Un roman glaçant oscillant entre pessimisme et espoir avec des personnages fascinants !
La folie humaine a finalement eu raison des mers et des océans. Retranchés dans des bastions isolés, les hommes doivent maintenant faire face à un nouveau danger: le déferlement de marées fantômes, charriant les cadavres des animaux marins disparus, avides de vengeance. Requins, dauphins, raies, tortues et autres reviennent par vagues arracher leur âme aux derniers humains. Seuls les exorcistes parviennent encore à les protéger. Oural est de ceux-là. Jusqu’au jour où le capitaine Bengale le kidnappe et l’entraîne à bord de son vaisseau fantôme dans une épopée au coeur même des mers mortes, voguant de marée en marée pour atteindre son but ultime…
Première incursion réussie dans l’univers littéraire d’Aurélie Wellenstein ! Mers Mortes est une éco-fiction d’anticipation dans laquelle mers et océans ont disparu à cause des activités humaines. Suite à cette disparition, le monde s’est écroulé et les fantômes des animaux marins viennent maintenant hanter les derniers hommes à qui ils arrachent leur âme.
Comme on peut le voir, le postulat de base est très sombre et particulièrement triste. Pourtant, Wellenstein réussit à poser ici et là de petites touches d’espoir et notamment grâce aux exorcistes, ces personnes capables de repousser les fantômes lors des grandes marées. Oural est l’un deux. Sa particularité : il a noué un lien particulier avec le fantôme d’une dauphine, Trellia. L’arrivée des “pirates” avec leur étrange et lugubre bateau transporte Oural dans une aventure à laquelle il n’aurait jamais pensé. Bengale, le capitaine qui le kidnappe a un objectif fou : rejoindre le Groënland où subsisterait la dernière mer et vivrait le dernier animal marin, un grand cachalot.
Aurélie Wellenstein propose ici un roman brillamment écrit, très émouvant qui à la fois nous entraîne dans un étrange imaginaire et à la fois nous fait réfléchir sur notre rapport à la nature et particulièrement à la mer. Plusieurs fois, on parle de “l’ancien temps” où les plages étaient bondées et où les gens jetaient leurs déchets. Alors que l’univers de l’auteure est plutôt fantasmé, l’écriture très directe et les dialogues très percutants parce que dans un langage parlé, donnent au roman un ton finalement assez réaliste ce qui donne cette sensation de malaise à la lecture.
Si les hommes sont pointés du doigt et mis face à leurs responsabilités, Wellenstein a l’intelligence de présenter des personnages principaux plus complexes. Par exemple, si Bengale a un comportement violent et se présente d’abord comme un antagoniste, la réalisation de son objectif servirait l’humanité tout entière. Derrière son ton hautain et sa désinvolture, le capitaine s’accroche à un salut potentiel ; salut qu’il place non pas dans les hommes (puisqu’il a accroché les âmes d’autres exorcistes à son bateau !), mais dans les animaux qui pourtant l’agressent sans cesse.
Mers Mortes est un très beau roman, dur, mais souvent poétique. Les descriptions de grandes marées glacent souvent le sang (notamment quand les requins apparaissent !) et on a réellement l’impression d’être sous l’eau. L’inattendu vient clairement de cette ambiance pirate qui se mêle pourtant parfaitement au concept ! Le roman, très immersif, nous fait brutalement prendre conscience de note rapport malsain à la mer.
J’en profite pour remercier Pocket et Aurélie Wellenstein puisque l’exemplaire était gentiment dédicacé par l’auteure. :-)