Lou Jan poursuit son exploration des frontières entre humanité et machine, dans un roman intéressant.
Ah, garder toute la vie l’apparence de ses 20 ans ! En 2320, c’est un rêve devenu réalité. Le traitement garantit même dix vies de bonne qualité, à la condition d’opérer un reset au bout de 75 ans pour repartir à zéro en coupant tous les liens avec son passé. Certes, on manque un peu de recul sur la technologie, mais personne ne s’en est encore plaint. Alors que Jinseï vit son premier reset, tiraillé entre un passé avec lequel il a interdiction de renouer et un présent où tout est à reconstruire, il découvre peu à peu les embûches et les limites de ce pacte aux relents faustiens.
Un roman au parti pris original
J’ai tout de suite accroché à cette société future, où l’humain poursuit son rêve d’immortalité. J’ai retrouvé dans ce roman ce que j’avais apprécié dans le précédent récit de Lou Jan : une réflexion intéressante sur des êtres hybrides, repoussant les limites de l’humanité.
On y suit la renaissance de Jinseï, ses émerveillements et ses doutes. L’autrice décrit avec justesse les conflits intérieurs de ce personnage, déchiré entre son envie de traverser les siècles et le manque de ceux qu’il a aimés le plus au monde.
Des personnages attachants
J’ai ressenti beaucoup de tendresse pour certains personnages, Jinseï en tête. Il n’a pourtant rien de manichéen et ne semble pas particulièrement sympathique de prime abord, mais c’est aussi ce qui fait le charme des protagonistes. Ils sont rugueux, vivants, chacun cherchant une place parfois difficile à trouver au fil des existences qui se succèdent.
Une tournure inattendue
En lisant le résumé, je m’attendais à découvrir un récit réfléchi, explorant les questionnements inhérents à cette question de l’immortalité. Un récit qui interroge, en somme, sur les désirs, les conséquences et les risques d’un souhait aussi démesuré. Je n’ai que peu retrouvé cet aspect-là. Un corps d’avance se transforme rapidement en roman de suspense et d’aventure. Le mystère nous tient certes en haleine jusqu’à la fin, mais il exploite relativement peu, en définitive, le postulat de départ.
Avec Un corps d’avance, Lou Jan signe donc un roman intéressant, au scénario bien ficelé !
