Et cette porte, là-bas, qui se fermait… – Pierre Gévart

Les éditions Argemmios se sont dédiées à tout ce qui touche à la mythologie et au divin. Après l’anthologie Les Héritiers d’Homère qui asseyait encore plus la maison dans son univers de prédilection, c’est cette fois une novella qui va enjôler le lecteur qui nous est proposée. Et pas écrite par n’importe qui : Pierre Gévart, l’un des chantres de l’imaginaire à la française (il a organisé deux fois la Convention Nationale Française de SF et il dirige les revues Galaxies et Géante Rouge) nous propose de revisiter l’un des plus grands mythes helléniques. Programme qui se veut donc alléchant mais quelle en a été la finalité ? Nous allons le découvrir maintenant.

La première impression sur le livre est excellente. L’illustration de couverture, signée Mathieu Coudray, met en place un univers tout ce qu’il y a de plus classique pour chacun d’entre nous : un couloir, un sac poubelle sur le palier, et au fond une porte entrouverte avec de la lumière. Intrigant à souhait… Seul reproche que je ferai à cette couverture : la police du titre ne m’a pas parue vraiment adaptée. Je l’ai trouvée trop grasse comparée à la finesse de ce texte.

Le texte justement. Entrons dans le vif du sujet. Eurydice, Orphée : deux personnages mythologiques à l’histoire chargée de sens. Bref résumé : Orphée va chercher Eurydice, la femme qu’il aime, aux Enfers. Hadès l’autorise à repartir en sa compagnie mais à une condition : qu’il ne se retourne pas de toute sa remontée, sa chère et tendre le suivant. Bien entendu, comme dans tout mythe grec, ce n’est pas rigolo si le héros ne fait pas ce qui lui a été interdit. Et Eurydice disparaît dans les limbes infernales pour ne plus jamais en ressortir, laissant Orphée à sa tristesse. Voilà pour le résumé. Mais là où Pierre Gévart fait très fort, c’est qu’il ne se contente pas de raconter le mythe, ce serait trop simple, voyons…

Il en propose une version totalement différente, adaptée à notre monde. Ainsi, Orphée est écrivain et journaliste tandis qu’Eurydice est professeur de Lettres. Leur quotidien est lié à la porte de leur appartement, à l’enfermement qu’ils ressentent à la fois au sein de leur couple mais aussi de leur vie quotidienne. Véritable interrogation sur le couple et sur la vie en général, cette novella invite réellement à la réflexion, ce que je trouve trop rare en ce moment. La jalousie de la porte du voisin qui se ferme lorsqu’Eurydice sort acheter des croissants est l’exemple type du quotidien qui dérape. Et Pierre Gévart contrôle à merveille ce dérapage, ce qui est pourtant loin d’être simple. La maestria de l’auteur se ressent pleinement dans ce texte. Il sait où il veut aller, ce qu’il veut faire penser au lecteur, prêt à le détromper dès que possible.

Et cette porte, là-bas, qui se fermait… est une excellente novella, un de ces textes rares que l’on prend le temps de savourer. Chaque page apporte son lot de surprises et de nouveautés au lecteur, qui devient de plus en plus haletant au fil des pages. Il est particulièrement difficile de retranscrire un mythe dans notre monde et nombreux sont ceux qui s’y sont essayé en se cassant les dents. Pierre Gévart, au contraire, est parvenu au bout de sa mission : faire revivre Orphée et Eurydice pour le lecteur. Jamais ils n’ont paru aussi vivants et n’ont su autant faire réfléchir le lecteur sur les notions de couple, d’enfermement, d’amour,…

Et cette porte, là-bas, qui se fermait…
Pierre Gévart
Editions Argemmios
11 €

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