Bonjour, et merci de prendre quelques minutes pour répondre à mes questions. Est-ce que tu peux tout d’abord te présenter et nous expliquer ce que tu fais dans Trank ?
Bonjour à toi. J’allais commencer par « J’me présente, je m’appelle Henri, » mais ça ne marche pas, d’abord parce que j’ai jamais pu blairer cette chanson, et ensuite parce que ce serait plutôt Michel, et que si on démarre sur Henri Michel, ça ne va rajeunir personne. Je suis chanteur dans TRANK, et je m’occupe aussi des claviers et des programmations en studio. Et en général, c’est moi qui m’énerve.
D’où vient le nom du groupe ?
D’une blague à dix centimes. Mais à l’origine, on voulait un nom simple, court, un peu angulaire ou monolithique comme peut l’être la musique qu’on joue, et qui se prononce facilement dans toutes les langues. Après, il y a des journalistes francophones chez qui ça donne « Twaaaank, » mais bon.
Comment en es-tu venu au metal, à la fois en tant que fan et en tant que musicien ?
Alors le truc, c’est qu’on ne se voit pas comme un groupe de métal. Il y a des gens qui font ça très bien – mais comme nous l’a dit le stage manager d’Anthrax quand ils nous ont choisis pour faire leur première partie : « vous ne faites pas du métal, vous faites une musique que les gens qui aiment le métal peuvent adorer. » La musique qu’on joue compte bien le métal parmi ses influences, en particulier un certain métal 90’s à la fois accrocheur et assez intense émotionnellement – le post-grunge de Soundgarden, ou le Stoner de Kyuss et autres ; mais cette influence-là n’est ni plus ni moins importante pour nous que le rock alternatif des années 2000 ou le post punk électronique de gens comme Depeche Mode. Cela dit, c’est vrai qu’on écoute tous du métal, mais le genre est tellement vaste que nos références sont assez complémentaires. Pour moi, ça a commencé avec le hard 70’s – celui, gratté jusqu’à l’os, d’AC/DC (mon frère ainé avait le vinyle de Highway to Hell et on l’a usé ensemble, pour la plus grande consternation de nos parents), puis de Motorhead; et celui, flamboyant et excessif, de Queen, dont je suis fan depuis toujours. Zeppelin et Sabbath sont venus plus tard, grâce à des amis très fans. Et puis, on va dire que je me reconnais dans les styles de métal qui prennent leurs influences dans le goth rock et le post punk des années 80 : c’est très présent chez Deftones, Metallica, Paradise Lost ou Type O Negative, et encore plus évident dans le métal industriel de Rammstein ou Nine Inch Nails. « The Downward Spiral », quelle claque – je me rappelle l’avoir écouté d’une traite sur une borne-casque au Virgin Megastore de Paris, la semaine de sa sortie. J’étais tétanisé (et pas seulement parce que le Virgin Megastore existait encore). Les autres dans le groupe sont sont fans d’autres genres ou sous-genres de métal – et l’un des trucs sur lesquels on se retrouve c’est le prog-metal, pour la richesse des arrangements et la manière dont ils équilibrent puissance et raffinement.
Comment définirais-tu la musique de ton groupe ?
Comme l’enfant bâtard de Soundgarden et Depeche Mode, accouché par Muse et Porcupine Tree.
The Ropes en version rééditée est la nouveauté du groupe. Pourquoi avoir choisi de faire cette réédition ? Que va donc y trouver le public ?
La sortie de l’album fin 2020, en plein confinement, nous a valu une avalanche de critiques toutes plus élogieuses les unes que les autres – mais peu de visibilité, parce qu’elle était auto financée. Mais on a été repérés par un distributeur qui travaille avec Season of Mist et Believe Digital, et qui nous a proposé de le ressortir. Étant très fan de la culture du remix créée entre autres par Depeche Mode et consorts, et qui a donné des trucs magnifiques aussi chez NiN et Rammstein, j’avais en tête de créer – et de faire créer – des versions alternatives de certains de nos morceaux, pour pousser leur couleur électro, un peu sous-jacente, plus en avant. Les autres ont adoré l’idée, non seulement parce que ça nous permettait de redécouvrir les chansons sous un autre angle, mais aussi parce que, comme notre musique est à la croisée de pas mal de styles, le fait de pousser tel ou tel remix encore plus à fond dans un style donné permet à d’autres gens de découvrir ce qu’on fait. La nouvelle version conserve donc les mixes originaux des 12 chansons, dont on est toujours très fiers (on a eu la chance d’enregistrer dans les meilleurs conditions possibles avec Yvan Barone, notre coproducteur et un vétéran de Montreux, et d’être mixés par Brian Robbins, de Bring Me The Horizon et Asking Alexandria – et mastérisés par Andy Van Dette, de Porcupine Tree ; du coup l’album sonne exactement comme on en rêvait) ; mais elle y ajoute 12 remixes qu’on aime beaucoup, et qui vont de l’indus-techno au dub en passant par l’électro rock.
Où trouves-tu l’inspiration quand il s’agit d’écrire de la musique ?
Dans la gigantesque faille entre ce que le monde devrait être et ce qu’il est. Comme la plupart des groupes qu’on aime.
Quelle est ta piste préférée de cette nouvelle version, et pourquoi ?
Tu nous demandes de choisir entre nos enfants J. On a tous nos préférences cela dit. Pour moi, parmi les originaux, ça doit être « The Ropes », la chanson titre, dont je trouve qu’elle nous résume bien ; ou peut-être « Bend or Break », la plus intense. Parmi les remixes, le remix de « Undress to Kill » par Greco Rossetti, qui a été ingénieur son chez Nitzer Ebb (l’un de mes groupes EBM favoris), est une tuerie.
Pourquoi avoir choisi de mettre des photos de vous sur l’EP ?
Je ne suis pas certain que cette question s’adresse à nous : ça n’est pas un EP, et il n’y a qu’une seule photo de groupe dans le livret, qui plus est en négatif…
Qu’as-tu prévu niveau clip pour soutenir cette nouveauté ?
On vient tout juste de sortir un clip pour « Shining », qui ouvre l’album et dont on est très fiers. C’est toujours Alban Verneret, notre directeur visuel, qui est aux commandes. Et on prépare des extraits de live filmé en studio pour l’an prochain.
On retrouve Trank sur scène quand et où ?
Alors là, si tu le sais avant nous, merci de nous le dire… On compte sur le bruit autour de la ressortie pour attirer l’attention des tourneurs etc. On vient d’avoir l’excellente surprise d’être nommés « Album du mois » par Rock Hard France, avec deux pages d’interview et une chronique dithyrambique : d’autres vont suivre, et avec un peu de chance, on va arriver à se trouver des créneaux malgré l’embouteillage monstre de concerts reportés et annulé de ces deux dernières années.
2021 a été très riche en sorties d’albums. Quel serait ton album de l’année ?
Le dernier Nick Cave, Carnage. Déchirant.
Merci pour tes réponses et à bientôt au détour d’un concert !