Encore vous ?
Décidément, vous cherchez les ennuis.
À bord du Locust, énorme vaisseau filant à travers le champ carnivore, Jon et ses compagnons sont engagés dans une course poursuite contre Vilo, le savant en bocaux. Sur leur route, les obstacles s’accumulent et risquent de changer à jamais la face d’Alamänder. En première ligne, les sinistres Xéols choisissent après toutes ces années de révéler leur vraie nature. Yamataëh, rival titanesque d’Anquidiath, décide lui aussi d’entrer dans la danse. Enfin, les Mehnzotains spéculent sur la fragilité du royaume et lancent leur puissance thaumaturgique à l’assaut de la capitale.
Le roi Ernst, dans son infinie bonté, a rendu à Jon sa nationalité : il est de nouveau Mehnzotain… et otage des Kung-Bohréens. Grâce à cela, le monarque compte bien l’obliger à poursuivre Vilo, le savant échappé de la capitale malgré son conditionnement peu conventionnel. Mais si Jon accepte, ce n’est pas uniquement par la contrainte : la fuite de Vilo risque de provoquer la chute d’Alamänder. Le voici donc, accompagné de ses plus fidèles amis et de son indéboulonnable démon Retzel, parti vers les champs de céréales dévastateurs avec l’espoir de rattraper le savant fou.
Ce tome s’ouvre sur des révélations qui permettent de mieux comprendre les événements passés, mais sans pour autant écarter la tension due aux multiples dangers qui pèsent encore sur le royaume de Kung-Bohr. En effet, la capitale subit les assauts combinés des Mehnzotains et des Xéols, au plus mauvais moment, bien entendu. Du coup, grâce à cette situation pour le moins complexe, l’auteur réussit à livrer ses explications sans noyer le lecteur dans l’ennui. Les catastrophes s’enchaînent ainsi à un rythme effréné, au point que l’on se demande comment une telle avalanche peut se terminer de manière positive. Et ce qui doit arriver, en toute logique, finit effectivement par se produire ; le tout, comme d’habitude, sur un ton enjoué qui permet de sourire de presque chaque situation. C’est assez jouissif, il faut bien l’avouer, de pouvoir conserver cette bonne humeur même en lisant une scène ou des centaines de personnes meurent. Le lecteur s’en voudrait presque, à la longue, de pouffer des malheurs qui s’abattent ainsi sur les habitants démunis de la capitale. À la fin, on en redemande et la fermeture du livre s’avère frustrante, avec une fin qui donne juste envie de regarder sous son lit pour voir si, comble du hasard, le tome 4 ne s’y trouverait pas à nous attendre gentiment.
L’univers de l’auteur s’enrichit ici grâce à la découverte des étranges Xéols et du peuple de Jon, les Mehnzotains, que l’on apprend à mieux connaître par l’intermédiaire de leur armée venue envahir la capitale. Cela donne une nouvelle dimension au monde, permet de mieux appréhender les forces en présence et, au final, de découvrir une partie d’échecs hors du commun où chacun veut placer ses pions de la meilleure manière qui soit. Elle annonce aussi l’arrivée d’un nouveau participant, les YArkanies, que l’on découvrira dans le tome 4, sans jamais briser l’harmonie du cycle. Il ne faut pas non plus oublier le champ de blé carnivore, où nos héros vont passer la moitié de leur aventure à se battre pour survivre. Un ensemble très bien construit, donc, avec juste la bonne dose de peuples et de créatures pour attiser la curiosité du lecteur sans le noyer sous une tonne d’informations inutiles.
Du côté des personnages, Jon est toujours l’axe central autour duquel gravitent ses compagnons Edrick et Rachelle, avec, il faut bien le noter, le retour de la calamité Retzel, démon qui passe la majeure partie de son temps à vouloir boulotter tout ce qui passe à sa portée (et il a de l’imagination, le bougre). Ces trois-là prennent une épaisseur supplémentaire par rapport aux tomes précédents grâce aux malheurs qu’ils ont subi et, bien sûr, aux révélations qui vont certainement changer leurs vies pour de bon. Des personnages secondaires sont de la partie et possèdent eux aussi un background suffisamment étoffé pour que l’on ait pas l’impression qu’ils sont là juste pour faire joli. C’est très appréciable et rend la lecteur d’autant plus savoureuse.
Le style de l’auteur, toujours aussi efficace, fluide et drôle, constitue encore un point fort de ce cycle. Comme dit plus haut, cela donne une forte envie de passer à la suite et la lecture passe si vite que l’on est presque frustré de devoir s’arrêter (encore que, dans ce tome, le lecteur est préparé de façon très spéciale à l’arrivée du mot « fin »). Si la magie est moins présente que dans les tomes précédents, j’ai trouvé que l’humour l’était davantage, rendant l’ensemble plus léger alors que la situation, elle, est très critique. Un vrai plaisir, agrémenté de quelques clins d’œil au Trône de Fer et à Doctor Who, entre autre.
Bref, vous l’aurez compris, j’ai adoré ce tome et j’attends avec impatience de pouvoir découvrir la suite en me demandant comment diable Jon va se tirer de cette histoire et, surtout, quelle bêtise Retzel va encore pouvoir inventer (en espérant qu’il jette un gros pavé dans la mare). De la Fantasy comme celle-là, il faudrait presque l’autoriser en prescription médicale, c’est idéal pour lutter contre la morosité ambiante !
Le Xéol, le cycle d’Alamänder tome 3
Éditions de l’Homme Sans Nom
347 pages
19,90 euros