Le désert des couleurs – Aurélie Wellenstein

Un intriguant voyage dans un désert à l’odeur de mort et pourtant bien vivant.

Dans le désert des couleurs, chaque grain de sable est un souvenir perdu et oublié. Marcher dans les dunes, c’est voir sa mémoire s’effacer. Alors pour se protéger, l’humanité s’est réfugiée dans le cratère d’un volcan. Mais depuis quelque temps, le sable monte chaque jour le long de ses pentes, prêt à l’ensevelir.

Malgré les risques, Kabalraï, fils du marchand de sable, et Irae, sa demi-sœur, s’aventurent dans les dunes multicolores pour trouver un nouvel endroit où s’installer. Mais le désert est dangereux et une fois qu’on s’y engage, il est difficile de ne pas s’y perdre…

Quel étrange univers proposé par Aurélie Wellenstein ! Nous ne comprenons pas immédiatement que nous sommes dans le futur alors que le monde s’est presque éteint. Au sein du cratère d’un volcan endormi, une petite communauté survit comme elle peut. Régulièrement, un enfant du désert naît et sert de guide à l’un des derniers survivants dans le but de trouver Alnaïr, la cité paradis, dans laquelle le petit bout d’humains restants pourrait revivre. Mais chaque expédition échoue et le sable envahit peu à peu le cratère.

Comme dans Mers Mortes, l’auteure nous met en garde sur la destruction massive que nous opérons chaque jour sans y prendre garde. Et encore une fois, les animaux tiennent une place très importante. Lorsque l’on découvre l’origine du sable, notre sang se glace et, malgré cet univers merveilleux, on se demande si cela ne pourrait pas réellement arriver… Mais au-delà de ce thème animalier très prégnant, c’est principalement le pouvoir des histoires, et par extension celui des mots, qui est au centre du roman. Il y a aussi un message très fort sur la mémoire et l’importance du souvenir. Le souvenir ; le fait de raconter un fait passé le fait revivre dans l’esprit des gens et cette métaphore visuelle est ici complètement explicitée puisque Kabalraï découvre qu’il possède le pouvoir de faire revivre les choses en les racontant à nouveau. Ce point très précis donne toute son originalité à ce roman fantastique. Mais plus qu’un effet de mise en scène, il nous fait réfléchir sur notre rapport au langage et transmet un message important sur la valorisation de l’imagination.

Toujours aussi poétique, toujours aussi émouvante, toujours aussi incisive, la plume de Wellenstein nous transporte dans cet univers onirique, mais souvent morbide. On regrettera peut-être quelques facilités sur le personnage d’Irae et la découverte de son passé qui m’a semblé un peu “too much” et pas forcément en accord avec le reste de l’intrigue. Le cœur du roman manque aussi parfois de peps (je dirais les chapitres 13 à 20), mais l’ambiance créée est tellement prenante que la lecture reste agréable.

Enfin, la conclusion est superbe et la toute dernière phrase magistrale, exactement comme dans Mers Mortes. Cela faisait bien longtemps (probablement depuis la saga Le Royaume de Tobin…) que je n’avais pas ressenti autant d’émotions à la lecture de romans (je parle donc des deux lus de Wellenstein).

Une auteure française à suivre de très, très près !

Le désert des couleurs est sans doute un peu en deçà de Mers Mortes, mais la plume d’Aurélie Wellenstein est d’une beauté sans pareil. Il faut saluer sa capacité à conter des histoires à la fois fabuleuses et glaçantes qui nous entraînent dans des mondes merveilleux, mais nous font aussi beaucoup réfléchir sur notre rapport au vivant sous toutes ses formes. La liste des publications de l’auteure est longue et il me tarde de lire ses autres romans !

Titre : Le désert des couleurs
Série :
N° du tome :
Auteur(s) : Aurélie Wellenstein
Illustrateur(s) : Aurélien Police
Traducteur(s) :
Format : Grand format
Editeur : Scrinéo
Collection :
Année de parution : 2021
Nombre de pages : 339
Type d'ouvrage : Roman

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