Christopher Bach était policier lors de la Grande Panne, ce jour où le Calculateur central, qui contrôle tous les systèmes de survie sur Luna, a connu une défaillance fatale. La vie de Chris a alors irrémédiablement basculé, et il essaie désormais d’être détective privé. Assisté de son chien cybernétiquement augmenté, Sherlock, il tente de résoudre les quelques missions qu’on lui confie en imitant les héros durs à cuire qui peuplent les livres et films noirs qu’il adore.
Lorsqu’une femme entre dans son bureau et prétend avoir été infectée volontairement par une lèpre incurable, Chris est tout disposé à l’aider à retrouver celui qui l’a contaminée. Mais il va vite déchanter en comprenant que son enquête doit le mener là où personne n’a réellement envie d’aller de son plein gré : à Irontown…
John Varley est l’immensément talentueux auteur de Gens de la Lune, qui est pour moi un monument de la littérature de science-fiction figurant fort haut dans mon panthéon. Gens de la Lune, tout comme Le Canal Ophite, Le Système Valentine et Blues pour Irontown font partie de la série Les Huit Mondes. Et, si les trois premiers peuvent se lire indépendamment, il n’en est rien ici : Blues pour Irontown est en effet la suite plus ou moins directe de Gens de la Lune.
Lorsque j’ai appris que John Varley allait publier un nouveau roman se situant dans cet univers, riche de trois œuvres fascinantes, intelligentes et prenantes, mon impatience est devenue à peu près sans bornes. Et la déception, malheureusement, a été à la hauteur de mon attente. L’avant propos, dans lequel l’auteur nous explique un peu mieux le concept de cette série et les difficultés d’écriture qu’il a rencontré avec ce dernier opus est ce que j’ai trouvé de plus intéressant dans le roman, et c’est extrêmement triste, tant l’auteur a mis de temps à réaliser ce projet qui lui tient à cœur.
Mais ici, l’originalité des opus précédents brille par son absence. On alterne les points de vue entre le personnage principal, un type un peu paumé qui joue, plutôt mal, au détective privé pour passer le temps, et son chien cybernétiquement augmenté. Et si le rapport entre le maître et son chien est émouvant, j’ai éprouvé plus d’une fois un certain malaise lorsque ce dernier prend la parole. Alors certes, on nous explique que retranscrire à destination des humains les propos d’un chien, qui n’a pas le même système de pensée, les mêmes valeurs ni la même notion d’intimité qu’un humain, est assez compliqué. Mais cela donne lieu à des moments assez vulgaires, emplis de détails dont je me serais bien passé. Trois points positifs sont toutefois pour moi à mettre au crédit des paragraphes centrés sur Sherlock : la vision du monde centrée sur les odeurs, c’est souvent assez cru mais riche et quelque fois poétique ; cela nous permet de comprendre comment les “superpouvoirs” du chien fonctionnent ; le roman est un peu moins court.
Autrement… Les explications finales du pourquoi du comment sont très alambiquées et tirées par les cheveux et l’enquête en elle-même est plutôt peu passionnante. On appréciera pour la nostalgie, pour avoir quelques informations complémentaires sur ce qu’il est advenu de la lune après la Grande Panne et pour revoir certains personnages de Gens de la Lune. Mais certainement pas pour se prendre une claque, chambouler sa vision du genre ou de tout autre enjeu contemporain.
Ma conclusion :
-Un épilogue mal dégrossi à l’inestimable chef d’oeuvre qu’est Gens de la Lune, à destination de nostalgiques qui ne s’attendent pas à grand chose, et qu’est-ce que ça me fait mal de dire ça tant j’aime profondément cet auteur…
Blues pour Irontown
John Varley
Couverture illustrée par Alain Brion
Traduit de l’anglais par Patrick Marcel
Éditions Denoël
2019