Freaks Out – Gabriele Mainetti

LES + :

  • Un bouillonnement d’idées incroyables
  • Une sacrée audace scénaristique
  • Des personnages hyper intéressants
  • Une réalisation virtuose

LES – :

  • Le film est un poil trop long
  • Une influence hollywoodienne trop marquée (par moments)

Italie, 1943. Le Circo Mezzapiotta est comme une famille de freaks, dotés de véritables pouvoirs surnaturels, dont Israel, le propriétaire du cirque, est le père spirituel. Mais la vie de nos monstres de foire est chamboulée quand la guerre frappe brutalement le pays. Fuyant les combats, avec ses protégés, Israel se rend seul à Rome afin d’organiser le départ de toute la troupe pour l’Amérique. Mais contrairement à ce qui était prévu, il ne revient pas…

Révélé en 2015 par l’incroyable surprise que fut On l’appelle Jeeg Robot – le premier film de super-anti-héros italien – Gabriele Mainetti aura donc mis six ans pour réaliser son deuxième long-métrage, Freaks Out. C’est dire si le jeune réalisateur transalpin a minutieusement préparé son coup. Et ça se sent! Il suffit de consulter sa filmographie pour voir que Mainetti a plusieurs cordes à son arc : le bonhomme est acteur, producteur, scénariste, compositeur et donc réalisateur de grand talent.

Et toutes ses compétences (sauf en tant qu’acteur) Gabriele Mainetti les a employées à fond pour Freaks Out, tant le film transpire l’enthousiasme, l’audace et la créativité. Mais ce bouillonnement créatif, grosse qualité, n’est pas sans revers de médaille. En effet, le film tarde un peu à exposer ses enjeux, occupé qu’il est à développer ses personnages principaux. Il souffre aussi d’une certaine tendance à trop vouloir singer le cinéma de blockbuster américain. Là où son prédécesseur, On l’appelle Jeeg Robot, nourri à la même mamelle hollywoodienne que Freaks Out, réussissait néanmoins à rester un film 100% rital dans l’âme, on pourra dire que, cette fois-ci, Mainetti est un peu trop influencé par le style Outre-Atlantique, même si l’ identité italienne de son dernier film ne fait tout de même aucun doute.

Mais là où Freaks Out réellement excelle, c’est dans le soin et la tendresse avec lesquels il traite ses personnages. Si le rôle de Matilde (magnifique personnage féminin qui révèle une prometteuse actrice : Aurora Giovinazzo) est prépondérant, on constate que tous les personnages sont développés comme il se doit et que chacun d’entre eux trouve sa place et sera mis en valeur. Et ceci est vrai également pour le méchant de service. Personnage complexe à la fois terrifiant et pathétique, Franz est aussi un freak, presque seul au monde et régulièrement humilié, qui, dans son aveuglement et son rejet de soi, délaisse son immense talent de pianiste (il est né avec des mains de six doigts!) pour se consacrer entièrement à la mission qu’il s’est fixée : faire gagner la guerre au Reich. Mention spéciale donc à Franz Rogowski, atypique acteur allemand, qui nous livre ici une grande prestation.

Ajoutons à cela que cette passion pour les freaks, cet univers où l’imaginaire merveilleux et poétique se heurte à une réalité horrible, rapproche Gabriele Mainetti du style d’un Guillermo Del Toro à ses grandes heures (L’échine du Diable, Le Labyrinthe de Pan surtout). En scénariste audacieux qu’il est, Mainetti n’hésite pas à aborder frontalement des thèmes hyper sensibles comme la déportation des juifs et la Solution Finale hitlérienne. Il truffe également son film d’idées drôles, hallucinantes, trashs (en cela il renoue avec cette « méchanceté », ce côté amoral et non édulcoré propre à l’âge d’or du cinéma de genre italien).

CONCLUSION

Freaks Out est une véritable bouffée d’air frais dans le contexte morose et sclérosé du cinéma actuel. Et le film est aussi la confirmation que son réalisateur est le nouvel enfant terrible du cinéma fantastique européen, et, osons le dire, mondial.

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