Dernier né du label Orbit, 10 000 est signé par l’excellent Paul Kearney, auteur des Monarchies Divines. C’est donc à un pur roman de fantasy que nous allons nous frotter : riche, épique et surtout terriblement inspiré. Des romans de fantasy qui n’ont pas d’autre but que l’épique ne sont pas légion et avoir l’occasion d’en lire crée un réel plaisir au lecteur. Paul Kearney apparaît rapidement comme l’un des parangons de cette fantasy vive, sans apprêts inutiles, qui séduit le lecteur par cet aspect brut et rugueux.
La couverture peut pourtant laisser quelques doutes quand à la teneur de l’intérieur du livre. En effet la première idée qui vient au lecteur regardant cette couverture est qu’il va se retrouver face à un péplum fantasy du type 300. Or cette comparaison ne va pas cesser tout du long de la lecture mais nous en parlerons plus loin. Toutefois l’illustration de Chris McGrath n’est en rien à remettre en cause car sa réussite ne fait aucun doute, parvenant à recréer efficacement l’ambiance que le lecteur trouvera dans ce roman : sombre, sanglante et pourtant terriblement héroïque…
Mais entrons maintenant dans cette histoire qui a au moins le mérite de commencer sur les chapeaux de roue : une scène de combat dans les trois premières pages, que demander de mieux ? La scène de l’hoplite blessé qui doit combattre pour sauver sa vie dans le soleil couchant reste un classique du genre mais un classique particulièrement agréable à lire. La suite de l’aventure s’avère du même acabit : combats, stratégies, sang, batailles,… Tous les éléments de la fantasy brute de décoffrage sont là.
La plume particulièrement agréable à lire de Paul Kearney vient enrichir le tout d’une note poétique dans un monde de brutes. Les métaphores et autres figures de style, que l’on pourrait s’attendre à trouver dans un roman plus calme, viennent agréablement émailler le récit de pointes lyriques méritant très largement des applaudissements. Une fantasy brutale sachant également se faire littéraire est un évènement suffisamment rare pour que l’on se jette dessus afin de la savourer… La traduction de Jean-Pierre Pugi est sans aucune fausse note et l’on a vraiment la sensation que l’auteur a rédigé son roman dans la langue de Molière.
Mais un fait vient à l’esprit dès que l’on lit ce roman : la ressemblance troublante et particulièrement étrange avec 300. Les phalanges d’hoplites combattant des ennemis bien plus nombreux et cela avec un courage sans nom reste l’apanage de ce comics et du film qui en a découlé. Cette ressemblance pourra probablement jouer en la défaveur de cette fresque particulièrement réussie et qui mérite que l’on s’affranchisse des références précédentes pour réellement l’apprécier. Autre point noir, à mon sens, la citation de Robert Silverberg sur la couverture qui vient gâcher une partie du plaisir qu’a le lecteur à la contempler, au profit d’une technique marketing toute américaine…
10 000 est donc un de ces grands romans de fantasy comme on aimerait en lire bien plus souvent : violent et rugueux il sait aussi se faire tendre et soyeux par moment, offrant au lecteur de purs moments de plaisir littéraire. Orbit continue sur sa lancée en publiant des textes anglo-saxons de qualité qui parviennent à modifier légèrement la vision que le lecteur a du genre… Merci encore et attendons la suite avec impatience…
10 000 Au cœur de l’Empire
Paul Kearney
Orbit
19,90 €