Une réécriture immersive du mythe de Gilgamesh.
« Les histoires, tels des serpents, nous glissent souvent entre les doigts. »
Inanna a tout d’une impossibilité. La première Anunnaki de plein sang née sur Terre, dans l’antique Mésopotamie. Couronnée déesse de l’amour par ses douze pairs immortels vénérés dans tout Sumer. Promise à un destin hors du commun.
À sa naissance pourtant, la guerre gronde et les Anunnaki, divisés en factions rivales, menacent de tout saccager dans leur conflit. Mariée de force afin de négocier une paix précaire, Inanna comprend très vite que sa nouvelle position la met en grand danger.
Gilgamesh, fils mortel d’Anunnaki et séducteur notoire, se retrouve prisonnier du roi Akka, dont l’obsession est d’affranchir son peuple des dieux. Le héros dévoyé se voit cependant offrir une dernière chance de prouver sa valeur.
Ninshubar, la fière guerrière, est chassée de sa tribu à cause d’un acte de bonté. Poursuivie par les siens, elle s’enfuit vers l’inconnu en quête d’acceptation et d’une place en ce monde.
À mesure que leurs odyssées les rapprochent, tous trois prennent conscience que leurs destins mêlés pourraient bien changer la face du monde à jamais.
Une réécriture de mythe
Le mythe de Gilgamesh, récit mésopotamien, est un classique de la mythologie. Il n’est jamais facile pour un auteur de se plonger dans la réécriture d’un mythe car le scénario, comme les personnages, sont des plus contraints. De ce fait la difficulté est plus grande mais sur quelque chose d’aussi ancien que cette épopée il est possible de prendre quelques licences artistiques qui permettront de donner une dynamique intéressante au récit. Emily H. Wilson réussit parfaitement son pari en mêlant intelligemment réalisme du mythe et liberté de la fantasy.
Une aventure prenante
L’aventure proposée passe par les regards des trois protagonistes principaux : Gilgamesh, Inanna et Ninshubar. Le fait de passer de narrateur en narrateur permet de les voir naître, grandir, progresser et devenir eux-mêmes avant que l’aventure ne les fasse se rejoindre. Il est intéressant de voir comment l’autrice gère les temporalités, les distances, et les interactions entre ses personnages, créant un véritable intérêt avide du lecteur pour la suite des aventures de ses héros.
Des personnages forts
Chacun des trois protagonistes principaux tient son rôle à la perfection, prenant le lecteur par la main et lui contant son histoire de manière particulièrement intelligente. Chacun d’entre eux est parfaitement développé au niveau de sa psychologie et le lecteur trouvera aisément à qui s’identifier tant ils savent être différents. Ma préférence personnelle va à Ninshubar, que j’ai trouvée plus résiliente que ses petits camarades et je m’y suis donc plus attaché.
Inanna est le genre de roman qui séduira les lecteurs férus de mythes. On y retrouve tous les codes de la fantasy, mais également un talent de Emily H. Wilson pour nous conter une histoire tellement ancienne que personne n’est sûr de sa teneur exacte. Un tour de force littéraire qui a su me séduire, caché derrière une magnifique couverture moirée signée Bragelonne, ce qui mérite d’être mentionné.