H.P.L. – Roland C. Wagner

Initialement publié en 1999 dans l’anthologie « Futurs antérieurs » chez Fleuve Noir, recueil français de textes d’inspiration steampunk réunis par Daniel Riche, repris dans le recueil de nouvelles de Roland C. Wagner « Musiques de l’énergie » chez Nestiveqnen en 2000, « Celui qui bave et qui glougloute » paraissait sous forme d’un mince volume aux éditions Actu SF en 2007. Destin similaire et même plus riche encore pour « H.P.L. (1890-1991) » puisqu’en sus de figurer dans les deux anthologies précédemment citées il avait été publié initialement dans la bibliothèque sublunaire des éditions l’Astronaute mort en 1995, repris dans « Cyberdreams 08 » en 1996, puis dans « Les meilleurs récits SF de l’année 1998 » au Bélial, dans « Les Navigateurs de l’impossible » chez Imaginaires sans Frontières en 2001, pour être enfin réédité en édition bilingue et sous une couverture de Caza, dans la collection « Les trois souhaits » des éditions ActuSF en 2006, en petit tirage numéroté et limité à deux cents exemplaires

On a donc affaire avec « H.P.L. (1890-1991) » à un petit texte que l’on pourrait qualifier de « culte » de la SF française, trop court et trop réussi pour que l’on s’étende longuement dessus. L’idée de base : au lieu de rendre l’âme, comme chacun sait, le 15 mars 1937 à Providence (Rhode Island) et à l’âge de 46 ans, Lovecraft aurait vécu jusqu’à l’âge de 101 ans. Un texte qui, à notre sens, ne souffre que d’un seul défaut : prêter à Lovecraft un retournement total de sa xénophobie vers un militantisme tolérant apparaît bien peu vraisemblable et rompt la cohérence du tableau – sans compter que la revisitation du singulier, de l’unique et de l’indicible au prisme réducteur du politiquement correct contemporain semble relever d’un manque d’imagination lui-même singulier. Malgré cette limite, « H.P.L. (1890-1991) » amuse beaucoup. Le lecteur se délectera des rapports et démêlés du maître de Providence avec les grands auteurs de l’âge d’or, et se mettra à rêver des formidables textes qui auraient pu naître de cette existence alternative – et qu’il aurait pu déguster dans des anthologies qui ont déjà fait ses délices.

Moins concis et surtout beaucoup moins fin, « Celui qui bave et qui glougloute » amuse sans réellement séduire. Les Tuniques bleues, Kit Carson, La fille de Nat Pinkerton, Jesse James, Buffalo Bill associé aux frères Dalton, Jules Verne, Robida, Conan Doyle, Calamity Jane, Edison, Charles Cros, Lovecraft :  quasiment pas une page sans  un nouveau personnage réel ou de fiction bien connu. Le steampunk comme simple démarche ludo-référentielle montre ici ses limites : celles du clinquant, d’une démarche au fond assez potache qui n’aurait pas dû dispenser l’auteur d’un effort d’écriture. Car, disons-le franchement,  « Celui qui bave et qui glougloute » est tout à fait perfectible. Le texte est marqué par d’indéniables lourdeurs, dont une accumulation maladroite de subordonnées inutiles, une série de « qui » et de « que » évoquant les premières tentatives d’un auteur débutant. Même en considérant ce texte comme un pastiche de littérature « pulp », son manque de fluidité passe difficilement. De tels constats laissent entendre que ce texte, malgré ses rééditions multiples, n’a jamais été correctement relu, ce que viennent confirmer des coquilles manifestes (« négligeant » pour « négligent ») et des incohérences de conjugaison (« le hasard voulut qu’un pétroplane du gouvernement survolât cette vallée déserte au moment même où James se trouvait en terrain découvert, et que Carson rencontra le pilote » pour « rencontrât »). On ne peut que le regretter, car ce texte somme tout distrayant, avec extra-terrestres et machines infernales, aurait mérité d’être retravaillé.

On considérera donc « Celui qui bave et qui glougloute » plutôt comme un bonus à « HPL », tout comme les deux brefs entretiens avec l’auteur qui permettent aux éditions ActuSF d’épaissir un peu le volume et de le commercialiser autrement que sous la forme initiale du tirage limité. Pour seulement six euros, celui qui n’avait pas eu accès au « HPL » dans ses éditions préalables en aura en tout cas pour son argent avec ce texte original qui saura séduire les amateurs du maître de Providence.
Roland C. Wagner

H.P.L.

Couverture : Caza

Editions ActuSF

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