Je suis très heureuse d’avoir découvert l’éditeur Mille Saisons en commençant par La Langue du silence. Samantha Bailly prouve qu’elle maîtrise sa plume dès les premières pages non seulement parce que son style est fluide mais aussi parce qu’elle parvient à donner à son œuvre quelques touches d’humour. Il est néanmoins un peu dommage d’avoir opté pour la dualité classique, à mon avis, de la nature d’un côté et de la technologie de l’autre. Sans compter que la couverture – très belle selon moi – n’illustre que la nature qui n’est qu’une partie du récit. Dommage car le lecteur est un peu déstabilisé en commençant sa lecture puisque l’action ne se déroule pas encore dans les bois en compagnie d’un lynx. Il faudra être patient !
Mais le roman est si bien rythmé qu’on ne voit pas le temps passer. L’auteure a trouvé une belle astuce en utilisant des citations à chaque début de chapitre car on entre encore plus facilement dans l’histoire quand elle est étayée de citations de poètes, scientifiques et de personnages du roman. Et l’astuce ne s’arrête pas là ! Entre chaque chapitre un interlude ralentit l’action et en donne un autre point de vue. Le lecteur n’en est que plus intrigué et impatient de découvrir la suite des événements.
Et qu’en est-il de l’histoire ? Un soir qu’elle s’enfuyait de la pension Sybilène si stricte, Mylianne Manérian, âgée de treize ans, est retrouvée morte assassinée par un membre d’un clan. Quoi de plus courant dans ce monde déchiré entre Heldérionnois, Thyraniens et Rouge-Terriens ? Mais le crime est loin de passer inaperçu : une enquête est immédiatement lancée par Orius, chef-veilleur luttant viscéralement contre ces clans sans foi ni loi.
La sœur de la victime elle aussi pensionnaire à Sybilène, Aileen, cherche à venger sa mort par tous les moyens, tandis que son autre sœur, Noony, une oraisonnière très talentueuse, découvre une facette insoupçonnée du monde dans lequel elles ont grandi. Pour les deux sœurs commence alors un parcours initiatique qui leur ouvrira les yeux sur la vraie nature de leur monde. Leurs chemins sont parallèles mais toutes deux vont découvrir peu-à-peu le pot-aux-roses. Toutes les certitudes des jeunes filles tombent une à une et elles doivent faire face à la dure réalité. Au fil de leur parcours elles lient des amitiés, si ce n’est plus que cela, avec des individus jugés infréquentables car hérétiques ou malfaiteurs.
Petit-à-petit, le meurtre qui semblait être un acte de résistance se révèle bien plus complexe que cela. L’Astracisme, la seule vraie religion, a peut-être quelque chose à voir là-dedans sans parler des divers complots politiques. Car c’est bien là le cœur du livre : jusqu’où peut aller un homme renforcé par la position de sa religion pour conserver sa place dans un système établi ?
Samantha Bailly parvient à maintenir le suspense et le doute dans l’esprit du lecteur jusqu’à la fin du livre en jouant sur notre faiblesse à croire que les être les plus proches de nous ne peuvent nous nuire.
Excès de confiance garanti et plaisir de lecture assuré !
La Langue du silence
Au-delà de l’oraison T1
Samantha Bailly
Mille Saisons
23 €