Un terrible et inexplicable accident survenu dans un ascenseur d’hôtel fait quatre morts. Félix Adelaar (Huub Stapel), un dépanneur, se charge de contrôler ledit ascenseur, sans réussir à déceler la moindre anomalie. Tout semble normal. Sauf que les morts se succèdent à bon rythme…
Un ascenseur, ça vend du rêve, hein ? Comment a-t-on pu se dire que c’était une bonne idée ? Et bien, ce diable de Dick Maas a trouvé la bonne réponse : doté son ascenseur d’un esprit psychopathe ! Fallait y penser ! Car c’est effectivement très malin de jouer sur l’angoisse que l’on éprouve (presque) tous lorsqu’on entre dans un ascenseur et qu’on ne peut s’empêcher de frissonner à l’idée d’y rester coincé. Alors si en plus cet ascenseur a des envies de meurtres… Alors là, on tient quelque chose.
Néanmoins L’Ascenseur n’est pas qu’une série B de petit futé. C’est aussi un film surprenant à bien des égards. Avec son extraordinaire audace en terme de postulat de départ, De Lift (titre original) aura également accompli l’exploit de se voir décerner le Grand Prix du Festival d’Avoriaz en 1984. Pas mal du tout quand on vient d’une contrée (les Pays Bas) dont la production cinématographique est assez modeste.
Dick Maas est, dans son pays, une sorte de roi de la série B. Il se sera fait remarquer, par la suite, avec d’autres films tels que Amsterdamned (1988) et Sint (2010) qui sont des œuvres elles aussi, visiblement dotées de ce côté « barré ». Mais L’Ascenseur reste son film le plus marquant. Dick Maas ira même travailler en Amérique en 2001 pour en faire une sorte de remake-suite, L’Ascenseur niveau 2.
Sous ses fausses apparences de série B un peu débilos, L’Ascenseur propose de belles choses. Par exemple, son personnage principal, Adelaar, est un prolo, un simple père de famille qui lutte pour gagner sa croûte. C’est un type qui se prend des coups, mais qui s’accroche. Cette sympathie qu’on a pour lui, on imagine bien que Dick Maas l’éprouve aussi. Qu’il est de son côté. Car, du moins en ce qui concerne les premières victimes de l’ascenseur, on a comme l’impression que Maas prend un malin plaisir à les dézinguer. Deux types en costard cravate, visiblement argentés, accompagnés par deux escort-girls bourrées comme des coings. On voit le topo. Ces quatre-là incarnent la beauferie, la vulgarité à l’état brut. Le film de Dick Maas serait-il un brin misanthrope ? En tout cas il pointe du doigt la médiocrité humaine et s’en amuse.
Avec l’aide de Mieke (une jeune journaliste fonceuse et fouineuse) Adelaar va mener sa petite enquête. Ce qui permettra au film d’aborder des thèmes tels que les dangers liés à la technologie et les avancées, beaucoup trop rapides, de l’intelligence artificielle prête à dépasser l’intelligence humaine. Tout cela accompagné d’un message très critique envers les grandes multinationales. C’est de ces compagnies que naît le danger. Ce sont elles qui jouent avec le feu et doivent par la suite cacher de terribles et mortels secrets. Un autre hollandais lancera, quatre ans plus tard, une attaque beaucoup plus virulente encore contre les multinationales : un certain Paul Verhoeven avec son Robocop.
Signalons également que L’Ascenseur ne doit absolument pas son charme à un style visuel flamboyant, loin de là ! Tout dans le décor du film tend vers la grisaille banlieusarde et industrielle (de l’hôtel pas folichon, du béton, du parking, de la zone industrielle). Ce parti pris, certes original, n’est pas sexy pour un sou. Avec ses couleurs délavées dignes d’un épisode de Derrick (impression confirmée avec l’arrivée des flics en gabardine Columbo), L’Ascenseur propose une image austère, digne par moments d’un film de l’ex-URSS ou d’un film institutionnel. Pas motivant, tout ça ? Oui et pourtant on tient bon ! Parce qu’on est avec Adelaar et Mieke et qu’on veut savoir le fin mot de l’histoire.
Avec ses nappes de synthé bontempiesques, 100% années 80, L’Ascenseur trahit ses influences carpenteriennes, même si les thèmes musicaux ici présents sont loin d’égaler ceux de Big John. Bénéficiant d’un doublage français excellent (pour une fois c’est pas grave de préférer la VF!) où l’on reconnaît plusieurs voix célèbres de l’époque, L’Ascenseur séduit également par son humour noir et par son gore qui sent bon le bricolage. Définitivement culte.
L’ Ascenseur
réalisé par Dick Maas
Avec Huub Stapel, Willeke van Ammelrooy et Josine van Dalsum
Disponible en DVD