La Traversée du temps – Mamoru Hosoda

C’est étonnant, mais contrairement à mon habitude, je ne compte pas démolir un nouveau film. Non, bien au contraire, j’ai souhaité aborder un film qui est l’un de mes préférés à bien des égards. Que ce soit au niveau du scénario, de cette musique qui vous restera en tête ou bien encore des personnages eux-mêmes, difficile de ne pas succomber au pouvoir hypnotisant de Mamoru Hosoda.

Makoto est une jeune lycéenne comme les autres, un peu garçon manqué, pas trop intéressée par l’école et absolument pas concernée par le temps qui passe ! Jusqu’au jour où elle reçoit un don particulier : celui de pouvoir traverser le temps. Améliorer ses notes, aider des idylles naissantes, manger à répétition ses plats préférés, tout devient alors possible pour Makoto. Mais influer sur le cours des choses est un don parfois bien dangereux, surtout lorsqu’il faut apprendre à vivre sans !

Une ville paisible…tout simplement

« Ô temps ! Suspends ton vol et vous, heures propices ! Suspendez votre cours » disait le poète. Cette phrase n’aura jamais été aussi vraie que dans ce film d’animation. Mamoru Hosoda ne tombe jamais totalement dans le pathos, heureusement d’ailleurs. L’histoire s’ouvre sur une partie de base-ball. En fait, il s’agit d’un rêve, celui de l’héroïne, Makoto. Un personnage féminin avec un côté garçon manqué, dont les défauts ressemblent à ceux à ce que nous avons pu avoir (ou que nous avons toujours) permet à toutes et à tous de s’identifier à elle. Je précise que le réalisateur ne tombe jamais dans facilité pour en faire une caricature.

Ainsi concernant Makoto, nous ne sommes guère surpris lorsqu’elle se réveille en retard et qu’elle doit se dépêcher sur le chemin du lycée, nous avons tous vécu cela un jour. Par contre niveau poisse, la journée de Makoto atteint des sommets :

  • Réveil en retard
  • Arriver juste à temps en cours…pour avoir un contrôle surprise et échouer à celui-ci
  • Mettre le feu lors du cours de cuisine
  • Se faire écraser par deux garçons qui chahutaient

Même en passant sous une échelle, accompagné d’un chat noir, un vendredi 13, je n’aurais pas eu tout cela.

Le summum de cette journée est quand même l’accident qui aurait dû lui être fatal si elle n’avait pas eu la capacité de voyager dans le temps. Oui, Makoto était une lycéenne ordinaire au début du film, mais au contact d’une étrange noix, elle va acquérir le don de voyager dans le temps. Cependant, ce pouvoir ne s’active que grâce à la vitesse, les scènes cocasses seront donc très nombreuses. Des chutes en pagailles et des situations que les autres personnages ne comprennent bien évidemment pas du tout.

Bien qu’étant un scénario original, la Traversée du Temps a d’abord était une nouvelle écrite par Yasutaka Tsutsui en 1965 dont l’héroïne est une certaine Kazuko. De là à penser qu’il s’agit de la tante de Makoto, il n’y a qu’un pas, toutefois on ne le franchira pas (l’une s’appelle Kazuko Yoshiyama, l’autre Kazuko Akiyama), joli petit clin d’œil tout de même de la part du réalisateur. Cette tante n’est d’ailleurs pas surprise par le récit de Makoto puisqu’elle déclare qu’il s’agit simplement d’un voyage dans le temps. Elle racontera également qu’elle a déjà voyagé dans le temps. Bon en fait, c’est juste un gros troll puisqu’elle a uniquement fait la marmotte tout un dimanche, résultat elle a été « étonnée » que sa journée soit passée aussi vite.

Ce film est donc plein de belles couleurs, sans véritables méchancetés. Lorsque celles-ci apparaissent, c’est uniquement pour bien appuyer sur le fait qu’un grand pouvoir implique de grandes responsabilités comme a pu dire l’oncle de Peter P. Ainsi, quand Makoto décide de réécrire entièrement la terrible journée qu’elle a pu avoir, les conséquences se feront ressentir durant la totalité du film. Elle transforme un cauchemar en une journée idéale :

  • Elle se lève en avance et donc arrive en cours en avance
  • Elle réussit (facilement) l’examen surprise
  • Elle ne provoque pas de début d’incendie lors du cours de cuisine
  • Elle évite le lourdaud qui devait s’écraser sur elle
  • Elle passe 10h au karaoké (en prenant le soin de remonter le temps à la fin de chaque heure)
  • N’étant pas satisfaite du repas du soir, elle revient 2 jours auparavant afin de manger une grillade

Ses réactions peuvent sembler futiles et pourtant appuient encore sur le fait, qu’en tant que lycéenne, Makoto ne semble guère s’intéresser aux choses sérieuses qui l’entourent…du moins au début. Son pouvoir est à elle et à elle seule, elle ne l’utilisera donc que pour son bon plaisir.

Mais voilà, il fallait bien que la légèreté se pare de quelques taches sombres qui vont devenir de plus importantes au fil du film. Peu à peu le film va donc devenir plus sérieux. Makoto va donc évoluer et passera du stade d’adolescente stupide à celui de jeune adulte prenant peu à peu ses responsabilités et utiliser son pouvoir pour aider les autres.

Je ne vais rien dévoiler de plus de ce qui est un chef d’œuvre pour moi. Mamoru Hosoda est un nouveau Miyazaki et les films qu’il a réalisés par la suite en sont la preuve.

Le génie d’Hosoda tient également dans la musique et son utilisation. Si bon nombre de morceaux sont des compositions spécialement écrites pour le film, certains proviennent de la musique classique et une œuvre en particulier : les célébrissimes variations Goldberg de Jean Sebastien Bach. Plus précisément, l’Aria ainsi que les variations 1, 4 et 12. Ces variations, plus rythmées, sont utilisées lors des scènes de voyages temporels. L’Aria, plus calme, est utilisé pour les vues apaisantes du lycée.

Alors, lorsque se termine le film, sur les ultimes notes électroniques, nous aurions souhaité qu’il dure plus longtemps, ou bien que le temps passât justement beaucoup moins vite. Il nous reste alors que ces images pleines de douceur, d’humour et, mais également d’un peu de tristesse pour Makoto.

Time waits for no one. Alors, utilisons le temps que nous avons à bon escient.

La Traversée du Temps

de Mamoru Hosoda

scénario de Satoko Okudera

Madhouse Studios

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