Dr Jekyll et Sister Hyde – Roy Ward Baker

LES +:

  • Un scénario audacieux et avant-garde
  • Une noirceur et un érotisme plus appuyés
  • Un personnage féminin fort

 

LES – :

  • L’absence des stars habituelles de la Hammer (mais le duo Bates/Beswick assure)

Nous sommes à Londres, en pleine époque victorienne. Le jeune Dr Jekyll (Ralph Bates) concentre tous ses efforts pour découvrir l’élixir d’immortalité. Afin de mettre au point son sérum, il lui faut prélever des hormones féminines sur des cadavres. Mais alors que Jekyll pense toucher au but, il va découvrir, à sa grande surprise, que son élixir provoque toute autre chose que l’immortalité…

Réalisé en 1971 par le très compétent Roy Ward Baker (Asylum, Le Club des Monstres) et écrit par Brian Clemens (le créateur de la série Chapeau Melon et Bottes de Cuir, et réalisateur, toujours pour la Hammer, du très injustement sous-estimé Captain Kronos : tueur de vampires) le film est un savant mixage entre Dr Jekyll et Mister Hyde et Jack L’éventreur. Car oui, ce cher Docteur Jekyll a décidé de consacrer ses recherches à la découverte d’un élixir de jouvence, et pour cela, forcément, il va avoir besoin de cadavres de femmes bien frais. C’est encore les professionnelles du sexe écumant les ruelles sombres de Whitechapel qui vont trinquer, tandis que les bobbies déchirent l’air nocturne et brumeux du célèbre quartier malfamé avec leurs sifflets. Arrive le moment pour Jekyll de tester son élixir et le résultat est…surprenant, puisqu’il se transforme en femme et devient Mme Hyde !

Dr Jekyll and Sister Hyde est arrivé à un moment où la Hammer tentait de faire évoluer la formule qui lui avait assuré le succès jusqu’alors. L’idée consistait notamment à en rajouter une couche niveau érotisme. De ce fait, le choix de caster Martine Beswick pour le rôle de Sister Hyde est on ne peut plus justifié. Cette ex-James Bond girl fournira au film son lot de scènes sexy. Mais l’actrice est également très convaincante pour interpréter une femme libre, forte et prédatrice. Son personnage détonne par rapport aux habituels rôles féminins de la Hammer, où les jeunes filles sont en général fragiles, vertueuses et sans défense. Sister Hyde n’est pas une victime, loin de là. On peut même dire qu’elle domine aisément Jekyll, parfaitement interprété par Ralph Bates, qu’on aura pu voir un an auparavant dans Horrors of Frankenstein, de Jimmy Sangster. Pas facile d’hériter de la tête d’affiche pour un film Hammer ! D’habitude les premiers rôles étaient réservés aux géants de l’horreur : Christopher Lee et Peter Cushing. Ralph Bates, bien que n’ayant pas le même charisme et la même notoriété, s’en sort très bien.

Soulignons également le côté très avant-gardiste du film puisqu’il aborde le thème du changement de sexe et de la bisexualité. Très moderne donc ! Sans parler que Dr Jekyll and Sister Hyde est aussi une production Hammer qui se démarque par son ironie plus mordante, par sa noirceur plus assumée (pour pas dire « glauquitude » quand on pense, par exemple, au gars de la morgue chez qui Jekyll s’approvisionne, un individu clairement nécrophile) et par sa violence graphique plus poussée. On sent l’influence de Psychose et du slasher naissant dans ces attaques aux couteaux. L’horreur made in Hammer, d’habitude si délicieusement insinuée, mais non montrée, évolue ici vers quelque chose de plus sombre, même si on est loin de ce qui se fait en Amérique à la même époque.

En ce temps-là, les effets spéciaux n’étaient pas aussi sophistiqués et importants que maintenant. Pour montrer les transformations de Jekyll en Sister Hyde, Roy Ward Baker utilise des mouvements de caméra fluides et des jeux de miroir pour illustrer la lutte de ces deux personnages qui se disputent un seul et même corps. C’est tout simple, mais ça fonctionne parfaitement. Comme quoi.

CONCLUSION

On peut dire que ce film, bien que ne faisant pas partie des productions Hammer les plus connues, n’en est pas moins très intéressant, car c’est une œuvre assurément atypique et audacieuse que le spectateur n’oublie pas de sitôt.

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