Entretien avec Krys, chanteur de ECR.LINF

Bonjour, et merci de prendre le temps de répondre à mes questions. Peux-tu tout d’abord te présenter et nous expliquer ce que tu fais dans ECR.LINF ?

Bonjour, merci à toi pour l’intérêt que tu portes à notre musique. Je m’appelle Krys et je suis le chanteur d’ECR.LINF. Mon rôle principal dans le groupe est d’apporter ma voix et mon énergie aux compositions de Dorian, le guitariste et compositeur principal. Je participe également à l’écriture des paroles et à l’élaboration des concepts derrière nos morceaux. Ensemble, nous travaillons pour créer une musique qui soit à la fois puissante et sincère, reflétant notre vision du monde et nos influences variées.

Comment en es-tu venu au metal, et plus particulièrement au metal extrême ?

Depuis mon adolescence, j’ai officié dans le metal extrême. Cette appétence est certainement dûe à des dispositions psychologiques qui m’ont poussé vers ce genre de musique. Apres plusieurs expériences dans différents styles extrême, je n’avais pas encore trouvé le momentum pour concrétiser un projet dans le black metal. D’abord en solo avec Ophe, le black metal m’a toujours captivé par son atmosphère sombre et son côté introspectif. Ce qui m’a vraiment attiré, c’est la liberté d’expression et l’absence de compromis que l’on trouve souvent dans le métal extrême. C’est une musique qui permet d’explorer des thèmes profonds et souvent tabous, et qui pousse les limites sur le plan musical qu’émotionnel. C’est cette intensité et cette authenticité qui m’ont poussé à m’engager pleinement dans cette scène.

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D’où vient ce nom des plus surprenants, ECR.LINF ? Qui a eu l’idée première de celui-ci ?

La symbolique liée à la formule “Ecr. Linf” que Voltaire utilisait pour camoufler l’expression “Ecrasons l’infâme” nous semble très évocatrice de notre époque.

C’est suite à nos longs débats avec Dorian (Guitare/Compositeur) que ce nom m’est venu spontanément. Effectivement, Dorian et moi cherchions à imprégner le groupe de thèmes philosophiques et à inscrire le groupe dans la langue de Molière.

Loin des considérations marketing, ce nom peut être difficile à retenir mais passé l’étape de la pédagogie, il reste gravé dans les mémoires.

Souvent, il est difficile de se faire comprendre sans avoir d’interprétations jugeantes. C’est ce que ce nom met en évidence. Sa puissance évoque une période de l’histoire qui se replie sur elle-même et voit les dogmes et les bêtises s’épanouir. On est en accord avec la logique de Voltaire sur l’absurdité du prosélytisme et de la radicalité religieuse de toutes sortes. Pour nous, il est primordial de s’ouvrir à la spiritualité personnelle avant de se fondre dans des croyances qui façonnent notre existence.

Comment le groupe s’est-il réuni ? Car vous venez tous de différents projets et avez su avancer dans la même direction avec Belluaires.

Le groupe s’est formé de manière assez naturelle. Dorian et moi nous connaissons depuis une quinzaine d’années. Nous avons joué ensemble dans un autre projet, JARELL, avec Jean, notre clavieriste, à la fin des années 2000. Après l’arrêt de JARELL, nous avons chacun suivi nos propres chemins pendant environ dix ans. Puis, un jour, Dorian m’a demandé si je faisais encore de la musique et m’a envoyé quelques morceaux sur lesquels il travaillait en solo. J’ai tout de suite été inspiré par ce qu’il avait créé et j’ai décidé de rejoindre le projet. Ainsi, ECR.LINF est né.

Avec Dorian, nous avons commencé à travailler sur des démos et les premiers textes. Ensuite, notre ami bassiste Jiu, qui cherchait à rejoindre un groupe de black metal depuis plusieurs années, a écouté ce sur quoi nous travaillions et a voulu en faire partie. Nous cherchions également un batteur capable de jouer ce que nous composions.

Avec mon ancien groupe, nous avions partagé la scène avec Svart Crown, dont le batteur est Rémi Serafino, qui a aussi joué dans Hyrgal et joue maintenant dans Igorrr. Nous lui avons fait écouter nos démos et il a accepté avec plaisir de nous rejoindre.

Enfin, Jean, que nous avons retrouvé un peu par hasard lors d’un concert de Seth, un mois avant d’entrer en studio. Il s’avère qu’il ne voulait plus jouer de musique, sauf peut-être dans un groupe de black metal, et c’est exactement ce que nous avions à lui offrir !

Nous avons tous apporté nos expériences et influences variées, ce qui nous a permis de créer quelque chose d’unique. Avec “Belluaires”, nous avons vraiment trouvé notre direction commune. Chacun de nous a contribué à affiner notre son et notre vision, ce qui a permis à l’album de prendre forme de manière cohérente et puissante.

Belluaires justement est le premier album du groupe. Comment s’est passée sa composition ? Qui écrit les paroles, qui compose la musique ? Quel est le processus créatif derrière tout cela ?

La composition de “Belluaires” a été un processus assez collaboratif, même si Dorian en a été le moteur principal. Dorian a d’abord travaillé sur les premières ébauches des morceaux dans son studio. Il composait la musique et écrivait quelques bribes de paroles, souvent après des discussions approfondies entre nous sur les thèmes que nous voulions aborder. Nous avons beaucoup débattu et partagé nos visions pour définir la direction de chaque morceau.

Une fois que Dorian avait une base solide, je venais apporter mes idées et ma perspective sur les paroles et les thèmes. Nous avons souvent commencé par quelques riffs à la guitare acoustique et des idées de texte, puis nous avons peaufiné ensemble.

Jiu a enrichi les morceaux avec ses lignes de basse, apportant une profondeur supplémentaire et Rémi, avec son expérience et son style unique, a ajouté la puissance rythmique qui donne vie à nos compositions.

Jean, notre clavieriste, a ajouté des éléments atmosphériques et des textures sonores qui complètent parfaitement notre vision musicale.

En résumé, le processus créatif de “Belluaires” a été très organique et basé sur la collaboration. Chacun a apporté ses compétences et son sens artistique, ce qui nous a permis de créer un album cohérent et riche. Les paroles et les compositions sont le fruit de notre réflexion collective et de notre désir de créer une musique qui nous représente vraiment.

Avec Dorian nous avons travaillé sur un projet de livre qui est une extension des textes développé dans l’album. Cela a été une belle opportunité qu’on a eu avec Malpermisota recors & booking et les éditions des flammes noires. Dorian a pu développer des visuels dans le livre, j’ai pour ma part créé une vision plus étendue des textes pour poursuivre quelques concepts difficile à décrire parfois dans un texte. Chaque partie des textes de l’albums est rappelé dans un long texte.

Comment travailles-tu ta voix ? As-tu une manière de faire avant de chanter que ce soit en live ou sur album ?

Travailler ma voix est un processus assez introspectif pour moi. Je ne suis pas seulement à la recherche de techniques vocales, mais aussi d’une connexion plus profonde avec ce que je ressens et ce que je veux exprimer à travers ma musique. Avant de chanter, que ce soit en live ou en studio, je prends toujours un moment pour me recentrer et me connecter avec les émotions que je veux transmettre.

Je me replonge dans les paroles et les thèmes des morceaux, cherchant à comprendre et à ressentir profondément ce que chaque morceau signifie pour moi. Cette 2introspection me permet de rendre mes performances aussi instinctives et naturelles que possible. Je veux que chaque mot, chaque cri, chaque murmure reflète authentiquement ce que je ressens.

En live, c’est encore plus intense. L’énergie du public, l’atmosphère de la salle, tout cela alimente mon interprétation. Je laisse cette énergie me guider et je m’abandonne à l’instant présent, permettant à ma voix de devenir le vecteur de l’émotion brute et immédiate.

Pour moi, chanter n’est pas seulement une question de technique, c’est une forme d’expression viscérale. C’est pourquoi l’introspection est si importante : elle me permet de puiser dans mes émotions les plus profondes et de les transmettre de manière authentique et puissante.

Comment s’est passé le travail sur l’artwork de cet album ? Avec qui avez-vous travaillé ?

L’artwork de “Belluaires” est une représentation visuelle de la profondeur philosophique que nous cherchons à insuffler dans notre musique. Au-delà de simplement créer des morceaux de black metal agressifs, nous explorons des thèmes existentiels.

La couverture reflète cette démarche en illustrant la lutte et l’introspection inhérentes à nos paroles et à notre son. Elle sert de médium pour explorer les profondeurs de la psyché humaine et défier les normes ou les dogmes sociétaux, invitant les auditeurs à contempler leur place dans l’univers.

Depuis le début du groupe, nous avons cherché à réaliser le maximum de choses par nous-mêmes. Est-ce bien ou pas? Car il est vrai qu’il peut être utile de faire appel à des artistes extérieurs pour enrichir l’univers du groupe mais nous voulions garder cette spontanéité et cette sincérité à l’origine même de la naissance du groupe.

Donc, c’est Dorian qui s’y est collé. Avoir cette compétence en interne nous a permis de prendre le temps d’ajuster et d’affiner ce qu’on voulait vraiment, de l’idée originelle à la réalisation finale.

 

Un clip est sorti sur le premier morceau de l’album, Le Désespoir du prophète. Comment s’est passée sa réalisation ? Qui a eu les idées derrière cette vidéo ?

Ici aussi, ce fut un processus collaboratif. Dorian et moi avions beaucoup d’idées qu’on a partagées et priorisées selon l’interêt dans la mise en lumière des paroles et la faisabilité technique.
Le résumé du clip consiste en un long chemin introspectif, parcouru par une jeune fille, pour finir dans une transe faisant écho à un sacrifice personnel. Pour atteindre le divin ou l’ultime, il faut forcément se sacrifier de quelque chose. Ce sacrifice symbolise la mort de l’ego ou du moins, pour atteindre une sorte d’émulation, il faut s’en détacher pour atteindre ce Tout.

Ce Tout est bloqué par le mental et l’ego, et cherche à vivre par le sacrifice de l’abandon. Le mélange de son sang avec des graines lui permet de faire une potion qu’elle boit et qu’elle offre à la terre. Cette transe lui fait donc intégrer son propre sens et ainsi renaître. A la fine, on y voit le symbole d’Ecr.Linf brûler dans le clip et tomber à terre. Cela signifie que nous aussi, nous sommes prêts à sacrifier notre propre création (ou dépendances), et c’est ce qui est important : savoir prendre de la distance pour revivre.

Pour les anecdotes du clip, il faut savoir que ce sont nos enfants qui jouent dedans. Ça a été une journée très difficile à cause du temps (pluie et froid). On a fait en sorte qu’ils aient des changes pour se maintenir au chaud. C’est moi qui portais le sac de rando avec tous les changes dedans, c’était vraiment une aventure. Dorian filmait comme il pouvait. On avait fait du repérage dans plusieurs forêts, et on en a choisi deux. On avait trouvé ce lieu superbe que l’on voit à la fin du clip, à savoir le promontoire en pierre qui fait vraiment sens dans le scénario.

Et puis, on a eu notre pote Étienne qui était là avec son drone et qui s’est amusé comme un fou ! On entendait le bourdonnement du drone à notre hauteur, c’était drôle et un peu flippant quand même. Parfois, on le voyait se planter contre un arbre, on le ramassait et il redécollait. On s’est bien marrés avec ça.

Donc on a pu alterner avec deux caméras. Le plus dur dans le montage, pour Dorian,  a été d’uniformiser la colorimétrie (étalonnage) du fait de l’usage de ces deux caméras. Il a fallu une semaine de montage, ne serait-ce que pour la première version. On est fiers d’avoir tout réalisé nous-mêmes sans être forcément du milieu.

Est-ce que ECR.LINF est un projet qui prévoit de faire de la scène ? Si oui comment envisagez-vous les choses en termes scéniques ?

Oui, ECR.LINF prévoit de faire de la scène. Nous sommes actuellement en train de répéter intensivement pour préparer nos futurs concerts. Nous voulons offrir une expérience immersive et puissante, en restant fidèles à l’atmosphère de nos morceaux. En termes scéniques, rien n’est encore arrêté mais plusieurs pistes s’offrent à nous. Ici, aussi nous allons devoir prioriser.

Des dates à annoncer déjà ?

Patience…Des nouvelles seront bientôt communiquées.

Merci pour tes réponses et à bientôt au détour d’un concert !

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