Frank Frazetta restera longtemps le nom américain le plus connu de l’illustration fantastique, celui que même les non adeptes du genre connaissent. Est-ce tout simplement parce qu’il ne s’est pas enfermé dans un seul genre ? Qu’il a collaboré à des revues de BD d’aventures populaires ou encore en raison d’un style bien particulier qui a donné naissance à une sorte d’école auprès de ses successeurs spirituels ? Décryptons l’artiste….
Né à Brooklyn, New York, le 9 février 1928, il se démarque dès l’école primaire : ses instituteurs sont tellement impressionnés par sa créativité qu’ils prennent sur eux de convaincre les parents du jeune Frank, alors 8 ans, de l’inscrire dans la prestigieuse Brooklym Academy of Fine Arts. C’est dans cet environnement dédié à l’apprentissage des arts plastiques, que Frank trouvera le meilleur des professeurs en la personne de Michele Falanga, gagnante de l’équivalent d’un award décerné par une grande école d’arts italienne. Durant huit ans, Frank Frazetta apprend beaucoup, il ébloui son mentor par des capacités, à tel point que Dame Falanga ambitionne de lui offrir la même chance qui fut la sienne : poursuivre ses études en Italie, haut lieu des arts depuis la Renaissance. Hélas, elle décède brutalement en 1944 et la Brooklyn Academy of Fine Arts ferme ses portes peu de temps après.
Frazetta n’a que 16 ans mais il doit travailler pour gagner sa vie. Il commence par exploiter sa formation, et sa passion, en dessinant pour des comics aux thèmes très variés : westerns, fantasy, mystères, histoire, etc… Etonnament, il fait le choix de décliner des offres attrayantes telles que celle des Studios Disney. Dans les années 50, il travaille plutôt pour des éditeurs spécialisés dans le Comic tels qu’EC Comics, National Comics, Avon. Il collabore en parallèle avec des amis sur des réalisations personnelles.
La variété des thématiques auxquelles il plie son coup de crayon et de pinceau est formatrice : couverture de Buck Rogers pour les Famous Funnies, mise en image du comic strip Lil’Abner d’Al Capp, poste d’assistant pour Dan Barry et son Flash Gordon (9 ans de collaboration). Cela lui donne la confiance nécessaire pour se lancer dans la création de son propre univers visuel. Il commence avec un comic intitulé Johnny Comet mais reste marqué par l’influence de Dan Barry, ce qui s’avère même un frein à de nouvelles commandes tant le monde du comic s’est développé et élargi. Pire, il s’entend dire que son style est vieillot pour le comic… ! Il accepte donc des boulots moins gratifiants tels que la mise en image d’un comic de parodie pour Playboy.
L’horizon se dégage en 1964 puisque les United Artists studios le contacte pour la réalisation de l’affiche du film What’s New Pussycat. Frazetta est relancé et, bonus, pour un tout autre univers. Le cinéma fait par la suite souvent appel à son talent pour d’autres affiches et outils de promotion visuelle de même que l’édition qui lui commande des couvertures de romans d’aventure. Conan Le Barbare de Robert E. Howard et L. Sprague de Camp Lancer se révèlent être de précieux sésames puisque s’ensuivent des commandes pour les couvertures et des encarts de chapitres destinés aux romans de l’auteur classique, père des légendaires Tarzan et John Carter, Edgar Rice Burroughs. Le travail de Frazetta devient populaire, se commercialise sous le forme d’affiches etc… Les studios hollywoodiens spécialisés dans l’animation l’approchent de nouveau dans les années 80 et Frazetta œuvre sur le film Tigra, la Glace et le Feu (1983). Néanmoins, le succès n’est pas en salle : le style de Frazetta, une héroïne peu vêtue étant la proie de créatures monstrueuses et agressives, n’est pas adapté aux attentes du public féru d’animation et l’artiste retourne à ses crayons, son encre, ses toiles, ses peintures et ses pinceaux, peut-être sans regret. Il faut dire qu’il vogue entre tous les mondes : crayon, encre, aquarelle, huile sur toile, tous formats, la palette de Frazetta s’ouvre à tous les mondes. Nul doute à l’observation de ses travaux que le comic est demeuré une base importante et même imposante dans son traitement d’ensemble, plus encore dans sa manière de tracer visages et corps. C’est ce mélange équilibré entre personnages très patinés de « l’influence comic », décors fantastiques très purs et imaginaire très personnel, très dark fantasy finalement, qui assure un caractère unique de l’œuvre de Frank Frazetta. Il est même évident que Frank Frazetta pouvait tout se permettre, tout mettre en image !
Dans les décennies qui suivant, reprenant son activité lucrative pour les éditeurs, Frazetta prend aussi plaisir à créer des visions de son imaginaire dont la plus connue, reprise, copiée et appréciée est celle, multiple, du Death Dealer qui inspirera ensuite des romans et combien d’autres imaginaires de tant d’autres illustrateurs. L’artbook The Fantastic Art of Frank Frazetta reprend, sur 5 volumes, l’ensemble de son œuvre et s’arrache en librairie.
Les années 2000 sont difficiles pour l’artiste : les problèmes de santé se succèdent et culminent avec des accidents cardiaques qui le paralysent du côté droit. Peu importe, Frazetta apprend à dessiner et peindre de la main gauche ! En 2009, sa peinture originale de la première édition de Conan le Barbare (huile sur toile) se vend pour plus d’un million de dollars au guitariste du groupe Metallica, de quoi relancer encore la légende. Malheureusement, Frazetta perd son épouse des suites d’un cancer, son fils finit en prison pour avoir tenté de voler les œuvres de son propre père, exposées au Musée qui lui est dédié en Pennsylvannie et, le 10 mai 2010, Frank Frazetta décède d’une énième crise cardiaque.
Toutes les infos et splendides images numérisées présentées ici sont issues de ce site sur lequel je vous encourage vivement d’aller vous promener pour contempler encore plus d’oeuvres du maître : http://frankfrazetta.net/index.html
Merci Clémentine pour ce survol de l’oeuvre du Maître !
je recommande vivement le DVD de “Tygra la Glace et le Feu” dans lequel il y a un DVD bonus absolument indispensable : “Painting with fire”, un reportage fabuleux sur la vie et l’oeuvre de Frazetta, avec images d’archives, interviews… un must ! et si vous voulez tout savoir sur le Death Dealer : tout ceux de Frazetta mais aussi comics et fanarts, alors c’est ici :
http://bd-livres.psychovision.net/punbb/viewtopic.php?id=2879