A View From The Top Of The World – Dream Theater

Prenez AC/DC pour le hard rock, Iron Maiden pour le heavy metal, Metallica pour le thrash metal ou encore Rammstein pour le metal industriel : tous ces groupes sont devenus des icônes dans leur genre et se positionnent en tant que leader d’un mouvement musical dont chaque sortie discographique est attendue par les fans du monde entier tel le messie. Né au milieu des années 80, Dream Theater s’est rapidement imposé comme LA référence absolue en matière de metal progressif, notamment grâce à l’album Images & Words dont la parution en 1992 a permis au groupe de s’imposer véritablement à l’échelon mondial. Depuis lors, les New-Yorkais n’ont eu de cesse d’enchaîner les albums et les tournées sans temps mort. Cette situation a d’ailleurs entraîné le départ en 2010 de Mike Portnoy, batteur et co-fondateur historique de Dream Theater, lassé par un rythme effréné auquel il souhaitait apporter une pause et dont les autres musiciens n’ont pas voulu. Il fut alors remplacé par Mike Mangini (Steve Vai, Annihilator, Extreme…). A View From The Top Of The World représente le quinzième album studio des Américains.

The Alien ouvre ce nouvel opus de Dream Theater dans la plus pure tradition d’un metal progressif hyper technique et rapide tel que le groupe a su nous en concocter au fil des années et des albums. Il faut s’accrocher pour parvenir à suivre les déferlantes de notes, tant au niveau des guitares que des claviers, sans parler de la batterie ! Ça joue grave ! La structure du morceau est complexe et sombre, presque asphyxiante. Dream Theater frappe très fort d’entrée de jeu et ne laisse quasiment aucun répit à son auditeur. Les parties s’enchaînent les unes aux autres sans transition ou presque. Vous voulez de la virtuosité ? Vous allez être servis ! Rares sont les passages aérés dans ce déluge de notes de 9 minutes et demie. On en ressort littéralement assommé ! Answering The Call se montre immédiatement plus nuancé et mélodique, quoique toujours très technique. Mais les espaces s’ouvrent davantage que sur The Alien. Fidèles à leurs habitudes, les duels guitares / claviers se montrent toujours impressionnants de maîtrise chez les musiciens de Dream Theater. Inutile de préciser que nous avons affaire ici à de très grosses pointures en terme de technique pure. Bonjour la vitesse d’exécution ! On appréciera malgré tout ce groove insufflé au niveau rythmique dans la partie centrale durant laquelle s’expriment librement les solistes Jordan Rudess (claviers) et John Petrucci (guitares) malgré les cascades de notes auxquelles nous avons droit. Et les mélodies dans tout ça, me direz-vous ? Elles sont surtout apportées par les lignes vocales de James LaBrie qui nous propose de belles envolées, notamment sur les refrains. Car il faut bien le dire, cet entame d’album saisit l’auditeur à la gorge. La densité musicale est de mise. Normal quand on s’appelle Dream Theater !

Il faut attendre Invisible Monster pour se voir enfin proposer un titre plus conventionnel et, disons-le, moins démonstratif. Malheureusement, le refrain se révèle justement peut-être trop classique et peine à séduire. Le titre fait en effet pâle figure suite à la déferlante musicale des 2 premiers morceaux. L’intro, assez sombre et mystérieuse, laissait pourtant présager du meilleur. De manière générale, Invisible Monster et son format “chanson” arrive à point nommé après une entame d’album sur les chapeaux de roue. Cependant la mayonnaise a du mal à prendre à mon goût, la faute peut-être à des lignes de chant manquant d’originalité, notamment au niveau des refrains. Une décevante impression de “déjà entendu” plane tout au long de ce troisième titre et c’est bien dommage. Sleeping Giant se montre plus convainquant, à commencer par son intro mettant à l’honneur John Petrucci. Une très belle réussite ! Cependant, le titre ne se dévoile finalement pas aussi heavy que son entame le laissait présager. Le refrain, soutenu par un James LaBrie plutôt en forme, apparaît très mélodique. Ce Sleeping Giant navigue entre deux eaux : tantôt mélodiques, tantôt rapides voire folkloriques (les claviers du genre “fête foraine” sur le pont) à tel point que l’auditeur finit un peu par se perdre dans ce dédale de tiroirs musicaux. C’est notamment le cas durant le break. En outre, le refrain même s’il est mélodique, se révèle au final un poil anecdotique par rapport à la densité générale du titre car les séquences musicales sont longues et nombreuses. Sleeping Giant demeure malgré tout l’un des morceaux les plus intéressants, si ce n’est le plus intéressant, depuis le début de l’album. L’âme de Dream Theater s’y retrouve totalement. Avec Transcending Time, les musiciens reviennent vers un format moins élaboré, un peu à l’image d’Invisible Monster. Le break, même s’il nous gratifie d’un solo complètement fou de Petrucci, est plus “raisonnable” que celui de Sleeping Giant et donc beaucoup plus court. Caractérisé par de jolies mélodies, Transcending Time s’écoute avec un certain plaisir mais ne laisse pas pour autant une empreinte indélébile aux oreilles de l’auditeur. “Sympathique” serait le mot qui convient. On y notera cependant le solo totalement hors norme de Petrucci durant le break. Virtuosité, quand tu nous tiens ! Awaken The Master et son intro heavy en diable à la guitare 8 cordes fait mouche immédiatement ! Renforcé par la basse de John Myung et enrobé des parties de claviers de Jordan Rudess, il s’agit sans nul doute d’une des grandes réussites de ce nouvel album des New-Yorkais. L’intro est longue puisque le chant n’entre en scène que peu avant la troisième minute. Elle s’avère néanmoins fort réussie et s’écoute avec grand intérêt car les ambiances changent rapidement. Et niveau ambiances, Awaken The Master en regorge ! Dans l’ensemble, celles-ci sont d’ailleurs assez sombres et inquiétantes. Malgré un tempo relativement marqué, une sorte de voile mystérieux mais fort séduisant capte l’auditeur tout au long de ces 9 minutes 47 secondes pour ne plus le lâcher. Les lignes de chant sont une belle réussite également et enfoncent le clou. Le pont quant à lui fait la part belle aux parties instrumentales sur lesquelles s’expriment Jordan Rudess et surtout John Petrucci pour former à l’arrivée un véritable petit bijou de metal prog’. Malgré sa durée conséquente, Awaken The Master donne le sentiment d’un titre beaucoup plus court et on s’en réjouit ! Après 6 titres, l’auditeur parvient déjà à la fin de ce nouveau skeud de Dream Theater avec le bien nommé A View From The Top Of The World. N’allez pas pour autant croire que cet album est court puisqu’il dure plus de 70 minutes. La durée moyenne sur 7 titres est donc rapide à calculer ! Ceci étant dit, cet ultime morceau des Américains nous offre la bagatelle de 20 minutes et 24 secondes de musique ! Un titre forcément épique donc. Et c’est d’ailleurs le cas à l’écoute d’une intro que n’aurait pas renié un certain Peter Jackson pour illustrer sa trilogie du Seigneur Des Anneaux tant les orchestrations de claviers nous y font penser, très appuyées par une rythmique de marche assez martiale dans le genre. Les couplets restent dans un esprit très syncopé avant la libération apportée par le refrain, plus enlevé et mélodique. Globalement, on reste dans un metal prog’ de fort bonne facture. Puis soudain, le titre évolue vers un long break très calme et atmosphérique de toute beauté. John Petrucci nous gratifie de soli de guitare splendides et dont il a le secret. Incontestablement, les plus beaux instants de l’album ! Un break de batterie fulgurant de Mike Mangini plus tard et le titre reprend du mordant. Les duels de claviers / guitares s’affirment durant de longues secondes jusqu’au retour du chant. L’outro reprend le thème inité une vingtaine de minutes plus tôt mais il est interprété de manière différente. A View From The Top Of The World se termine en fade out, ce qui n’est pas des plus courants chez Dream Theater.

Ce nouvel album des maîtres du metal progressif ne pourra s’apprécier qu’au fil des écoutes tant il est long et très dense musicalement. Une telle oeuvre ne s’appréhende pas facilement. Mais avec les Américains, on a l’habitude ! Pour autant, je regrette que l’aspect heavy ne prenne pas plus souvent le pas comme c’était le cas sur Distance Over Time par exemple, leur précédente production discographique. Car c’est surtout dans ce registre que je trouve le groupe bougrement efficace. Le format “chanson”, presque “léger”, inhérent à certaines compositions ne lui sied pas forcément et dénote par rapport à des morceaux bien plus calibrés metal dans l’esprit et la construction. On ne peut certes pas blâmer les musiciens de chercher à varier les ambiances. Mais sur 7 titres, le ratio est finalement assez court. En outre, certains refrains manquent clairement d’inspiration. Un bon album dans l’ensemble, notamment sur son tout dernier tiers. Le meilleur du groupe ? Certainement pas.

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