Anesthetic – Mark Morton

Nul besoin de présenter Lamb Of God en 2019. Le groupe américain, emmené par Randy Blythe, a fait son trou malgré les difficultés et figure aujourd’hui en bonne place sur les scènes du monde entier, déchaînant les hordes chevelues partout où l’ex-Burn The Priest pose ses amplis. Preuve de ce succès : les musiciens sont désormais (re)connus individuellement pour leur talent. C’est ainsi que le batteur Chris Adler fut brièvement embauché derrière les fûts de Megadeth de 2015 à 2016. En ce début d’année, c’est au tour du guitariste Mark Morton de s’offrir rien moins qu’un album solo intitulé Anesthetic, et dévoiler une nouvelle facette de son art.

À ceux qui s’attendraient ou espéreraient du Lamb Of God bis avec des invités de second rang, passez votre chemin. Le sieur Morton s’est bien entouré sur cet album : Randy Blythe bien sûr, Alissa White-Gluz (Arch Enemy), Chuck Billy (Testament), Josh Todd (Buckcherry), Jacoby Shaddix (Papa Roach)… pour ne citer que les vocalistes. Du côté des musiciens, pas à rougir non plus, entre David Ellefson (Megadeth), Ray Luzier (Korn), Roy Mayorga (Stone Sour) ou Paolo Gregoletto et Alex Bent (Trivium), là encore la liste n’est pas exhaustive. Bref, du beau monde pour rendre honneur aux compositions du maître de cérémonie. Et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’on est parfois loin des riffs puissants de Lamb Of God. Une première écoute témoigne de la versatilité du bonhomme, avec des chansons aux accents très mainstream au point de s’éloigner du metal pour entrer de plain-pied dans la catégorie rock FM.

Difficile toutefois de ne pas évoquer le premier titre de l’album, Cross Off, avec le regretté Chester Bennington derrière le micro. La chanson a été enregistrée seulement quelques mois avant le suicide du chanteur de Linkin Park, et paraît donc pour beaucoup comme sa dernière prestation, un genre de message posthume dans lequel il revient à ce qui fit le succès du groupe californien il y a près de vingt ans déjà avec Hybrid Theory : un mélange parfait entre scream et chant clair, démontrant à qui l’aurait déjà oublié à quel point Chester était talentueux. Sorti comme second single, Cross Off offre à l’auditeur le morceau le plus prenant de par les circonstances qui l’entourent.

La suite de l’album n’en est pas moins digne d’intérêt. Mark Morton, on le sent, n’a pas grandi qu’avec Pantera. Ça et là percent ses influences rock et blues, auxquelles il parvient à insuffler sa propre personnalité par un jeu de guitare très reconnaissable. Save Defiance, avec le toujours irréprochable Myles Kennedy au chant, est le lien parfait entre Lamb Of God et Alter Bridge (sans blague ?) et choisi comme troisième single de l’album à juste titre (HA !). L’autre single, The Truth Is Dead, avec le duo Blythe-White-Gluz, nous rappelle que ces deux excellents hurleurs savent également poser du chant clair quand il le faut – message à Arch Enemy : laissez Alissa chanter en clair plus souvent ! – et on ne peut qu’espérer que cette collaboration ait à nouveau lieu sur scène ou dans un futur album d’un de leurs groupes respectifs. L’ensemble de l’album reste solide et sa courte durée l’empêche d’ennuyer l’auditeur, y compris sur des morceaux plus “formatés” comme Sworn Apart ou Back From The Dead, qui n’auraient aucun mal à être utilisées sur des vidéos promotionnelles de la WWE.

Pour un premier album, Mark Morton s’en tire avec les honneurs. Il guide son public vers des horizons musicaux dont ses fans ne sont pas forcément familiers, sans pour autant les perdre, grâce à sa patte personnelle bien présente sur chaque titre. Anesthetic n’a pas la prétention d’être l’album de l’année, et c’est tant mieux : on passera donc un bon moment à découvrir l’univers musical de son auteur, dans l’attente de le retrouver sur les planches avec ses comparses de Richmond, Virginie.

Anesthetic
Mark Morton
Spinefarm
2019

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