1596. Deux ans avant l’édit de Nantes qui met fin aux guerres de Religion, Marseille la catholique s’oppose à Henri IV, l’ancien protestant. Une rébellion, une indépendance que ne peut tolérer le roi. À La Roue de Fortune se croisent des passés que l’on cherche à fuir et des avenirs incertains : un chevalier usé et reconverti, une vieille femme qui dirige la guilde des assassins, un couple de magiciens amoureux et en fuite, et la patronne, ancienne mercenaire qui s’essaie à un métier sans arme. Les pions sont en place. Le mistral se lève. La pièce peut commencer.
Voici un bien étrange roman qui au final s’approche plus du roman historique que de la Fantasy. Si l’on enlève ces moines Artbonniers, maîtrisant une pierre magique pouvant mettre le feu, rien dans Royaume de vent et colères ne relève de la fantasy!
Du coup, pourquoi pas, mais c’est un peu traître, car l’intrigue se focalise sur des événements historiques relatés de manière très réaliste et de l’intérieur par des personnages pour le coup fictifs. Cependant, malheureusement, ces personnages ne sont pas attachants. Ni l’histoire de l’ancienne mercenaire Axelle maintenant mère de famille et aubergiste, ni celle du chevalier huguenot Gabriel servant maintenant fidèlement les catholiques, ni celle du moine Armand et son amant Roland ayant fuit l’armée du roi Henri IV ne nous captivent réellement. Seule Victoire, maître de la guilde des savonneurs (assassins cachés) nous touche, car elle est celle qui représente le mieux Marseille à cette époque. D’ailleurs, c’est sans doute elle que l’on voit sur la superbe couverture réalisée par Gary Jamroz (illustrateur également de la couverture du roman Les Royaumes de Tobin, déjà parfaitement exécutée) qui laissait présager une intrigue plus épique et violente que ce qui nous est proposé. Les autres personnages sont des figures traditionnelles de ce type de roman et n’apportent du coup pas grand-chose à une intrigue déjà lente à se mettre en place. D’ailleurs, la troisième partie est la plus intéressante, car elle nous envoie en plein cœur de l’action.
Del Socorro construit son intrigue comme un journal des personnages qui s’adressent aux lecteurs à la première personne. Cela pourrait marcher si les chapitres n’étaient pas aussi courts; parfois juste deux pages! Alors, je suis la première à dire que les chapitres courts apportent plus de dynamisme, mais là le contexte historique est tellement complexe que le roman aurait mérité plus de développement. Par exemple, le personnage de Chrétienne d’Aguerre, comtesse de Sault à la tête de la Ligue Aixoise est vraiment intéressant, mais pas suffisamment développé; au profit de Gabriel qui, il faut le dire, n’est pas très charismatique. Le problème au final, c’est que le choix de l’époque dessert son auteur, car il prend le pas sur son intrigue somme toute très simple et pas assez efficace. 275 pages c’est vraiment trop peu!
On ne pourra cependant pas reprocher à Del Socorro son écriture d’une très belle qualité avec des tournures de phrases élégantes et des dialogues bien maîtrisés. Il manque cependant un réel dynamisme dans la trame, mais surtout un cruel manque de descriptions.
CONCLUSION
Royaume de vent et de colères est un roman qui se lit vite, non pas parce qu’il est captivant, mais parce que l’intrigue est beaucoup trop rapide par rapport à ce que veut en faire l’auteur. On est également déstabilisé par le manque de propos et une fin abrupte qui nous laisse sur notre faim. Vraiment décevant.
Royaume de vent et de colères
Jean-Laurent Del Socorro
couverture Gary Jamroz
Editions J’ai Lu
6,70€