Un très beau roman, aussi étrange que poétique.
Un pirate s’échoue sur les rivages de Carcosa, la Cité d’Ailleurs.Persuadé d’être mort, il est amené par Maar, un aveugle qui semble tout savoir de lui, au Roi en jaune. Ce dernier, hanté par le souvenir de ses amours, lui propose de revenir à la vie s’il parvient à le débarrasser de sa malédiction.
Commence alors la quête du pirate à la recherche de son propre trésor perdu, Ananova, la femme qu’il a tant chérie et pleurée.
J’ai adoré la lecture de ce très beau roman, à la frontière entre le fantastique et l’introspectif. La plume de l’auteur est remarquable. Elle joue avec les phrases et les sonorités, file les métaphores. Elle cisèle les mots à l’image des paysages décharnés du récit. Elle déconstruit et réinvente un vocabulaire nouveau, qui s’insère parfaitement dans l’histoire. C’est ce style impeccable qui permet au roman de se démarquer.
Au-delà des belles phrases, le roman nous immerge dans cet Ailleurs étrange, dont on ne sait vraiment s’il appartient au monde, à l’au-delà ou à nous-mêmes. Les personnages énigmatiques qui le peuplent réagissent comme des pantins de l’esprit, des versions douloureuses et sombres d’un même protagoniste qui se refuse à la réalité cruelle.
De ce protagoniste d’ailleurs nous ne saurons rien ou presque, si ce n’est qu’il a été pirate et qu’un chagrin d’amour l’a échoué sur cette plage inconnue. Les détails sont si insignifiants, l’histoire si banale que ce héros pourrait être n’importe qui, et plus encore celui qui le lit. Cette histoire pourrait tout aussi bien être la nôtre, et nous suivons entre les pages ce cheminement intérieur vers la guérison.
Le livre jaune est donc un très beau roman fantastique.