J’avais eu l’occasion de découvrir l’œuvre inimitable de Joe Abercrombie avec sa trilogie La Première Loi chez Pygmalion. J’étais donc d’autant plus avide de découvrir ce que pouvait donner sa dernière parution, sachant qu’une fois de plus ce serait de la fantasy avec un grand F.
La couverture est la même qu’aux Etats-Unis, jolie, évocatrice avec cette épée et ces quelques pièces, cela suffisant à intriguer le lecteur avide que je suis… Cela promet de l’aventure, et cela n’est pas pour me déplaire. La présentation de l’éditeur nous ouvre de nouvelles portes sur l’univers d’Abercrombie :
C’est le printemps en Styrie. Et avec le printemps, vient la guerre.
La guerre est un enfer, mais c’est aussi un gagne-pain pour certains, comme Monza Murcatto, la plus célèbre et redoutée des mercenaires au service du grand-duc Orso. Ses victoires l’ont rendue très populaire… trop, même, au goût de ses employeurs. Trahie, jetée du haut d’une montagne et laissée pour morte, Monza se voit offrir en guise de récompense un corps brisé et une insatiable soif de vengeance.
Quoi qu’il lui en coûte, sept hommes devront mourir.
Elle aura pour alliés un soûlard des moins fiables, le plus fourbe des empoisonneurs, un meurtrier obsédé par les nombres et un barbare décidé à se racheter une conscience.
C’est le printemps en Styrie. Et avec le printemps, vient la vengeance.
Avec Abercrombie, la fantasy est ce qu’elle est de plus naturelle : sanglante, dérangeante et pourtant terriblement séduisante et rafraîchissante. Car l’auteur ne s’encombre pas d’inutilité, que ce soit en terme de personnages, de mots fleuris, ou encore d’actions inutiles. Dès le début du roman, le lecteur se trouve embringué dans le meurtre de Monza et Brenna, le tout agrémenté de tripes et de boyaux. La reconstruction puis la vengeance de Monza, au centre du roman, va se faire dans le sang et la sueur et l’auteur parvient parfaitement à nous décrire des scènes impressionnantes de réalisme.
Les personnages qui nous sont ici proposés (Monza, Shivers, Cordial, l’empoisonneur, Day,…) sont des modèles du genre à la fois par leur côté archétypal, mais aussi et surtout par leur psychologie ne s’arrêtant pas à un manichéisme primaire. Car ici il n’y a ni bien ni mal, juste des hommes et des femme créant leur propre destin à la force des armes mises à leur disposition. Et cela inclut à de nombreuses reprises la trahison comme moyen de parvenir à leur fin. Shivers est le personnage qui m’a le plus convaincu car j’y ai retrouvé un arrière-goût de La Première Loi avec ce Nordique loin de chez lui cherchant à devenir un homme meilleur. De nombreuses références à la trilogie émaillent d’ailleurs Servir froid, ce qui devrait ravir le lecteur aficionado de l’auteur.
Le rythme et le style sont parfaitement maîtrisés puisque j’ai eu des difficultés à interrompre ma lecture, la nuit avançant dangereusement. Stylistiquement, c’est très cru que ce soit dans les termes ou bien les descriptions. L’auteur ne s’encombre pas d’un vocabulaire fleuri : une merde est une merde… Personnellement, j’ai beaucoup apprécié cet aspect car il n’utilise pas la vulgarité comme moyen mais bel et bien comme élément de l’univers et de l’histoire des personnages. Cela ne m’a donc en rien choqué. Le sexe est lui aussi bien présent mais reste justifié, ce qui me convient tout à fait.
Seul bémol que verront beaucoup de lecteurs : le prix. Celui-ci s’explique par une couverture rigide et surtout presque 700 pages. Donc ne hurlez pas trop à la vue du prix, d’autant que la version epub est à 12,99 €…
Servir froid est un grand roman de fantasy comme on en lit trop peu. Trop souvent, les auteurs plongent dans des descriptions fleuries alors que l’essence du genre pourrait se résumer en trois mots : du sang, des tripes et du sexe. Et en cela, Joe Abercrombie propose un roman parfaitement abouti, qui sans révolutionner le genre va lui donner ses lettres de noblesse…
Servir froid
Joe Abercrombie
Bragelonne
Format relié
30 €