Une longue nouvelle par l’autrice de If We Were Villains qui séduit.

Chaque soir, dans le vieux cimetière de l’université, le chemin de cinq travailleurs de nuit se croise : un barman, une conductrice de véhicule de covoiturage, une réceptionniste d’hôtel, le gardien de l’église délabrée qui se dresse au-dessus d’eux, et la rédactrice en chef du journal de l’université, toujours en quête d’un sujet d’article. Par une sombre nuit d’octobre, ils découvrent dans le cimetière de l’église désaffectée un nouveau trou. Une tombe fraîche et ouverte là où il ne devrait pas y en avoir. Qui l’a creusée, et pour qui ?
Avant qu’ils ne repartent chacun de leur côté, le fossoyeur revient. En passant la nuit à le filer, ils découvrent qu’il pourrait être la clé d’une série d’événements étranges survenus en ville qui font la une des journaux depuis quelques semaines… et qu’ils sont peut-être plus proches de ce mystère qu’ils ne le pensaient.
Une ambiance inquiétante
Un vieux cimetière, un trou incongru et récent, une enquête à mener autour d’un fossoyeur en une seule nuit. Tel est le postulat de départ de cette longue nouvelle et l’autrice parvient à nous entraîner, notamment grâce à son univers, dans cette aventure. Sombre, inquiétant, ce texte vient, à l’aide des mots choisis par sa créatrice, nous saisir par son ambiance si particulière. Cela fonctionne parfaitement de bout en bout et on plonge dans ce bain de noirceur avec délice.
Des personnages criants de vérité
La galerie des personnages proposés par M. L. Rio, ces insomniaques traînant dans le cimetière de l’université, sont impressionnants. On alterne les points de vue, on prend plaisir à les découvrir chacun leur tour avec leur passé, leur futur plus ou moins destiné,… Qu’il s’agisse de Edie, la rédactrice en chef incapable de dormir, ou bien de Tuck et de sa fuite en avant, ou encore de Théo le barman, chacun sait séduire à sa façon, avec ses qualités et ses défauts. J’ai vraiment du mal à déterminer lequel a ma préférence mais je pense que si je devais vraiment choisir je partirai sur Théo et Tamar. Ces deux là fonctionnent parfaitement, leur style de vie me correspond et le cynisme dégagé par Tamar est parfait de bout en bout. Mais chacun a largement sa place dans le récit.
Un final qui déçoit légèrement
C’est le gros reproche que je fais aux auteurs anglo-saxons : ils ne savent pas finir une nouvelle. A chaque fois j’ai cette sensation de « pas assez », comme si ils bouclaient l’histoire pour la terminer, mais à contrecœur. Et c’est un peu dommage car Graveyard Shift a vraiment su me séduire jusqu’à ce final presque trop facile. Cela reste un superbe exercice littéraire et de style de la part de l’autrice, c’est certain, mais j’aurais aimé un final plus flamboyant.
Graveyard Shift est au final une excellente surprise : la novella est très agréable à lire, les personnages sont crédibles, l’ambiance fantastique bien présente et le découpage chronologique intéressant. Même le bémol d’un final un peu facile ne vient pas entacher cette lecture.