Abuela – Paco Plaza

LES + :

  • Une critique sociétale très d’actualité
  • Une ambiance anxiogène
  • Une mise en scène sobre et maîtrisée

LES – :

  • Un dénouement prévisible

Susana ( Almudena Amor) est une jeune mannequin espagnole, installée à Paris dans le but de percer dans le milieu de la mode. Un jour, elle reçoit un coup de téléphone en provenance de Madrid lui apprenant une bien triste nouvelle : sa grand-mère vient de faire un AVC. Susana va devoir rentrer en Espagne pour s’occuper d’elle…

Durant la grande vague du cinéma fantastique espagnol au début des années 2000, Paco Plaza n’était pas, à proprement parler, le réalisateur ibérique le plus en évidence. Certes, il a produit, avec son compère Jaime Balaguero (pour le coup, lui, nettement plus mis en avant) le phénomène Rec, mais néanmoins, l’ami Paco semblait se trouver à l’ombre des Amenabar, Balaguero, Bayona et consorts. Or, il est intéressant de constater que le discret Paco Plaza continue à proposer régulièrement de bons films, contrairement à ses collègues cités ci-dessus. En d’autres termes, sa carrière s’est révélée plus solide et consistante sur la durée.

Présenté et primé (prix du jury) au festival de Gérardmer, Abuela repose sur de très intéressantes idées. Tout d’abord, la diabolisation de la vieillesse au sein de nos sociétés modernes. Les vieux font peur aux jeunes, parce qu’ils représentent l’exact opposé du glamour qui fait rêver ces derniers. Vieillesse rime avec décrépitude, fragilité, mort. La menace du temps qui passe. Sur ce point-là le film de Paco Plaza excelle à utiliser ce ressort pour distiller patiemment l’angoisse chez le spectateur. Vu le sujet, tout le monde est concerné, et ça marche du tonnerre !

Paco Plaza se sert habilement de cette terreur de vieillir et finit par lorgner vers le body-horror en montrant le délabrement du corps vieillissant. Ceci est d’autant plus efficace en des temps comme les nôtres où le jeunisme et le culte de l’apparence sont mis sur un piédestal. Mais le réalisateur espagnol ne s’arrête pas là : il met en scène également la mauvaise conscience de la société qui abandonne ses anciens. Il montre le fossé béant qui sépare les personnes âgées du reste de la société. Paco Plaza construit son « monstre » à partir de là : la grand-mère – à la base victime des circonstances – va envier sa petite-fille pour sa jeunesse, sa santé, sa beauté. Et comme nous vivons en plein règne de l’individualisme, on ne pense qu’à soi.

Ainsi Abuela est un film qui parle de vrais problèmes de société sous le prisme de l’horreur. Si le film est déjà angoissant en étant réaliste, l’arrivée du surnaturel va bien évidemment en rajouter une couche niveau tension. Paco Plaza choisit de nous montrer tout de suite la nature de la menace qui va planer sur son personnage principal (quitte à nous donner une idée peut être trop précise du dénouement) et il le fait vraisemblablement en prenant le pari que son film séduira le spectateur viscéralement par son atmosphère étouffante, à défaut de le surprendre. Et là on sent que Plaza est dans son élément, faisant preuve de maîtrise dans sa gestion de l’espace, dans sa capacité à faire grimper le trouillomètre entre quatre murs, presque en huis clos.

Signalons également le choix audacieux (et gagnant) de faire reposer tout le film sur les épaules de la jeune et inexpérimentée Almudena Amor. La tâche était pourtant difficile : l’actrice, tout comme son personnage, se retrouve seule face à cette grand-mère mutique et (souvent) immobile interprétée par Vera Valdez, qui, de son côté, réussit l’exploit de faire naître l’inquiétude sans bouger un cil. C’est fort.

CONCLUSION :

Si Abuela ne révolutionne rien, il n’en reste pas moins un film angoissant, voire terrifiant, qui fait preuve de qualités cinématographiques indéniables et de beaucoup de pertinence dans son propos.

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