Sunshine – Danny Boyle

La mission Icarus II est envoyée vers le soleil afin de le sauver d’une fin prochaine. L’équipage du vaisseau est confronté à un dilemme : doit-il continuer sa route sans s’arrêter ou se dérouter pour rejoindre Icarus I, la précédente mission portée disparue des années plus tôt ? Son choix conditionnera la suite de son voyage.

Danny Boyle a connu une décennie 2000 particulièrement riche : depuis La plage en 2000, il a enchaîné les projets divers et variés comme 28 jours plus tard en 2002, ne se laissant jamais enfermer dans un genre jusqu’à Slumdog Millionnaire (2008) consacré par les Oscars.

Ce Sunshine représente la parenthèse science-fiction de sa carrière, une parenthèse réussie d’un point de vue critique (76% chez Rotten Tomatoes par exemple, certifié « fresh »), mais un four au box-office – le film ne rentabilisera même pas son modeste budget de 40 millions de dollars.

La principale qualité de Sunshine est son ambiance. Pendant toute la première partie, Boyle installe réellement le spectateur comme membre de l’équipage de l’Icarus II. Caméra au plus près, succession de plans d’ensemble majestueux du vaisseau, il iconise et installe un contexte réaliste tout en restant prenant sur la longueur. Cette façon de filmer m’a régulièrement évoqué l’Alien de Ridley Scott par son souhait de privilégier l’installation des personnages dans un vaisseau qui n’est pas seulement un décor.

On ressent particulièrement la dangereuse fascination de l’équipage pour l’astre solaire. Les plans contemplatifs dans la baie d’observation, où l’on partage ce spectacle avec les hommes et femmes du bord, parviennent toujours à impressionner ou terrifier, faisant du soleil un élément tangible, présent, du scénario.

Il adaptera aussi à merveille son montage lors des scènes d’action. Le morceau de bravoure des panneaux à réparer, où la pression ne cesse de monter, en est l’exemple type, bien servi par des effets spéciaux qui n’ont pas vieilli.

Il tente enfin de transmettre par l’image la folie d’un personnage. Ces effets shaky-cam, au montage cut qui donnent une impression d’hystérie, avec zooms soudains et plans subliminaux, sont eux datés et ne rendent pas service au dernier tiers du film, qui veut basculer vers le film d’horreur sans forcément y réussir. Cette dernière partie bénéficie toutefois d’une réelle dynamique, dont l’enjeu crucial est bien mis en valeur par le musique lyrique de John Murphy.

https://youtu.be/5-4XD-wbalY

Sunshine bénéficie aussi d’un chouette casting. Cillian Murphy est le héros et apporte déjà cette troublante présence à l’écran qui a séduit, depuis, d’excellents réalisateurs. S’y ajoute Chris Evans, pas encore Captain Americanisé, Rose Byrne  tente d’apporter un peu d’intensité, Michelle Yeoh en guest star de luxe, ou Hiroyuki Sanada que j’avais découvert dans le Dernier Samouraï. Le rôle le plus ingrat revient à Mark Strong, qu’on ne voit jamais en entier à l’écran, mais qui impose lui aussi son charisme.

Dommage qu’ils ne soient pas très bien utilisés par le scénario. Celui-ci repose sur une idée de départ stupide : et si l’ultime mission de sauvetage de l’humanité se détournait pour aller explorer un vaisseau perdu dix ans plus tôt ? Cet équipage fait un choix sans logique, sous un prétexte ridicule (se donner, sans certitudes aucunes, une deuxième chance), sans tenir compte des risques ou des implications d’un tel geste.

Même l’argumentaire développé à travers les dialogues pour justifier ce choix est pris rapidement en défaut, étant entendu que ce n’est pas une mission suicide et qu’il restera ensuite des possibilités de revenir vers Icarus I si la première tentative échoue. Cela décrédibilise les personnages et les transforme en pion du scénariste.

Alex Garland, qui s’est rattrapé depuis avec Never let me go, Dredd, Ex machina ou Annihilation, va alors enchaîner les catastrophes sans temps mort, avec application, mais on ne peut que tiquer face à une idée de départ qui n’a aucun sens, et qui nuit au parti pris « réaliste » de la première partie.

Conclusion

Sunshine reste donc un bel exercice de style pour Danny Boyle, formellement impressionnant et abouti. Le film ne va malheureusement pas plus loin, plombé par une idée scénaristique abracadabrantesque qui nuit grandement à sa crédibilité. Dommage, car le voyage est hypnotisant et vaut le coup d’œil.

Sunshine

Réalisé par Danny Boyle

Avec Cillian Murphy, Rose Byrne, Chris Evans, Michelle Yeoh, Mark Strong, Hiroyuki Sanada

20th Century Fox

Disponible en DVD et BR

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