Entretien avec Jean-Luc Marcastel

Nous ne présentons plus Jean-Luc Marcastel, auteur cantaloup de grand talent, à qui l’on doit des séries comme Louis le Galoup, la trilogie du Simulacre ou encore plus récemment un Pape pour L’apocalypse. Nous avons eu la chance de le rencontrer au Salon Livre Paris de 2018 où il s’est confié à nous.

 

Pouvez-vous vous présenter ainsi que votre parcours d’écrivain ?

Me présenter ?

Voyons…

Je suis Jean-Luc Marcastel. Je suis né en 1969 (l’année où on a marché sur la lune mais c’est une coïncidence) dans les Hautes Terres du Cantal. En la bonne ville d’Aurillac.

Comme chacun le sait, le climat y est assez rude. On y chasse encore le Mammouth ou le Rhinoceros à poil laineux, parfois même le Gastornix, les bonnes années. On y pratique des activités de plein air et une gastronomie authentique (les mauvaises langues disent « lourde » mais ce sont juste des petits jaloux) avec des plats aux noms qui font rêver comme « La Truffade » ou « Le pounti » et des fromages au goût puissant… D’un tempérament assez rêveur et solitaire, et lassé de jouer au rugby (le sport national) avec les ours des cavernes, j’ai un jour attrapé le virus de l’écriture qui ne m’a, depuis, jamais laissé et m’a apporté mille joies et supporté dans toutes mes épreuves… J’ai commencé à écrire à l’âge de 9 ans… Un jour, mon père, lassé de me voir lire des bandes dessinées, m’a mis un livre dans la main en me disant « Lis ça ». C’était un livre sans images… J’ai renâclé, puis j’ai commencé la première page, puis la seconde… après j’étais pris, je l’ai fini d’une traite… Et j’ai lu les autres, tous ceux qu’il avait dans sa bibliothèque.

Ce livre, c’était « Pour Patrie l’Espace » de Francis Carsac, que j’aime toujours autant. Mais quelque chose m’est rapidement apparu… J’avais envie, à mon tour, d’être le héros des histoires que je lisais… Mais je ne connaissais aucun auteur pour s’intéresser à mon sort. Or, un jour, une de mes tantes (plus ma grande sœur que ma tante, qui a presque mon âge, j’ai une famille compliquée, « une famille chat » comme on dit) me raconta un de ses rêves, un rêve assez loufoque avec des robots des monstres, etc.  Ça m’a donné une idée. La semaine j’ai repris tous ces éléments et je les ai mis en forme pour écrire une petite nouvelle de quatre pages, je nous y mettais en scène avec nos cousins et nos copains et il nous arrivait plein d’aventures. Le week-end suivant je la lui ai lue… Elle a adoré et elle m’a dit : « C’est génial. Tu ne voudrais pas en écrire une autre ? »

J’en ai donc écrit une autre, et je lui ai lue le week-end d’après… et j’ai continué. Tous les six mois, nous retrouvions nos cousins de Paris et de Toulouse, et je leur lisais les histoires que j’avais écrites pendant ces six mois, des histoires où je nous mettais tous en scène. J’ai commencé par des petits cahiers, puis continué avec de gros cahiers… Puis des feuilles blanches quand les cahiers n’ont plus suffi et que j’ai eu ma première machine à écrire…  Enfin, je me suis caché derrière des personnages (mais dans lesquels il reste toujours un peu ou beaucoup de moi).

Jusqu’au jour où m’est arrivé un évènement très important dans la vie de chaque écrivain… J’ai lu un livre, et je me suis dit : « Franchement, j’écris mieux que ça. Si cette personne est éditée, alors pourquoi pas moi ? » De ce jour j’ai décidé d’envoyer mes livres à des éditeurs… Commença alors le long parcours du combattant qui devait me mener où j’en suis maintenant.

Comme tous mes confrères, j’ai reçu l’habituelle lettre de refus, cette lettre stéréotypée que nous avons tous reçue au moins une fois et qui doit être la même chez tous les éditeurs de France et de Navarre. Nous la connaissons par cœur : « Madame/Monsieur, nous vous remercions de la confiance que vous accordez à notre maison d’édition. Malheureusement, malgré les qualités évidentes de votre texte, nous sommes au regret de vous dire qu’il ne rentre pas dans les cadres de notre collection…. Veuillez agréer, Madame, Monsieur… » Je me rassurais en me disant que certains grands auteurs, eux aussi, en ont toute une collection.

Un jour, en 2000, le téléphone a sonné, c’était Stéphane Marsan, des éditions Bragelonne, qui me rappelait pour « Chant de neige et de Sang » (un texte qui n’a pas encore été publié). Nous ne l’avons alors pas publié ensemble, mais avons gardé de très bons rapports. En 2003, ce sont les éditions Gallimard qui m’ont rappelé pour Louis le Galoup. Le livre était monté en comité de lecture, mais a échoué à une voix. Parfois c’est comme ça… Encouragé par ces semi-réussites, j’ai donc poursuivi, et le Galoup a fini par sortir chez un éditeur de province, les 3 Épis, en 2003… Le Galoup a connu un beau succès, mais malheureusement mon éditeur, suite à différents avatars, a cessé son activité alors que le tome 5 était encore à paraître. J’ai cherché un repreneur et, finalement, à la demande des lecteurs, j’ai décidé d’éditer le cinquième et dernier tome du Galoup en autoédition.

Mais un jour, alors que je désespérais de retrouver un nouvel éditeur, le téléphone a sonné. C’était une dame, qui se présenta à moi comme une lectrice du Galoup, d’Angers, qui avait découvert mon livre en venant en vacances dans ma région. Elle disait l’avoir adoré et connaître une personne travaillant dans le dessin animé qui raffolait des histoires de Loup Garous. Cette personne, c’était Jean-Mathias Xavier, à qui elle avait raconté le livre dans le train de Paris à Angers (avec force gestes et grognements, il paraît que tout le wagon en avait profité). Jean-Mathias avait adoré l’histoire, mais lui avait dit qu’il fallait d’abord contacter l’auteur pour savoir s’il disposait des droits audiovisuels. Elle m’avait donc appelé. Elle m’envoya des dessins que Jean-Mathias avait faits des personnages, que j’ai trouvé très chouettes. Elle nous a mis en contact. J’ai dit à Jean-Mathias qu’avant toute chose je recherchais un éditeur. Il se trouve qu’il en connaissait un : Matagot, qui cherchait une série à éditer. Il nous mit en contact… Et la nouvelle vie du Galoup commença, avec le succès qu’on sait. Clara Dupont Monod, journaliste à Marianne, à France Inter et à Canal + (et auteure, entre autres de “Le roi disait que j’étais diable” nominé au prix Renaudeau et Goncourt en 2014) remarqua le livre et lui consacra une page entière dans Marianne lors du salon du livre de Paris et 5 minutes à la matinale de Canal+… Je ne remercierai jamais assez Clara pour tous ses bienfaits et son soutien indéfectible.

Après le Galoup, j’enchaînais Frankia, chez Mnemos, puis Le Dernier Hiver et Un Monde pour Clara, Alban, Le Simulacre (qui remporta le Grand Prix de l’Imaginaire aux festival des étonnants voyageurs à Saint Malo et le prix de l’Uchronie à Sèvres en 2015), Praërie chez Scrineo, Les Enfants d’Erebus, chez J’ai Lu, Tellucidar chez Scrineo, L’Auberge entre les Mondes chez Flammarion, Un pape pour l’Apocalypse chez Pygmalion, puis, cette année, Les Chroniques de Pulpillac chez Lynks et Le Retour de la Bête chez Gulfstream… En tout 28 livres pour l’instant, et d’autres à venir…

Parlez-nous d’un de vos romans

Je vous parlerais de Louis le Galoup bien sûr, le plus emblématique et le premier de mes romans à être publié et celui qui m’a fait connaître. L’histoire d’un jeune homme, dans une France médiévale imaginaire brisée en deux par un cataclysme, qui se découvre un jour la malédiction (ou le grand pouvoir) d’être Galoup (loup Garou) et à qui on va dire : « Tu as un grand pourvoir, mais tu ne pourras pas t’en débarrasser. Contrairement à ce que tu penses, ce n’est pas une malédiction, mais un pouvoir qui te vient de ton père. Cela veut dire que tu vas devoir apprendre à vivre avec cette bête intérieure, la dompter, en faire un instrument de bien plutôt que de mal. Si tu y parviens, tu pourras peut-être utiliser ce pouvoir pour sauver le royaume de l’usurpateur qui s’est emparé du trône, mais pour cela tu vas devoir fuir et te cacher. Il sait que tu existes, et maintenant que tu t’es révélé, il va envoyer ses barons à ta recherche…

Ainsi commence la quête de Louis, qui va fuir son village avec son frère et une jeune fille de rencontre, un peu rouquine, un peu sorcière, au caractère impossible… Un vrai personnage féminin, pas un simple faire valoir pour le héros.

Bref, le Galoup est une quête initiatique, une allégorie sur cette part d’animalité qui est en nous, que nous devons tous apprendre à dompter et à domestiquer pour en faire une force créatrice plutôt que destructrice. Une histoire qui s’inspire des contes et légendes du sud de la France, une fantaisie dans les pas de Tolkien, mais par les chemins du pays d’oc…

Dans cette série, et c’est vraiment sa particularité, j’ai aussi voulu retrouver le ton des conteurs à la veillée, une espèce d’oralité écrite qui fait que le lecteur à l’impression d’être assis au coin du feu et qu’on est en train de lui raconter cette histoire à haute voix.

Quelles ont étaient les sources d’inspirations pour ce roman. Vos sources d’inspirations en général ?

Pour celui-là, mon pays, en premier, ses légendes, ses paysages, ses châteaux, les livres de Claude Seignolle, mon maître en menteries et un de mes auteurs favoris, les traditions orales des contes à la veillée.

On y traverse donc des lieux que j’aime, qui m’ont inspiré, ou ont compté dans ma vie. J’y ai également mis les personnes que j’aime, certaines très proches, que j’ai souhaité retrouver dans ces pages. Mais aussi d’un désir de dire des choses importantes à mon fils, à ma femme, des choses que je croyais avoir compris de la vie…

En règle générale, comme tous les auteurs, je suis une éponge, mes histoires se nourrissent des évènements qui se produisent dans ma vie, bons ou mauvais, et m’aident à les exorciser, quand ils sont trop terribles, à les sublimer. Je compare souvent l’auteur à une huître perlière. Quand un corps étranger l’irrite, l’huître produit la substance qui va créer la perle pour entourer ce corps étranger et ainsi se soulager. Pour les auteurs c’est la même chose, nous entourons la douleur ou nous sublimons nos joies avec nos rêves… Cela produit des perles aussi… Parfois Blanches, parfois noires.

Une chose est sûre, mon enregistreur n’est jamais au repos, et tout ce que je vis, vois, entends ou sens peut potentiellement servir de matière première à un récit et je peux dire maintenant que parfois, la réalité dépasse la fiction…

Un coup de cœur à nous partager ?

Un de mes livres préférés « La Plaie » de Nathalie Henneberg. Un space opera onirique, poétique et terrible, que je relis régulièrement.

Bière ou vins ?

La bière pour mes origines Arvernes, le Vin pour mes origines latines. Pourquoi choisir ? En bon gaulois que je suis, j’apprécie les deux.

 

En bonus ma chronique de l’auberge entre les mondes ATTENTION SPOILER j’ai adoré

 

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