Dans le vaste royaume d’Eibithar, les règles de succession au trône sont à la fois simples et complexes. Les maisons ducales peuvent toutes prétendre à la couronne mais suivant un ordre bien précis, autrefois fixé à l’issue d’une guerre devenue légende. Opposant les sorciers qirsis aux habitants d’Eibithar, le conflit se solda contre toute attente par la défaite cuisante des magiciens, grâce à une trahison. Les maisons ducales gagnèrent en puissance, le rôle que chacune tint lors de cette guerre, la quantité d’hommes qu’elle y sacrifia, tout ceci devint critère pour classer les duchés suivant un ordre d’accession au trône du royaume. Et les choses demeurèrent ainsi, ne laissant planer sur Eibithar que la menace de la Pestilence, vague d’une maladie effroyable qui peut frapper n’importe qui, n’importe où, n’importe quand et qui assura aux Qirsis survivants un rôle à jouer.
Mais, alors que le roi Aylyn est vieux et mourant, les évènements se précipitent soudain. Quand ils ne sont pas conjureurs de la maladie, guérisseurs ou Glaneurs apportant la vision de leur avenir aux enfants, les sorciers qirsis, réduits à une population minime, ont joué de leur savoir et de leur magie pour se hisser au rang de ministres conseillers à la cour des ducs et du roi. Dans l’ombre, certains d’eux se sont unis avec pour dessein la destruction de cet ordre des choses, la montée sur le trône des Terres du Devant d’un Qirsi plus fort que tous, un Tisserand, un magicien qui peut user de toute forme de magie et des ressources physiques et magiques de ses semblables.
Le duc de Galdasten qui succombe avec sa famille à la Pestilence apportée par un homme fou de chagrin, l’héritier de la maison des Thorald qui se fait attaquer et égorger en pleine forêt : l’ordre de succession est bouleversé. Le prochain prétendant est Javan de Curgh, homme avisé mais fier. Il pense allier sa maison à celle des Kentigern, suivante dans l’ordre de succession, par un mariage entre son fils Tavis, futur prince, et la jolie Brienne de Kentigern. Le soir des fiançailles, tout se déroule comme prévu, mieux encore puisque le jeune homme pourtant prétentieux, caractériel et au comportement étrangement choquant depuis sa dernière vision de son avenir, tombe amoureux de sa promise. Mais, au matin, il s’éveille les mains couvertes de sang, sa dague plantée dans le corps de Brienne, sans aucun souvenir de la nuit passée.
Mis en geôle par le duc de Kentigern, Tavis va endurer la torture pendant que son père tentera, en vain, de prouver son innocence. Pourtant, un Qirsi va oser se dresser seul face au complot pour sauver Tavis. Grinsa, un Glaneur, a vu l’avenir de Tavis, il sait que le jeune homme est innocent, qu’il est victime d’un complot, qu’un assassin très habile a tué Brienne, qu’il a un futur grandiose devant lui et que lui, Grinsa, doit le garder en vie coûte que coûte. Car la destinée d’Eibithar et des Terres du Devant dépend peut-être de lui.
L’édition intégrale reprend la tomaison de l’édition originale, ce qui est appréciable. Les dix tomes initialement édités chez J’ai Lu incluaient l’ensemble de la saga de David B. Coe mais cette version intégrale gagne en clarté dans le confort de lecture. En effet, l’histoire est avant tout un gigantesque complot dont la trame n’est pas si évidente que ça. L’auteur distille les intentions de ses personnages avec un rythme calculé qui laisse savourer un suspense de premier ordre. Si on peut se demander ce que viennent faire les personnages qui entrent en scène les premiers, on est vite surpris : leurs intentions se soldent rapidement par des déconvenues et autres sinistres fins. Et cette manière d’aborder le récit est vive, aiguisée, elle emporte le lecteur dans l’univers des Terres du Devant avec assurance et efficacité. On ne cesse de tourner les pages pour en apprendre plus, pour lire ce qui va advenir ensuite.
J’ai commencé ma lecture sans lire le très maigre résumé imprimé sur le battant de la couverture cartonnée, j’ai donc vraiment découvert le coeur du drame qui agite ce premier tome. Pourtant, en y regardant de près, l’illustration de couverture m’a peu à peu mise sur la voie, à mesure que le destin des personnages principaux se dessinait, j’ai anticipé les faits et gestes de l’assassin, sa principale victime et les conséquences. Et oui, regardez attentivement le splendide travail de Marc Simonetti et vous aurez une piste importante : cette grande pièce de pierre médiévale, nue à l’exception d’un lit couvert de sang, baigné d’une lumière froide comme la mort…
David B. Coe présente ses personnages, son contexte, les fils de ses intrigues avec un style épuré et direct qui fluidifie la lecture. On ne s’attarde pas sur les décors, les physiques, les intentions de chacun sont précisées à mesure que l’on découvre un nouvel enjeu. On pressent les indices, les pistes et on savoure de les voir aboutir à quelque chose que l’on attendait et qui, parfois, se révèle très différent. Bien que les intrigues soient nombreuses, tout est clairement défini, suivant des règles simples qui ne sont pas assénées par paragraphes entiers mais à travers quelques phrases, d’un chapitre à l’autre.
Habile est le terme qui définit le mieux le style de David B. Coe. A tel point que l’un de ses héros, Tavis, est antipathique dès qu’on le découvre. Et, à l’issue de ce premier tome, on n’est pas sûr de l’apprécier plus en dépit des épreuves qu’il a endurées. Les autres protagonistes sont intéressants, traités avec soin, crédibles, réalistes et que l’on s’attache à eux ou non, on aime lire leur parcours. Nous avons même droit, en fin de ce tome, à deux batailles, décrites avec passion et vivacité, de telle sorte que l’on se trouve au coeur de l’action, entre les masses compactes des soldats qui tranchent, hurlent, frappent et succombent.
Depuis que j’ai découvert les intégrales de J’ai Lu, je ne cesse de leur trouver des qualités : le format est agréable, le papier est fin mais cela allège le poids général d’une compilation de tomes, la typographie est claire, les couvertures cartonnées souples sont résistantes, même pour un usager quotidien des transports en communs. A part quelques coquilles, deux fautes de grammaire / accord, une inversion entre les noms des duchés de Kentigern, pas de défaut dans la traduction, mais de relecture sûrement. Comprenant les deux premiers tomes de la première édition de poche, cette intégrale 1 ne me laisse qu’une impression : vouloir rapidement lire la suite!
La Couronne des 7 Royaumes
L’intégrale T1
David B. Coe
Couverture : Marc Simonetti
Traduction : Sophie Troubac
Edition J’ai Lu
12,90 €
Tiens, une nouvelle découverte! C’est la première fois que j’entends parler de cet auteur. Je note. :-)
Ce cycle est fabuleux ! L’intrigue nous tient du début à la fin, les rebondissements sont innombrables et souvent inattendus. On peut avoir peur du nombre de protagonistes, répartis dans tous ces duchés et pourtant tout se rassemble pour donner l’un des meilleurs cycle que j’aie lu.
Avoir repris la tomaison originale est une bonne chose. Mais pour l’anecdote, j’ai lu le cycle lors de sa première parution. Et la fin du tome 1 m’avait énormément frustré, je m’étais alors rué sur le 2, le 3 et pour plus grand bonheur le 4 (qui sortait 4 jours plus tard) car oui à l’époque j’ai lu les 4 premiers volumes en 5j… Alors foncez !