L’un des auteurs français phare de cette année 2009 revient en ce moment avec la réédition d’un recueil de nouvelles intitulé Dreamworld dans lequel il nous invite à parcourir l’univers de ses rêves à travers neuf nouvelles toutes plus surprenantes les unes que les autres. Publié originellement chez Nuit d’Avril ce recueil compile l’essentiel de l’esprit de Sire Cédric en quelques (pas assez ?) de pages. Entrons donc maintenant dans ce monde de rêves et d’imagination…
Commençons par la couverture. Personnellement je la trouve un peu faible par rapport au contenu du livre. J’aurais vu quelque chose de plus onirique, de plus fouillé. Mais le principe du visage qui crie n’est pas en soi un mauvais choix tant il représente à merveille certains aspects du recueil où l’enfermement dans le rêve s’avère un fardeau.
Mais passons maintenant à l’essentiel, ce qui nous intéresse tous vraiment : les quelques 280 pages de nouvelles.
La première d’entre elle nous invite à poursuivre les fées et autres créatures magiques à travers le regard d’un enfant. Mais pas n’importe lequel. Vers la fin de la nouvelle le lecteur se voit totalement surpris par une conclusion assez inattendue même si certains indices sont semés par endroits.
Le second texte de cet ensemble est assez impressionnant. Surtout en terme de taille puisqu’il pourrait presque tenir le rôle de novella à part entière. Les inspirations choisies laissent à penser que l’Enfant des Cimetières, le roman qui a suivi, était déjà en gestation tant il était possible de retrouver des éléments concordants. Sous le titre Cauchemars se sont bel et bien nos pires mauvais rêves qui se voient matérialisés sur le papier. A ne pas lire juste avant de dormir…
Requiem est un texte d’une beauté toute surnaturelle. C’est l’une des deux nouvelles qui m’a le plus touché dans ce recueil. L’histoire de l’ange noir qui aime la sœur de son amour précédent (et parti) est d’un romantisme tout particulier qui parvient sans peine à toucher mon âme de garçon élevés au sein de Conan et autres Ken le Survivant. Une telle poésie se dégage des lignes que le lecteur ne peu qu’entendre s’il la connaît la Sonate de Beethoven qui a inspiré Sire Cédric. 23 pages qui resteront pour moi d’anthologie…
La seconde nouvelle qui m’a le plus touché est Muse. Cette histoire d’écrivain bercé par le sang et l’amour de sa muse est d’une obscurité particulièrement alléchante et dans laquelle il est tentant de sombrer. Mélancolie et amour sont au rendez-vous. Comme à leur habitude les personnages de Sire Cédric sont torturés et leur esprit invite au voyage. Un moment exceptionnel…
Babylone et la mélancolie de son récit de la belle cité dans le ciel est extrêmement poétique et devrait ravir tous les lecteurs. Une femme malade qui fait fuir son amour pour ensuite parvenir à atteindre la belle Babylone cachée dans l’arc-en-ciel. Cela donne une nouvelle fascinante au charme qui perdure longtemps.
Elfenblut est une nouvelle un peu plus particulière. C’est celle qui m’a le moins inspiré de tout le recueil même si elle possède tous les critères de qualité de l’écriture de Sire Cédric. L’histoire d’une Elfe qui trahit son peuple avant de revenir vers eux m’a simplement moins séduite.
La nouvelle suivante, Conscience, est une réflexion sur une forme particulière de sommeil. Je ne vous en dirais pas plus pour ne pas déflorer l’intrigue mais attendez-vous à être réellement étonnés en finissant ce texte. On ne s’attend en rien à la conclusion et l’auteur l’amène avec un talent qui prend le lecteur à contrepied de ce à quoi il s’attendait
L’histoire des enfants jumeaux dans Visionnaires tient presque plus du film d’horreur onirique et finalement la poésie des textes précédents passe un peu trop au second plan. J’ai ressenti une véritable déception en lisant cette nouvelle car j’étais réellement bercé par les autres textes et celui-ci m’a paru un peu plus terre-à-terre. Un peu trop peut-être ?
Sangdragon, qui conclue le recueil est une nouvelle un peu dans le style de l’enquête ésotérique. En soi on se demande ce que Sire Cédric vient faire dans ce genre mais la conclusion draconienne. Après un début un peu surprenant l’auteur revient à son art plus classique en emmenant réellement le lecteur loin de ces terres tristes qui sont les nôtres. Une superbe conclusion au recueil.
Dreamworld est donc, et de loin, l’un des meilleurs recueils de nouvelles qu’il m’ait été donné de lire. Poésie, romantisme, torture psychologique, frayeur, sont autant d’éléments que Sire Cédric maîtrise de la pointe acérée de sa plume. J’ai rarement lu de textes aussi enjôleurs et distillant leurs beautés si différentes sur le papier. Je vais me permettre de le dire car cela est vrai : j’ai pris une grande claque en plein visage (pour rester poli) en lisant ce livre. Lorsque la dernière page fut poussée je suis resté quelques minutes les yeux dans le vide à savourer les effluves parfumées et savoureuses des textes de ce grand auteur. Un bijou dont l’écrin pose quelque problème mais qu’il faut absolument découvrir et faire découvrir.
Dreamworld
Sire Cédric
Le Pré aux Clercs
16 €