Un roman steampunk haletant, historiquement parfaitement maîtrisé avec une intrigue pleine de rebondissements !
1885, Constantinople.
Le tsar est tombé depuis 60 ans et une nouvelle puissance s’est levée à l’est. Le Nouvel Empire russe est devenu la première dictature industrielle. Ses dirigeables géants, ses chars et ses exosquelettes à vapeur ont assis sa domination face à l’Alliance de l’Ouest. L’Empire ottoman survit dans une fragile neutralité et sa capitale est le théâtre d’un jeu d’espions sanglant.
Martina Krelinkova, aventurière et monte-en-l’air, débarque à Constantinople avec une réputation sulfureuse alors que le Primat Imperator russe s’apprête à restituer au sultan un diamant légendaire : le Shah. À peine arrivée, elle découvre que sa sœur a mystérieusement disparu.
Tandis qu’un jeu du chat et de la souris s’enclenche à un rythme effréné, les obstacles se multiplient pour la voleuse. Parviendra-t-elle à retrouver sa sœur et à s’emparer du Shah, tout en mettant au jour les sombres intrigues du Grand Jeu ?
Première incursion dans la collection “Steampunk” de Bragelonne réussie ! Le roman de Lupu nous plonge dans un 19ème siècle uchronique, en plein cœur de Constantinople où Russes et Turcs se partagent un empire.
La casquette d’historien de l’auteur permet une immersion réaliste dans cette ville avec des points historiques très précis tout comme les descriptions réalistes des déplacements des personnages. J’ai lu le roman en regardant en parallèle la série docu-fiction L’essor de l’Empire Ottoman sur Netflix et je me suis rendu compte de la qualité du travail effectué par Lupu sur son univers et l’organisation de Constantinople. Si l’ambiance historique est bien présente, elle pèse un peu sur l’intrigue, car à force de trop vouloir décrire, la quête de Martina est parfois mise de côté, mais rien de bien grave tant l’ambiance est maîtrisée.
L’intrigue en elle-même se base sur les codes de l’aventure, l’espionnage et surtout du steampunk, notamment avec l’introduction de Mun, l’automate singe qui permet à Lupu de convoquer le travail de l’inventeur Junod (personne réelle et double jeu sur François Junod, encore en vie, fabricant suisse d’automates). Les chapitrages illustrés par de petits rouages nous mettent tout de suite dans l’ambiance tout comme la très belle couverture de Benjamin Carré. L’étonnant mélange entre machines à vapeur, dirigeables, automates, empire turc et dignitaires russes donne un souffle épique et original à l’histoire.
L’écriture de Lupu est fluide et son travail précis sur les personnages permet de nous y attacher facilement. Le seul point négatif c’est le rythme de l’histoire qui a tendance à être ralenti par des descriptions trop lourdes et des enjeux pas toujours clairs (je pense par exemple aux digressions avec Maurice et Mortier). Egalement, Martina manque peut-être d’un peu de charisme, même si sa quête secondaire liée à sa soeur Yelena apporte de l’émotion à son aventure.
Le Grand Jeu est un roman steampunk de qualité qui nous plonge dans un face-à-face étonnant entre Russie et Turquie. L’auteur convoque la splendeur de Constantinople telle que nous l’imaginons en sortant d’ailleurs de l’équation la question religieuse pour se concentrer sur le cosmopolitanisme de la ville. Ce choix de lieu original permet de plonger dans une aventure plus orientale qui change de ce que l’on peut lire habituellement.