Avec ce tome 5, un tournant se dessine. Ce n’est pas que l’on ait eu le moindre temps mort dans cette histoire mais cette fois-ci Andô va cesser d’hésiter.
Après avoir échappé aux tentatives d’assassinat à son encontre et fait un grave malaise à force d’avoir trop usé de son don, Andô décide d’oublier ce qu’il sait ou croit savoir d’Inukaï et des Grasshoppers. Il veut retrouver sa vie d’avant, paisible, profiter de son petit frère, du temps passé ensemble, de sa jeunesse. Mais sa conscience le rattrape : à quoi cela lui servira t-il de vivre les yeux fermés ? A attendre la mort qui viendra plus tard mais viendra de toute façon ? Tandis que la Cigale est aux prises avec des tueurs plus ou moins doués et tente de protéger le maire, un nouvel ennemi apparaît. La « Baleine » est aussi un tueur que l’on paie et il est justement là pour le maire. L’affrontement entre ces deux as de la mort passe inaperçu pour Andô. A peine a-t-il fait le point avec lui-même qu’un incendie violent le mène, avec son cadet, devant une maison. Le fils d’Anderson, cible désignée par Inukaï, y dînait avec les occupants, un couple de personnes âgées. La haine de la population locale a poussé les gens à mettre le feu à la maison pour tuer Anderson junior. Andô y voit là un test ultime de sa motivation. Cette fois-ci, c’est sûr, il « entre dans l’arène ».
Bien que ce cinquième tome soit plein d’action, on sent que l’on marque une pause dans le récit pour laisser place à la réflexion. La question morale qui torturait le héros depuis le début de l’histoire le poursuit bien sûr mais pour la première fois il se laisse gagner par une réelle certitude : s’il utilise trop intensément son don bizarre, il court à sa perte. Peu importe que ce soit par ce pouvoir ou de la main de ceux qu’il contrerait, il sait que son sort est jeté s’il poursuit dans cette voie. Qu’est-ce qui compte le plus ? Lui-même ou cette société qu’il tente désespérément de sauver d’elle-même, sans appui, sans certitude de réussite ? Son sens du sacrifice penche sur la balance, opposé au devoir. Néanmoins, Andô est profondément épris de justice et cette volonté sera la plus forte. Il est appréciable de voir combien ce manga donne également de l’importance aux personnages secondaires. Ils ne sont pas les faire valoir du héros, ils ont une mission propre, un chemin à faire. C’est particulièrement le cas du cadet Junya et de La Cigale. Lentement mais sûrement, ces deux protagonistes sont entraînés dans la spirale diaboliquement intense du Prince des Ténèbres. La qualité du scénario est égale, tome après tome de même que la fluidité réaliste du trait de Megumi Ôsuga. Aussi bon qu’un roman, cette série est à ne pas manquer !
Le Prince des Ténèbres T5
Scénario : Kôtarô Isaka
Dessin : Megumi Ôsuga
Traduction : Kayo Chassaigne-Nishino
Editions Kurokawa
6,50 €