le même style très « Lorna Shore ».
Le morceau suivant Landscape of Death propose des passages au chant plutôt intéressants. Le traitement des guitares et de la batterie me plait moins au début du morceau. Par contre j’aime beaucoup la mélodie qui donne une portée très mélancolique au morceau. Puis, Interlude offre une petite pause dans l’album. J’ai bien aimé les guitares et le groove de ce morceau qui tranchent presque avec les autres chansons. En revanche, pas fan du tout du scream de fin en mode grindcore.
On reprend ensuite avec Destroyed World, dans la même veine que les morceaux précédents et un peu fouillis également. Je suis moins fan du break de ce morceau-là, cependant le groove du morceau m’a pas mal plu.
Le début de Survival Instinct est assez intéressant, on y retrouve l’ambiance de l’intro avec les lamentations. Ça me rappelle des morceaux de Mental Cruelty. La mélodie est très cool et l’aspect un peu dissonant renforce l’atmosphère inquiétante. J’aime assez le travail sur le chant sur cette chanson. Je pense que c’est une de mes favorites de l’album.
On poursuit avec le morceau Mutation, assez similaire aux précédents. J’aime beaucoup la mélodie sur la seconde partie du morceau et l’ambiance qui se dégage. On finit avec la chanson A Lifeless World qui donne son nom à l’album. Plus lente et plus lourde que les précédentes, elle a une atmosphère plus apocalyptique aussi. Elle a également donné un clip en pleine nature avec quelques jolies prises de vue mais un peu plat en termes de montage et de cadrage et un poil cliché avec les instruments non branchés en pleine forêt. Mais bon, on pardonne, même les plus grands y sont passés.
Prypiat est un jeune groupe de deathcore avec énormément de potentiel et qui a déjà fait un très bon travail tant sur la musique, la direction artistique, la cohérence entre leurs thématiques et l’atmosphère, etc. Je suis ravie que des projets comme celui-ci naissent sur nos contrées, avec un métal plus moderne et des inspirations réellement puisées au sein de la scène core récente. On sent l’influence des groupes de deathcore mélodiques comme Lorna Shore ou Thy Art is Murder que les messins revendiquent. Ça fonctionne bien, c’est efficace, les mélodies sont belles et collent à l’ambiance de l’album. Le scream est intéressant avec de gros breaks qui lui font la part belle. La construction globale de l’album est également très cohérente et j’ai apprécié la présence de l’intro, de l’interlude et des divers samples. Je suis en revanche un peu déçue par la production de l’album qui m’a laissé un sentiment de trop plat, pas assez rond, pas assez lourd. La batterie est trop discrète, trop sèche, les sonorités des guitares pas toujours très heureuses. Le traitement du scream est aussi un peu inégal selon les morceaux, ce qui produit parfois un chant un peu plat, pas assez riche. On a parfois un sentiment de fouillis au sein des morceaux et d’une rythmique pas toujours très cohérente entre le chant et l’instrumental. C’est dommage, parce que ça ne rend pas vraiment hommage au travail du groupe, à leurs influences et à l’atmosphère qu’ils souhaitent rendre. Je suis assez curieuse de les entendre en live justement pour m’extraire un peu du son produit de l’album et entendre leur nouveau chanteur. En conclusion, un très joli projet, plein de promesses, qui propose un vrai deathcore dans les règles de l’art et qui a tout ce qu’il faut pour nous proposer un second opus encore meilleur ! On les sent investis dans ce super projet et on leur souhaite de réussir dans la scène core ! Et je les remercie encore de proposer un vrai projet de deathcore sur une scène métal française franchement vieillotte.