Covered In Blood – Arch Enemy

La première réflexion qui me soit venue en tête en apprenant l’existence de cette compilation Covered In Blood fur un simple mot : “Pourquoi ?”. Bien avant de m’informer sur son contenu et sa qualité, je me suis demandé ce qui pouvait pousser un groupe aussi en vogue qu’Arch Enemy à publier un album de reprises. Non pas que le fait de faire des reprises soit une mauvaise chose, en tout cas bien moins qu’à Hollywood… Mais quelle est l’intention derrière le fait d’en faire un album ? Dans le meilleur des cas, quelques covers en guise de bonus track sur des éditions japonaises, ou pour en faire des singles en vue de promouvoir un EP ou un best-of, ça peut facilement se comprendre. Après tout, certains artistes ont fait des reprises un exercice de style qui, parfois, leur conviendrait presque mieux que leurs créations originales – Disturbed et Marilyn Manson, par exemple. Dans le cas d’Arch Enemy, j’avoue être resté perplexe. Le groupe reste sur deux albums relativement récents, plutôt bien reçus par les fans, et tout semble aller pour le mieux depuis l’arrivée de la flamboyante Alissa White-Gluz. Alors, pourquoi ?

N’étant pas un inconditionnel de l’actualité du groupe suédois, j’appris par le communiqué de presse la raison d’être de cette compilation. Plutôt qu’un réel album avec des covers récentes, il s’agit bien d’une compilation des nombreux titres repris par le groupe depuis ses débuts en 1995. L’occasion donc de retrouver quelques morceaux interprétés par les vocalistes précédents, à savoir Johan Liiva et évidemment Angela Gossow. Au total, on se retrouve avec 24 titres, allant de classiques du heavy metal à des reprises plus obscures de groupes punk suédois dont Michael Amott et ses comparses sont de grands fans.

Curieusement, les morceaux punk m’ont paru être les meilleures reprises de la compilation. Pour les auditeurs probablement nombreux qui n’auraient jamais entendu parler de Moderat Likvidation, Anti-Cimex et Skitslickers, ces titres courts et intenses offrent une nouvelle façon d’apprécier Arch Enemy, loin des mélodies death, dans un style plus brut de décoffrage, et cela passe à merveille. Alissa est plutôt douée dans le chant punk, et apparemment aussi pour chanter en suédois, d’après les dires de Michael. À se demander pourquoi le groupe n’a pas plutôt opté pour une compilation de reprises entièrement punk ! Dommage, ce ne sera pas pour cette fois qu’on entendra la belle s’exercer sur les Misfits. Pour ce qui est des chansons plus connues, de Aces High d’Iron Maiden à Breaking The Law de Judas Priest, en passant par Scorpions, Megadeth, ou l’hymne qu’est The Book Of Heavy Metal de Dream Evil, le gros problème vient du chant. La comparaison entre reprise et version originale est inévitable, et le fait de choisir des titres aussi cultes interprétés par des voix claires risque de décevoir ceux qui espéraient qu’Alissa fasse appel à ses talents dans le domaine. Au lieu de ça, le growl agressif noie complètement les paroles, et c’est à peine si les arrangements made in Arch Enemy sauvent la mise. L’exemple le plus frappant se trouve sur la toute première piste, Shout de Tears For Fears, qu’on peine à reconnaître jusqu’à la dernière partie. La version de Disturbed, si elle ne prenait pas d’énormes risques en comparaison, avait au moins le mérite d’être compréhensible et dans le ton – et je déteste Disturbed, c’est dire ce que j’ai pu penser de la version Arch Enemy. Incompréhensible aussi le choix de clore sur The Ides Of March d’Iron Maiden, un instrumental de moins de deux minutes.

Si l’on peut donc saluer le travail des musiciens qui parviennent à incorporer à chaque morceau la petite touche Arch Enemy, l’absence de la voix claire d’Alissa accentue d’autant plus la déception. Seule la reprise de Carcass avec Incarnated Solvent Abuse rend plus ou moins honneur à la version originale, et n’est pas tellement une surprise quand on sait que Michael Amott a fait partie du groupe britannique. Au final, Covered In Blood ressemble beaucoup trop à une obligation commerciale de la part du label pour garder Arch Enemy dans l’actualité en attendant le prochain album, plutôt qu’un réel apport dans la discothèque d’un fan du groupe, qui aura de toutes façons déjà entendu tous ces morceaux sur les albums précédents. Navrant quand on sait à quel point le groupe aime à se définir comme non-conformiste. Espérons donc que le prochain album vienne relever le niveau, car malgré tout, Arch Enemy sait proposer beaucoup mieux.

Covered In Blood
Arch Enemy
Century Media
2019

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