Du bon et du moins bon pour ce roman, qui manque à mon sens d’un gros travail éditorial !
Dans le royaume de Hélios, les mots ont un pouvoir. Celui de créer, d’équilibrer, puis de détruire le monde. Lorsqu’on les prononce, aucun retour en arrière n’est possible.
Arya, une jeune fille de la capitale, est passionnée de livres. Elle en dévore chaque mot. Mais elle est loin de se douter qu’elle est la clé pour sauver son royaume, le seul qui ait restreint l’utilisation de la magie grâce à un traité. Un traité qui ne plaît pas aux rebelles, prêts à tout pour l’éradiquer.
À l’aube des changements qui s’annoncent, les Mots se réveillent pour établir l’ordre dans le chaos, la vérité dans l’illusion.
Ils attendent leur Appel. Celui de la Passeuse de Mots.
Un début très prometteur qui retombe rapidement
J’ai beaucoup aimé la première partie du roman. Le décor de fantasty proposé par les auteurs, bien que relativement classique, est immersif. L’histoire de cette pâtissière qui œuvre dans les coulisses du château et son amitié étonnante avec un prince méprisé m’ont très vite happée. On a envie d’en savoir plus sur cet univers, son fonctionnement, ses frontières. L’arrivée des soldats de verre, élément perturbateur du récit, est également très réussie. Les descriptions de la ville ravagée, la rencontre entre Arya et le soldat… Tout était là pour me donner envie de poursuivre. Pourtant, plusieurs éléments ont gêné ma lecture. A commencer par cette quête, sur laquelle nous n’apprendrons au final pas grand chose. Lire un personnage expliquer à l’héroïne que “chaque chose en son temps”, alors qu’on en est à la page 700 et quelques, c’est un tantinet agaçant…
Un manque de cohérence global
Premièrement, le rythme de ce premier tome est très inégal. Il se passe plus de choses avant l’élément perturbateur que quand Arya découvre sa véritable nature, ce qui est pour le moins déroutant. Alors que les soldats de verre ont envahi la capitale, le monde semble s’être mis sur pause en attendant que celle qui doit le sauver soit prête. Malgré la soi disant menace, aucun sentiment d’urgence ne se dégage du récit. Les protagonistes évoluent dans une bulle, bien à l’abri de l’ennemi, que nous ne croiserons d’ailleurs quasiment pas. Ces temps au cours desquels l’héroïne développe ses pouvoirs sont trop lents, et surtout dépourvus d’enjeux. Ils alternent avec des passages haletants, où l’action s’enchaîne avec beaucoup de suspense : les auteurs sont capables de nous tenir en haleine quand ils le souhaitent. Cependant, ces passages n’apportent pas grand chose à la trame principale. Et surtout, il m’a semblé que ce suspense aurait pu être mieux distillé tout au long de ce premier tome.
Deuxièmement, la cohérence géographique laisse elle aussi à désirer. On est ballotés de lieux en lieux sans vraiment comprendre dans quel décor général tout cela s’inscrit. Les personnages passent d’une banque steampunk à un manoir gothique peuplé de vampires, pour finir avec des pirates… Je ne sais s’il s’agit d’un défaut de premier roman ou de la conséquence d’un récit écrit à quatre mains, mais j’ai eu beaucoup de mal à envisager cette histoire comme un tout cohérent.
Des personnages bardés de stéréotypes
Les personnages sont, à mon sens, le second point problématique de ce premier tome. On croirait presque que les auteurs ont lu les cartes personnages d’un jeu de rôle. Qui voulez-vous jouer ? L’héroïne vierge et naïve qui découvre ses pouvoirs ? Le voleur intrépide et malicieux ? Le général protecteur et paternaliste ? Le beau vampire ténébreux et torturé ? Les quatre protagonistes sont ici des archétypes, derrière lesquels il s’avère compliqué de trouver une véritable personnalité. Les nombreuses répétitions accentuent encore cette impression. Le voleur est à mes yeux le personnage dont la construction est la plus problématique. De lui, nous ne saurons rien ou presque : même son visage nous restera inconnu, puisqu’il demeure masqué sur l’intégralité du volume. Ce qui aurait dû attiser ma curiosité a fini par me lasser. En dehors de ses stéréotypes de voleur, Killian n’est personne. Un joli paquet cadeau certes, mais qui, à force de rester fermé, finit par perdre tout son intérêt.
La relation entre Arya et le voleur s’en ressent aussi. Il existe entre eux une tension sexuelle présente depuis leurs premiers instants. Tout est fait par les auteurs pour inciter en ce sens : les implicites, les descriptions de leurs contacts physiques… Mais une fois de plus, on stagne, et ces éléments n’aboutissent nulle part. Killian est verrouillé à l’extrême, quant à Arya elle semble tout simplement n’y attacher aucune émotion.
Les points positifs
Pourtant, malgré toutes ces problématiques, ce premier tome a su m’intriguer suffisamment pour me pousser à lire la suite. Je ne suis pas captivée au point d’avoir envie de la dévorer, mais je suis néanmoins curieuse de savoir où les auteurs souhaitent nous emmener.
Car en dépit des longueurs, de la stagnation du récit, certains passages sont extrêmement prenants. Corndor et le Val de Fer sont par exemple sont palpitants. Les auteurs sont donc capables d’insuffler un vrai sens du rythme au récit.
Par ailleurs, le point de départ de l’histoire reste à mon sens particulièrement intéressant. J’ai envie d’en savoir plus sur ces soldats de verre, sur cet ennemi jusque là invisible, intriguant mais supposément terrible.
Enfin, l’ensemble est ponctué par de nombreuses touches d’humour, ce qui rend la lecture divertissante.
Ce premier tome me laisse donc très mitigée. Je le poursuivrai avec la lecture du deuxième, qui déterminera si je continue ou non.