Un autre thème imposé par les grandes années du film d’horreur british (1930’s) devenu un incontournable, La Momie ! Grâce aux nouvelles technologies, à la maîtrise de celles-ci par des artistes de génie, Industrial Light & Magic en tête, ce mort-vivant très actif, un rien magicien et plutôt puissant revenu de l’antiquité égyptienne, fait encore frémir les spectateurs. D’autant plus que, à l’instar de son homologue aux dents longues (Dracula), c’est un amour perdu qui le pousse à affronter le monde des vivants !
1290, Thèbes, cité des vivants. Le grand prêtre et premier conseiller de Séti 1er, Imothep, règne sans partage ou presque. Mais sa liaison avec la favorite de Pharaon, la belle Ankhsunamon, est révélée. Condamnée à regarder mourir son amour, Ankhsunamon choisit de tuer le Pharaon avant de se donner la mort, elle sait qu’Imothep connaît le moyen de la ramener à la vie. Ce que le grand prêtre tente de faire avant d’être arrêté par la garde royale. Enterré vivant, Imothep est condamné à subir la malédiction du Om-daï, mort-vivant pour l’éternité, errant entre les deux mondes. A moins qu’on ne l’en éveille…
1926, dans un Caire transformé par la colonisation anglaise, la jeune Evelyn tente de suivre les traces de son père disparu, un grand égyptologue. Hélas, sans argent et née femme, elle doit se contenter de travailler comme bibliothécaire pour le musée local. Son frère ainé Jonathan ne l’aide pas beaucoup, farfelu, irresponsable, joueur… Il perd trop souvent l’argent de sa sœur. Jusqu’à ce qu’il lui rapporte un étrange objet, une boîte métallique contenant une carte ancienne menant à Hamunaptra, la mythique Cité des Morts dont personne n’est jamais revenu. Devant l’enthousiasme d’Evelyn, Jonathan avoue avoir volé l’objet et sa carte à un homme emprisonné, Rick O’Connell. Cet homme est un mercenaire US rescapé de raid militaire anglais contre les natifs du désert. Il a mené son dernier combat au cœur même d’Hamunaptra et peut les y conduire à condition d’être libéré de prison. Aussitôt dit… Mais si l’expédition se transforme vite en course au trésor avec de nombreux concurrents, le résultat est inattendu : une momie étrange, un livre tout de métal que l’on ouvre avec la fameuse boîte d’Evelyn, des mots récités dans la nuit… La Momie s’éveille et accomplit la malédiction du Om-daï, plongeant l’Egypte dans le chaos. Mais elle semble poursuivre un second but, rendre la vie à une certaine Ankhsumamon !
Le retour du concept fascinant et à succès garanti, j’ai nommé l’Indiana Jones, s’affiche clairement. Non seulement on se retrouve dans les années d’entre-deux guerres, bien évidemment celles qui collent le mieux au scénario puisque grande époque de l’égyptologie à l’anglaise, (véritable engouement qui causa d’ailleurs des dégâts irréversibles au patrimoine égyptien mais passons…) mais tout est là : l’exotisme décoratif, mystique, de l’Egypte d’alors et surtout d’autrefois. Les légendes et autres mythologies se nourrissent de l’Histoire des civilisations disparues, plus encore lorsqu’elles recèlent un tel potentiel aux yeux des Occidentaux.
Dans cette atmosphère promesse de rêves, des personnages attendus tels que la momie, sa promise, celle en laquelle le mort-vivant reconnaîtra une réincarnation possible de sa belle et le sauveur. Mais l’ensemble est bien dépoussiéré. Le sauveur, Brendan Fraser, est donc un aventurier avant d’être un légionnaire ou un soldat, armes au poing (en digne américain bossant pour les anglais qui paient bien quelle que soit la mission), énergique, viril un rien matcho mais séducteur, bref le héros qu’il faut à une telle histoire. La jeune fille en détresse, Rachel Weisz, a beau être naïve sur les bords, elle se débrouille bien face à une horde de gars qui jouent des muscles et du flingue, elle sait ce qu’elle veut et compte sur ses qualités latentes et inexploitées d’égyptologue pour s’en sortir, même si c’est aussi la source de la plus belle gaffe du film, réveiller la bête !
Les personnages secondaires sont ressource d’humour, d’action et fil conducteur des motivations premières de la momie. En première ligne, les prestations remarquées de John Hannah en Jonathan maladroit au possible, pique assiette tricheur mais attachant ; Oded Fehr en Ardeth Bay, soldat protecteur d’Hamunaptra, l’allié parfait pour O’Connell et Kevin J. O’Connor en Beni Gabor le traître avide, perfide mais pas doué du tout.
Et cette momie et bien, c’est une très belle réussite. D’abord parce qu’Arnold Vosloo joue parfaitement l’homme tout puissant déchu de tout, torturé pour avoir aimé, vengeur convaincu de la légitimité de sa quête pour rendre vie à Ankhsunamon et tant pis pour les morts qu’il sème en chemin ! Ensuite, les effets spéciaux made in ILM pour créer plastiquement cette momie sur le corps de l’acteur sont époustouflants. Tous les stades de la créature sont mis en image et en scène, de momie suintante à un Imothep reconstitué en apparence mais toujours mort vivant en passant par un corps de chairs pendantes d’où sortent les scarabées dévoreurs de chair qui lui ont tenu compagnie durant des siècles, sans omettre les insectes grouillants qu’il commande pour attaquer ses proies. Capteurs de mouvements pour animation par ordinateur, annonçant la motion capture employée et perfectionnée par Peter Jackson, maquillage avec prothèses physiques et animatroniques… Rien n’a été laissé au hasard et cela se voit !
La magie devenue sienne de par son statut de prêtre maudit au Om-daï lui permet de lancer sur l’Egypte, et surtout le Caire où se retranchent ses ennemis, les sept plaies de l’Ancien Testament, déferlante de flammes tombant d’un ciel d’orage, eau et alcool devenus sang, peste ravageant les hommes, nuit insistante, mur de sable tourbillonnant et poursuivant ses proies tout comme une horde de scarabées affamés ou un armée de momies au service du maître…
Même avant ce défilé d’effets visuels spectaculaires, on profite pleinement de l’atmosphère des tombeaux anciens, pleins de mystères grâce à des décors superbes, notamment celui de Thèbes en 1290, d’Hamunaptra ou du port de Gizeh, à des bruitages efficaces, une photographie pointilleuse et chaude révélant lentement le labyrinthe souterrain de la Cité des Morts… Un vrai florilège qui construit minute après minute l’ambiance idéale.
La Momie de Stephen Sommers a révolutionné l’histoire que l’on pensait connaître, par cette alliance de personnages bien définis, d’action, de suspense, d’humour avec une touche de romance, de paysages et de décors plantant toute l’atmosphère nécessaire et d’effets visuels alors inédits orchestrés par les petits génies d’ILM.
La Momie
Réalisateur : Stephen Sommers
Production : Universal Pictures, Alphaville Films
Scénariste : Stephen Sommers, Lloyd Fonvielle, Kevin Jarre
Musique : Jerry Goldsmith
Photographie : Adrian Biddle
Décors : Allan Cameron
Avec : Brendan Fraser, Rachel Weisz, John Hannah, Arnold Vosloo, Oded Fehr, Kevin J. O’Connor…
Sortie France : 2 juillet 1999