Dites adieu aux orques, aux elfes, aux dragons !
Aujourd’hui, vous partez pour Alamänder. Allez donc saluer Anquidiath, le demi-dieu enfoui sous la montagne, chatouiller les monstrueux poulpes de guerre, flâner parmi les épis du champ de blé carnivore ! Aurez-vous le cran de suivre Maek, jeune homme en quête d’une mythique école d’exécuteurs ? Serez-vous digne de devenir le disciple de Jonas, détective spécialisé dans les affaires criminelles magiques ? Si c’est le cas, préparez-vous à découvrir un monde où se côtoient humour, intrigues policières et créatures improbables.
Un monde original et farfelu d’où vous ne reviendrez peut-être pas indemne. On vous aura prévenu.
Sous la magnifique couverture signée Alexandre Dainche se cache un ouvrage de Fantasy comme on aimerait en voir plus souvent. Alexis Flamand signe ici un roman drôle et percutant, doté d’un univers très riche (parfois trop?), et servi par une histoire bien menée avec deux personnages principaux qu’apparemment tout oppose. Sauf qu’on leur devine un destin commun.
D’un côté, nous avons Jonas, mage-détective flanqué d’un insupportable démon en guise de serviteur et, de l’autre, Maek, jeune garçon élevé dans une famille de paysans. L’un va devoir abandonner sa maison, exproprié par les nouveaux propriétaires de son terrain ; tandis que l’autre veut à tout prix rejoindre la mythique école T’Sank afin de devenir un assassin. Jonas part donc pour le royaume de Kung-Bohr, bien décidé à plaider sa cause auprès du roi Ernst XXX, et Maek va, de son côté, affronter les champs de blé carnivores pour trouver sa fameuse école. Deux voyages, deux destinées peu communes qui vont ponctuer toute la première moitié du roman avant que chacun ne se trouve confronté à un nouveau problème. La seconde moitié du roman se concentre sur Jonas, plongé malgré lui dans une enquête complexe au service de ses ennemis et qui va le conduire à la découverte d’un complot dont il peine à définir l’ampleur. La fin n’apporte qu’une réponse partielle et donne envie d’entamer illico le second tome.
L’univers créé par Alexis est foisonnant, original, et certaines descriptions pourront paraître fastidieuses aux lecteurs qui n’apprécient pas un monde aussi complexe. L’humour, bien présent tout au long du récit (surtout dans les passages concernant Jonas), n’est pas sans rappeler les œuvres de Terry Pratchett. Par l’intermédiaire du royaume de Kung-Bohr, pays procédurier par excellence, l’auteur a mis en place un vivier de situations ubuesques ou ridicules qui, pourtant, s’enchaînent dans une logique parfaite. Tout est bien construit, bien maîtrisé, si bien que le lecteur n’a pas l’impression de lire un assemblage hétéroclite sans queue ni tête (ce qui peut arriver avec les ouvrages où l’humour occupe une place importante). Certains passages concernant Maek sont parfois un peu longs dans sa découverte du monde et j’avoue avoir eu du mal à restée concentrée dessus. J’ai nettement préféré ceux dédiés à Jonas, où l’humour alterne avec le sérieux de son enquête ; sans compter les interventions de son démon, toujours prêt à mettre son grain de sel là où il ne faut pas.
Les personnages, justement, constituent un autre point fort du roman. Le lecteur appréciera qu’ils ne soient pas trop nombreux (comme dans beaucoup de romans de Fantasy), ce qui permet de plus facilement s’attacher à eux. Entre Jonas, le mage un peu naïf flanqué d’un démon serviteur qui le dessert plus qu’autre chose et Maek, jeune garçon volontaire et implacable, le lecteur aura le choix du caractère qu’il préfère. Au fil des pages, on découvre la vie et les petites habitudes bien rangées de Jonas alors qu’à l’opposé, Maek demeure un mystère total. Seul le fait qu’il n’est pas un simple fils de paysan vient titiller le lecteur, le poussant à se poser une multitude de questions à son propos. Du coup, on ne peut qu’attendre avec impatience la rencontre de ces deux protagonistes (sans compter le démon qui risque d’énerver Maek), afin de voir comment ils vont s’entendre et, surtout, quel est leur destin commun.
Le style d’Alexis est riche, bien travaillé, tout en étant percutant et dynamique lorsque les situations l’exigent. Les dialogues sont savoureux et bien dosés, ce qui implique encore plus le lecteur dans l’histoire et le rapproche davantage des personnages, surtout, encore une fois, dans les passages concernant Jonas.
Le T’Sank donne envie de plonger plus profondément dans le cycle d’Alamänder et, le livre refermé, on ne peut qu’attendre avec impatience de découvrir la suite, de connaître le fin mot de l’enquête de Jonas. Un excellent premier tome qui n’augure que du bon pour les suivants.
Le cycle d’Alamänder, Le T’Sank
Alexis Flamand
Éditions de l’Homme Sans Nom
365 pages
19,90 euros