Un roman surprenant, parfois déroutant mais finalement réussi : un bon début pour ce diptyque.
Bienvenue à Londres.
Ici, l’électricité est de la monnaie, le pouvoir est le seul jeu qui vaille la peine d’être joué et la violence est la religion la plus fervente. Les chevaliers sont les célébrités du moment, chevauchant des motos plutôt que des chevaux et s’affrontant dans des combats télévisés pour la gloire et la fortune. La magie est illégale mais omniprésente et ceux qui la possèdent doivent cacher ce qu’ils sont de peur d’être marqués et persécutés.
Ici, un jeune bâtard doué de magie surprend tout le monde en devenant roi –; bien qu’avec une extrême réticence –; tandis qu’une jeune femme au passé secret s’entraîne pour devenir chevalière dans le seul but de se venger.
Bienvenue dans un endroit sombre, chaotique, séduisant et à l’histoire tumultueuse, où les rêves deviennent réalité si vous y croyez assez fort et si vous êtes prêts à faire de très mauvaises choses pour les réaliser…
Une revisite du mythe arthurien
Ce roman a finalement peu à voir avec le véritable mythe arthurien, tant Laure Eve parvient à s’emparer de son sujet, à la transformer selon ses goûts. Et elle y parvient à merveille puisque l’on suit Art et Red avec plaisir au fil des chapitres, positionnés en alternance. L’univers proposé est prenant et le lecteur se prend aisément au jeu de ce moyen-âge où la technologie est présente, le mélange des deux étant suffisamment bien conçu pour que l’on se prenne au jeu. L’histoire laisse peu de pauses au lecteur et est menée tambour battant par une équipe de personnages qui assure son rôle à merveille.
Une galerie de personnages intéressante
Qu’il s’agisse de Art, de Red, de Lillath, de Garad… tous sont particulièrement bien construits et portent le récit de manière indéniable. Ma préférence va à la jeune Red qui se cherche tout au long du roman et cette innocence que l’on lui voit est touchante. Garad aussi est une petite merveille de création de personnage. Il semble simplet mais porte beaucoup plus que ce que l’on pourrait croire sur ses épaules. Les antagonistes fonctionnent très bien également d’ailleurs et permettent aux héros de se dépasser à la fois en combat mais également dans l’arène politique.
Quelques éléments déroutants
Deux éléments m’ont dérouté dans ce roman : tout d’abord la temporalité. En effet Red évolue sur un fil temporel quais-présent, tandis que Art se situe bien loin dans le passé. Au fil de l’avancée du roman les deux récits se rapprochent pour se rejoindre à la fin de ce troisième tome, mais il n’est pas évident de comprendre là où veut en venir l’autrice. Et cela m’a un peu désarçonné en cours de lecture. Tout prend sens à la fin mais néanmoins le double niveau temporel est déroutant.
Le second point déroutant est la neutralité de genre de certains personnages. Littérairement cela donne de nouveaux mots qui, s’ils sont totalement légitimes je n’entrerai pas dans ce débat, ont encore le défaut de surprendre, et de me faire buter par endroit sur la compréhension. Néanmoins l’éditeur étant intelligent des notes de bas e de page sont à disposition pour nous expliquer le sens et nous faciliter la vie. Après un début de lecture chaotique sur ce point on se fait rapidement à ce nouveau vocabulaire et les choses rentrent dans l’ordre.
Ce premier tome du diptyque de Laure Eve est une réussite malgré ses quelques défauts. On s’amuse à découvrir cette réécriture très libre du mythe arthurien, le tout dans un univers d’urban-fantasy. La traduction est fluide, le livre en tant qu’objet est magnifique (une marque de fabrique De Saxus) et on se prend vraiment au jeu. Hâte de découvrir la suite en tous cas !