Les + :
- Un concept original
- Un scénario et des personnages bien écrits
- Une vision du futur “réaliste”
Les – :
- Un montage pertinent, mais un peu déroutant
En 2074, la machine à remonter le temps a été inventée. Bien que cette invention soit aussitôt interdite par les autorités, la mafia s’en sert pour expédier dans le passé tout individu qui la gêne, où le pauvre malheureux en question se fera impitoyablement exécuter par un looper, c’est à dire un tueur à gages. Joe (Joseph Gordon-Levitt) est un de ces loopers, prêt à tuer sans hésitation, du moment qu’on le paie grassement. Sa vie va néanmoins beaucoup se compliquer lorsque, un jour, il s’aperçoit que la victime qu’on lui envoie du futur (Bruce Willis) n’est autre que lui-même…
Après la sortie de Brick (2005) Rian Johnson fouille dans ses tiroirs et retrouve un projet de court-métrage jamais tourné. Ce scénario rachitique lui plait et il décide de le développer. Sept ans seront nécessaires pour que Looper voit le jour. Le moins que l’on puisse dire c’est que Johnson n’aura pas perdu de temps à caster ses deux acteurs principaux. Le cinéaste a, dès le début, écrit le rôle de Joe pour son ami Joseph Gordon-Levitt. Quant à la version plus âgée de Joe, Rian Johnson a avoué qu’il rêvait de Bruce Willis pour le rôle mais qu’il n’y croyait pas trop au moment de lui envoyer le script, à cause du côté moralement très peu reluisant du personnage. Que nenni ! La star est enthousiaste et accepte rapidement!
L’arrivée de Bruce Willis rassure énormément producteurs et distributeurs. Néanmoins, un gros problème se pose pour Rian Johnson : Joseph Gordon-Levitt et Bruce Willis ne se ressemblent absolument pas, or ils sont censés être une seule et même personne dans le film. Abandonnant l’idée d’utiliser des effets numériques, Rian Johnson va engager un génie japonais du maquillage pour faire en sorte que Gordon-Levitt ressemble un tant soit peu à Bruce Willis. Johnson se passera aussi d’effets numériques pour créer sa vision d’une ville futuriste. Le réalisateur souhaite dépeindre un futur proche, réaliste et sobre. Loin des visions flamboyantes de certaines productions, Looper nous propose une version du futur à base de décors urbains froids, de jeux de lumière et d’influences manga. Si la sf est très propice au mélange des genres, on peut dire que Looper est un mix entre le thriller, le film de mafieux et la science-fiction.
Un des gros points forts de Looper est forcément le duo/duel entre le jeune et le vieux Joe. Car ici, même s’il s’agit de la même personne, on se retrouve bien en face de deux personnages distincts. Leur relation est on ne peut plus complexe. D’un côté ils sont unis par un lien puissant, un peu comparable à la gémellité. Mais le revers de la médaille consiste en une incompatibilité presque totale : le jeune et le vieux Joe n’ont pas du tout les mêmes personnalités et attitudes. Et ils n’ont absolument pas les mêmes objectifs, les mêmes rêves. Voilà un face à face tout en nuances et paradoxes.
Mais il ne faut pas croire que tout tourne autour de ces deux personnages paumés, amoraux, finalement peu sympathiques. Looper a bien plus à offrir car il soigne tout son petit monde. Le film présente par petites touches un “méchant”, le Maître des Pluies, au profil tout ce qu’il y a de plus atypique. Parfaitement conscient de l’aura inquiétante et intrigante du personnage, l’habile Rian Johnson se gardera bien de nous le montrer avant le dernier acte, suspense oblige. L’arrivée de Sara (Emily Blunt) et – surtout! – du tout jeune Cid (Pierce Gagnon, un gamin juste bluffant!) vient enrichir un film qui ne s’essoufflait même pas. Du luxe! Looper quitte alors l’univers amoral de la ville pour se donner des allures de western SF, où la moralité doit refaire surface à un moment où un autre. D’une façon paradoxale forcément.
CONCLUSION
Looper est une production au propos ambitieux et à la réalisation stimulante. Truffé de références facilement reconnaissables, le film n’en est pas moins absolument unique.