En attendant la sortie de Pirates des Caraïbes 5: la vengeance de Salazar prévu le 26 mai, Kevin et Arwen refont un tour d’horizon des épisodes précédents pour se remettre un peu dans l’ambiance!
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Port-Royal est en plein ébullition : la fille du gouverneur, Elizabeth Swan, vient d’être enlevée à bord du terrifiant Black Pearl du Capitaine Barbossa. Aidé du fantasque Jack Sparrow, le jeune forgeron William Turner se lance à la recherche de la belle dont il est secrètement amoureux.
Si l’on excepte Pirates ! de Roman Polanski et le naufrage commercial de Renny Harlin L’Ile aux Pirates, les films de flibustiers se sont faits rares sur nos écrans depuis une bonne vingtaine d’années. Le genre du film de pirates, comme le western ou le péplum, semble ne devoir vivre qu’à travers d’erratiques tentatives de résurrections. Un constat assez triste alors même que ces trois genres ont écrit certaines des lettres de noblesse du cinéma actuel.
Alors forcément, quand l’omnipotent Jerry Bruckheimer décide de s’y pencher, on craint le pire : l’homme est à la tête de nombreux blockbusters à la qualité très inégale. Peut-il nous livrer un film intéressant ? Où nous proposera-t-il une bouillie clippesque du niveau de 60 secondes chrono et tant d’autres, ses standards de l’époque ?
La réponse est simple et correspond assez bien à la définition de ce Pirates des Caraïbes : c’est du divertissement qui fait correctement son travail. On peut épiloguer sur l’incapacité de ce film de pirates à lutter avec ses glorieux aînés emmenés par les stars d’un temps lointain. L’optique choisie par Disney et Bruckheimer n’a que peu de rapports : si ce Pirates des Caraïbes emprunte les codes du genre, il les détourne afin d’illustrer une comédie. La Malédiction du Black Pearl ne souhaite que nous divertir, en adaptant à l’écran une attraction des parcs Disney. Il ne sera donc question ni d’ambiance poisseuse ni de massacres avec des corps encore fumants, mais bien d’un film bon enfant reprenant tous les mimiques de ce type de longs métrages, du combat à l’épée aux grands abordages.
Bruckheimer y ajoute un réalisateur compétent, enrobe le tout du talent de quelques noms connus, un couple de jeunes acteurs et le tour est joué ! Le producteur connait bien la recette des films de l’été. Quand ce premier épisode réussit enfin à être divertissant, qu’il n’échoue pas dans la course démonstrative que se livrent les studios, il détient les clés d’un gros succès.
Et si Pirates des Caraïbes est si plaisant, il doit beaucoup au flamboyant Johnny Depp, interprète du capitaine Jack Sparrow. L’enthousiasme de Depp est très communicatif dans un rôle de pirate maniéré qui tente constamment à sauver sa peau. Oui, Sparrow est narcissique et recherche surtout son propre intérêt. Mais quand pointe le danger, il sait aussi faire face et prendre ses responsabilités. C’est bien simple, le film se bâtit autour de lui et Depp enlève toutes les scènes où il est présent. Il dispose des meilleurs dialogues, du plus beau duel, des situations les plus cocasses. À partir de là, le charisme naturel de l’acteur phare de Tim Burton fait le reste. Sparrow EST tout l’intérêt de ce Pirates des Caraïbes, gigantesque Depp Show de deux heures.
On ne se rend pas vraiment compte du décalage de Sparrow par rapport aux héros de la période fin 90/début 2000 : Depp donne à son personnage un caractère irrévérencieux. À côté des Maximus, Leonardo « Jack » DiCaprio ou même les Bad Boys de Michael Bay, tous bien propre sur eux et avec une morale irréprochable, Jack Sparrow s’impose comme un antihéros. Il n’est pas là pour les grandes causes et les laisse volontiers à William Turner. Non, Sparrow est un héros égoïste. Si on ajoute le caractère différent du personnage, très coloré grâce au jeu outré de Depp, on retrouve un cocktail hors norme pour l’époque qui plait au public.
Forcément, il ne reste que peu de place aux deux stars à l’affiche : Keira Knightley (Elisabeth Swan) et Orlando Bloom (William Turner). Ils remplissent leur rôle sans faire de vague, et même Bloom est crédible en pirate en apprentissage. Les seconds couteaux, Barbossa (excellent Geoffrey Rush) ou le Gouverneur Swan (Jonathan Pryce) en tête, se font rares et c’est bien dommage. Barbossa est un personnage savoureux, haut en couleur, le seul apte à concurrencer Sparrow grâce, notamment, à quelques dialogues qui font mouche.
L’autre grande réussite de La Malédiction du Black Pearl vient des effets spéciaux, une belle performance de la part des studios ILM. Les squelettes de l’équipage du Black Pearl sont impressionnants, les plans retouchés assurent le spectacle, à l’image de cette scène où ils marchent au fond de la mer. Les mêmes effets donnent un excellent rendu visuel à l’affrontement final entre Sparrow et Barbossa, où l’éclairage de la lune pointe quelques visions squelettiques du meilleur goût.
L’ambiance aurait pu d’ailleurs se rapprocher une ambiance plus sombre, si la reconstitution de lieux comme Port royal ne faisait pas tant décors propres et sans éclats. Mais Tortuga ou la caverne du trésor maudit sont bien plus réussis, plus crédibles, et surtout plus enchanteurs. Les bateaux semblent eux très crédibles, même si le travail autour du Black Pearl aurait pu être plus conséquent tant il manque d’identité dans ce premier opus.
On pourrait revenir sur la musique redondante — mais paradoxalement riche de nombreux thèmes, cependant on peut l’excuser au vu des évènements qui ont amené Klaus Badelt à travailler sur le film très peu de temps avant sa sortie. Alan Silvestri (Les Retours vers le Futur, Forrest Gump, Avengers…) a tout simplement été renvoyé par Bruckheimer dont les productions sont généralement mises en musique par la société MediaVentures/Remote Control, le studio de Hans Zimmer. Résultat : Badelt n’avait que quelques semaines pour composer plus de deux heures de musique et a utilisé toutes les ressources à sa disposition. Ce ne sont pas moins de huit compositeurs additionnels qui sont crédités (dont Nick Glennie-Smith ou Steve Jablonsky et probablement Hans Zimmer lui-même), signe d’un travail en équipe rondement mené où ils se sont inspirés de nombre de compositions antérieures.
Prenons par exemple le thème principal, He is a pirate, qui renvoie nettement au thème héroïque de Gladiator.
Conclusion
Action, comédie, personnages charismatiques, Pirates des Caraïbes : la malédiction du Black Pearl a tout du divertissement maîtrisé, du blockbuster estival calibré. Le terme blockbuster n’a rien de péjoratif : la production a des moyens, les acteurs présents sont des stars, le film a pas mal d’action et un scénario pas franchement original, mais très efficace. Tout pour nous vider l’esprit pendant deux heures et quelques, où l’on pardonnera de légères longueurs vers le milieu du film.
Pirates des Caraïbes : la Malédiction du Black Pearl
Réalisé par Gore Verbinski
Avec Johnny Depp, Orlando Bloom, Keira Knightley, Geoffrey Rush, Michael Pryce
Produit par Walt Disney Studios
DVD et Blu-ray disponibles