LES METIERS DE LA MUSIQUE : entretien avec Peet, photographe

Peet est un mec à part dans les pits photos : même s’il a parfois l’air d’un patron de la mafia ou d’un milice, avec son petit tabouret de festivals, il sait aborder les gens avec une amabilité et une bonhomie rares. Et en plus de cela il fait un boulot magnifique ! A titre personnel la qualité de son travail de photographe m’a toujours proprement impressionné, comme vous le montreront les quelques clichés ci-dessous…
Que demander de mieux, donc, que de l’interviewer dans le cadre de cette série Les Métiers de la musique ? Béranger de Lykh’arts dirait : Un cassoulet avec les sages paroles du Senseï !!!!

eMaginarock : Bonjour, et merci de prendre quelques minutes pour répondre à ces questions. Pourrais-tu tout d’abord te présenter, et nous expliquer comment tu en es venu à la photo, et plus particulièrement la photo de concert ?

Peet : Bonjour, je suis Peet, j’ai 46 ans et je suis dans le milieu du metal depuis 30 ans. J’ai commencé en tant que bassiste puis batteur au sein du groupe Misanthrope. Après quelques années j’ai arrêté la musique mais je voulais rester dans le milieu, j’ai donc trouvé un boulot chez Holy Records pendant plusieurs mois. J’ai ensuite, grâce à Mr Arno Geenens, appris les lights et je bosse pour NO RETURN depuis 15 ans en plus de mon vrai boulot alimentaire de reprographe. Avec mon premier reflex (450D canon et un 18-135) j’essayais de prendre des toffs en les suivant en concert. La catastrophe…

En 2015 ils ont fait le HellFest et j’ai sympathisé avec des photographes qui m’ont donné des tonnes de conseils. Sur place j’ai rencontré Marc, le boss de UNITED ROCK NATIONS qui m’a proposé de bosser pour lui. J’ai sauté sur l’occasion et cela fera donc 2 ans en septembre que j’essaye modestement de faire des toffs de concert.

eMaginarock : Comment travailles-tu, quel matériel utilises-tu ?

Peet : J’ai commencé chez Canon et j’y suis resté. Je ne fais pas partie de ceux qui se font la guerre entre les jaunes et les rouges. Je suis donc passé rapidement à un 80D puis ensuite au 7D MARK II. Je possède comme objectifs un 11-16 2.8 Tokina, un 18-55 2.8 Canon et un 70-200 2.8 Tamron. Je suis donc encore en APS-C en espérant passer le plus vite possible en Full Fram. Je fais donc appel à vos dons. (rires) Niveau prise de vue je bosse en manuel 90% du temps et je shoot en RAW à 2.8 voire 3.5 si les conditions le permettent.

eMaginarock : Comment travailles-tu en post-prod ? Quel logiciel utilises-tu ?

Peet : Je bosse exclusivement avec Lightroom que je trouve relativement simple d’utilisation. Même si j’utilise Photoshop dans mon boulot je n’ai pas assez de connaissances pour y retoucher mes photos.

eMaginarock : Comment considères-tu ton boulot de photographe live ? Quelle est la vision qu’en ont les gens ?

Peet : C’est une passion avant tout mais tu as raison d’employer le mot “boulot”. Même s’il n’y a aucune rémunération, c’est véritablement un deuxième emploi. Les gens ne se doutent pas de l’investissement financier et du temps que nous prenons. Bien sur nous prenons quelques réflexions du genre, “vous faites chier à passer devant” ou “vous payez pas vos places” etc… mais franchement quelle excitation et quel challenge d’essayer de sortir un cliché sympa.

Il y a aussi les messages des potes photographes ou des personnes qui nous suivent sur les réseaux sociaux et le site qui nous motivent à continuer. C’est donc pour moi une véritable bulle d’oxygène de pouvoir fréquenter les pits.

eMaginarock : Quelle est la plus grosse claque que tu te sois prise sur un live (en tant que photographe) ?

Peet : Incontestablement, ACCEPT, que j’ai fais au Trianon et à l’Olympia. Déjà musicalement j’adore le groupe mais en plus en live c’est un véritable bonheur. Ca joue grave comme on dit et en plus le groupe est vraiment joueur avec le public et les photographes. Surtout Wolf Hoffmann qui nous permet de faire de bons clichés pendant les 3 titres qui nous sont alloués.

Je pourrais aussi rajouter SLAYER au Zénith de Paris. Cela ne faisait pas 1 an que je fréquentais les pits quand j’ai eu la chance d’être accrédité pour ce concert.

eMaginarock : Et a contrario quel est ton pire souvenir (en tant que photographe) ?

Peet : Oh il y en a eu pas mal, mais ma plus grosse déception reste le concert de PARADISE LOST au Trabendo de Paris. Le concert en lui même ne souffre d’aucuns reproches mais étant ultra fan du groupe je voulais absolument réussir un cliché de Mr Gregor Mackintosh. Le groupe jouant ce soir là sans lumières de face et un bleu très sombre sur scène, je repasserais donc une autre fois.

Quand je vous disais qu’il avait l’air d’un patron de la mafia….

eMaginarock : Le média pour lequel tu travailles te laisse-t-il toute latitude sur tes photos et tes choix de concert ?

Peet : Nous avons la chance d’avoir un Boss super cool. Nous avons donc beaucoup de liberté. Bien sur il y a un minimum de concerts à couvrir mais nous avons une grille ou chacun peut se positionner et rajouter des concerts. Mais pour le bon fonctionnement du webzine nous ne pouvons pas nous contenter uniquement des groupes que nous aimons ou des salles nous permettant de faire de bons clichés. Nous essayons de couvrir un maximum de concerts donc tu peux très bien faire un groupe de black metal le mardi soir à la Maroquinerie et faire Europe le samedi à l’Olympia. C’est moi entre guillemets qui gère les accréditations, donc il est clair que celui ou celle qui se bougera toute l’année aura plus de possibilités que celui qui te fais 1 concert par trimestre.

Il n’y a pas si longtemps j’ai été contacté par une personne qui voulait intégrer notre équipe. Le gars commence sa demande par “je voudrais couvrir le symphonique car je suis fan”, “je veux bien faire DELAIN, WITHIN TEMPTATION, EPICA et NIGHTWISH”, eh bien la réponse est non.

eMaginarock : Comment fais-tu pour mener tes activités professionnelles et la photographie de front ? Car c’est tout de même un gros travail !

Peet : Oh oui un gros travail. Déjà ce qu’il faut savoir, c’est qu’un concert c’est 2 à 3 soirs de boulot pour moi. Il y a le soir du concert et quand je rentre chez moi je sélectionne 4 ou 5 photos que je poste en preview. Ensuite les 2 autres soirs il y a tout le tri et les retouches et ensuite l’écriture du report. Et vu que je ne suis pas écrivain, celui ci est un véritable calvaire (rires).

Maintenant j’ai la chance de quitter mon boulot de bonne heure, donc pas de soucis pour les concerts et j’ai l’énorme privilège d’avoir une femme et des enfants très patients et compréhensifs qui me laissent pratiquer ma passion avec une très grande liberté.

eMaginarock : Fais-tu d’autres types de photographie que du live ?

Peet : Je voudrais en faire plus mais le temps me manque. Cet été je retourne un fois de plus dans les Pyrénées donc je vais encore embêter ma petite famille avec mon trépied, mes filtres et ma télécommande pour faire des poses longues de cascades et autres cours d’eau.

J’aimerais aussi me mettre à faire des photos de groupes ou de portraits, mais c’est une autre technique et ça ne s’improvise pas comme ça du jour au lendemain.

eMaginarock : Comment vois-tu le milieu musical actuel depuis les pits ? Est-ce difficile pour les groupes de se faire une place ? N’y a-t-il pas trop de groupes et pas assez de scène ou de public ?

Peet : Alors vraiment difficile à dire. On se sent quelques fois un peu étranger au truc. Je suis surpris de voir certaines salles pleines pour des groupes “neufs” et d’autres moins malgré la renommée de l’artiste. Sur Paris le public est assez spécial il faut dire. Il y a tellement de concerts et les prix des places ont tellement augmenté que les fans font des choix et c’est normal. Les groupes ne gagnant plus d’argent sur les disques, ils tournent de plus en plus.

Il y a aussi la multiplication des Fests dans l’hexagone et je comprends le fan qui met 200€ pour voir une multitude de groupes plutôt que 40 pour en voir 2 ou 3.

Pour la scène hexagonale je serais plus critique, car pour moi les groupes fonctionnent à l’envers. C’est peut-être mon âge et ma mentalité de vieux con, mais avant pour pouvoir sortir un disque et avoir un deal, il fallait cravacher grave. Faire 2 ou 3 démos et écumer les bars et petites salles. Maintenant tout le monde peut sortir son album au bout de quelques répétitions et le résultat n’est pas toujours au rendez-vous.

Mais ne me faites pas dire que je mets tout le monde dans le même panier, il y a énormément de talent chez nous comme les derniers albums de DEFICIENCY ou HYPERDUMP par exemple.

eMaginarock : Merci d’avoir pris le temps de répondre à ces questions et à bientôt au détour d’un pit photo !

Peet : Merci surtout à toi de faire découvrir ce milieu à d’autres. Et de créer, pourquoi pas, de nouvelles vocations.

Retrouvez le travail de Peet sur United Rock Nation.

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