Un roman impressionnant de bout en bout : sensible, émouvant, brut. Tout ce que j’aime…
Réécriture sombre et fantastique du Petit Chaperon rouge
Accroché au versant du mont Gris et cerné par Bois Sombre se trouve Malombre, hameau battu par les vents et la complainte des loups. C’est là que survit Rouge, rejetée à cause d’une particularité physique. Rares sont ceux qui, comme le père François, éprouvent de la compassion à son égard. Car on raconte qu’il ne faut en aucun cas toucher la jeune fille sous peine de finir comme elle : marqué par le Mal. Lorsque survient son premier sang, les villageois sont soulagés de la voir partir, conformément au pacte maudit qui pèse sur eux. Comme tant d’autres jeunes filles de Malombre avant elle, celle que tous surnomment la Cramoisie doit s’engager dans les bois afin d’y rejoindre l’inquiétante Grand-Mère. Est-ce son salut ou bien un sort pire que la mort qui attend Rouge ? Nul ne s’en préoccupe et nul ne le sait, car aucune bannie n’est jamais revenue…
La revisite d’un conte…
Rouge propose, comme l’indique son histoire, une revisite du conte du Petit Chaperon Rouge, que l’on a eu l’occasion tous de découvrir au cours de notre enfance. Sauf que cette fois nous sommes face à la version adulte du récit. Et Pascaline Nolot ne fait pas dans la dentelle puisque l’on est face à un roman sans compromis. Et c’est agréable justement d’être face à un roman qui est brut, qui donne à voir une réalité non enjolivée, tout en reprenant les personnages du conte, bien qu’en leur offrant souvent un rôle légèrement différent.
… mais loin de n’être que cela !
Toutefois ce roman n’est pas qu’une version modifiée du Petit Chaperon rouge. On y retrouve les problématiques médiévales de la religion, de la place de la femme, de la différence, le tout dans un monde médiéval proche, si ce n’est identique, à celui qui fut le nôtre. Et justement cette identité fortement féministe du roman, cette manière qu’a Rouge d’avancer dans son récit, les différents protagonistes et leur rôle… Tout est mis en place pour que l’on s’immerge dans ce récit, que l’on comprenne le propos fort de l’autrice venant derrière. Et le twist final m’a pratiquement fait applaudir, disons-le clairement.
Rouge comme héroïne
La place de Rouge comme narratrice, comme héroïne de cette histoire est très intéressante car elle est le fruit de son passé mais va choisir de déterminer seule son avenir. Et c’est finalement la manière dont elle va s’auto-déterminer qui va faire avancer l’histoire qui va finir de lui donner tout son sens. On tombe parfois dans des romans féministes qui peuvent sembler rébarbatifs sur le thème, mais celui-ci est tout bonnement magnifique du début à la fin. Et on sent à chaque seconde qui est Rouge, ce qu’elle est, et on est pris aux tripes.
Rouge est un des meilleurs romans français que j’ai lu ces derniers temps. Il parvient à conjuguer, grâce au talent de son autrice, les aspects religieux et sociaux d’un univers médiéval, tout en conservant les personnages du conte. Et cela fonctionne impeccablement. Et ce twist final que je n’avais pas vu venir !!! Bref, Pocket a encore fait de l’excellent travail en sortant en poche ce roman, que je vous invite à dévorer dès que possible.