Le garçon et la ville qui ne souriait plus – David BRY

Le garçon et la ville qui ne souriait plus est un très bon roman uchronique d’anticipation.

Paris, fin XIXe, l’Église a imposé ses Lois, celles de la Norme sous le règne de Nicéphore le IIIe. Les fous, les obèses, les boiteux, les difformes, les homosexuels – en somme, tous ceux considérés comme ” anormaux ” – sont relégués sur une île, surnommée la Cour des Miracles. Romain, un garçon de bonne famille, fils du préfet de police, aime à s’y rendre en cachette la nuit. Il n’y a que là qu’il se sente lui-même, au vu du secret qu’il porte. Jusqu’au jour où il surprend une conversation et comprend que la Cour des Miracles est menacée de destruction et que ses habitants en seront au mieux chassés. Commencent alors une course contre la montre et l’obligation de s’accepter… enfin.

Narré avec un style clair et incisif, Le garçon et la ville qui ne souriait plus nous raconte l’histoire de ce qu’aurait pu devenir Paris.

Comment c’est souvent le cas avec les romans d’anticipation, la frontière entre l’imaginaire de l’auteur et la réalité de notre société est plus mince que ce que nous aimerions croire. Si nos lois sont en effet plus tolérantes que celles décrites dans ce récit, notre rapport à la différence reste cependant discutable, et il est très bien questionné ici : orientation sexuelle, maladie, couleur de peau… Jusqu’où peut-on aller par peur de l’altérité ?

Dans ce livre, la réponse est beaucoup plus tranchée qu’au sein de notre société, puisque ces “anormaux” sont tout bonnement bannis sur l’île de la cité. Le postulat semble crédible : ce rejet n’est en définitive qu’une métaphore de ce que vivent à l’heure actuelle ceux qui ont le malheur d’être trop peu semblables aux autres. Il m’a cependant manqué quelques arguments justifiant cette radicalité : on ne comprend pas bien, en définitive, ce qui a pu engendrer une telle rigidité dans le refus de la différence ; il y aurait pourtant eu, je trouve, de beaux débats à décrire, mais le sujet n’est pas vraiment creusé.

Le message porté par ce roman reste cependant fort, et il est ici très bien défendu.

Les personnages sont touchants, chacun à sa manière.

Ils évoluent dans un décors qui revisite les rues de Paris : j’ai pris plaisir à m’y promener. Et si, de prime abord, les belles maisons de la ville semblent plus accueillantes que les taudis où s’entassent les anormaux parqués sur l’île de la cité, notre perspective change petit à petit : plus on avance dans le roman, plus les nuits flamboyantes, les habitants chamarrés de la Cour des Miracles nous paraissent attirants. Les somptueuses et riches demeures de l’autre côté du fleuve perdent petit à petit de leur attrait et se ternissent.

Au demeurant, la Cour des miracles ne s’embarrasse pas des inégalités : hommes ou femmes, adultes ou enfants, atypiques et rebuts de la société ont tous voie au chapitre dans ce microcosme idéal, bien loin des mentalités véhiculées par cette soi-disant norme bien pensante qui gouverne la ville.

Le garçon et la ville qui ne souriait plus est donc un très bon roman d’anticipation, qui transporte un message fort avec de jolies métaphores.

Titre : Le garçon et la ville qui ne souriait plus
Série :
N° du tome :
Auteur(s) : David Bry
Illustrateur(s) : Benjamin Carré
Traducteur(s) :
Format : Poche
Editeur : Pocket
Collection : Imaginaire
Année de parution : 2020
Nombre de pages : 341
Type d'ouvrage : Roman

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