Entretien avec Feldrik Rivat, auteur de la Trilogie des Kerns

Copyright : Philippe Bertheau

Feldrik Rivat est, n’en déplaise à certains, l’une des têtes montantes de la fantasy française. Sans faire de bruit, en proposant sa sympathie et son talent littéraire, il est parvenu à se faire une place dans le paysage éditorial et j’ai donc décidé de lui poser quelques questions par mail (ce bougre habitant le plat-pays et étant toujours en vadrouille, la seule autre solution aurait été de le ligoter). Une interview surprenante, sincère et décalée, comme il convient pour cet auteur atypique et drôle.

eMaginarock : Bonjour Feldrik, et merci de prendre quelques minutes pour répondre à mes questions. Pourrais-tu brièvement te présenter pour nos lecteurs qui ne te connaissent pas encore ?

Feldrik Rivat : Bonjour à vous et aux lecteurs d’eMaginarock ! Me présenter… voilà un exercice que j’affectionne, hum. Ce qui me définit le mieux est « touche-à-tout ». Je suis un scientifique féru d’art, ou un artiste féru de sciences. Archéologue de formation, de métier même, car j’ai exercé quelques années l’archéologie de terrain (archéologie préventive), avant de ranger ma truelle, par choix, et me consacrer complètement à l’écriture. Ma spécialité était la préhistoire récente, même si ma passion des mondes anciens me porte de plus en plus sur des périodes comme la protohistoire proche-orientale, l’âge du fer européen ou le médiéval japonais… Archéologue, donc, mais pas seulement. J’ai aussi suivi une solide formation en graphisme et illustration, à Lyon, et j’ai pratiqué l’illustration en indépendant pendant des années, peignant de la faune et de la flore pour les réserves, les parcs naturels et autres associations de sauvegarde et de mise en valeur du patrimoine naturel.

Mais en plus d’être « touche-à-tout », j’ai le défaut d’être insatiable. De ne pas tenir en place. D’avoir sans cesse besoin de nouveaux défis, d’être mis en danger. Ayant eu la chance de pouvoir pratiquer en même temps mes trois activités, l’archéologie, avec un bon poste et des perspectives, l’illustration, avec des clients fidèles et réguliers, et l’écriture, avec la rencontre de mon éditeur actuel, Dimitri Pawlowski, j’ai pu choisir la voie la plus escarpée en toute conscience… L’écriture. Et vu mon parcours, vraiment, c’est un acte de folie ! Je le reconnais, et je commence à mieux l’assumer !

eMaginarock : Tu viens de finir ta tournée d’hiver des librairies pour tes dédicaces. N’est-ce pas trop dur d’être en permanence sur la route sur cette période ? Comment le vis-tu à la fois personnellement et dans ton processus créatif ?

Feldrik Rivat : Ce point est très rarement abordé, et vraiment, merci pour cette question. On parle d’art, de création, de passion, mais rien de tout cela n’est possible sans générer de l’argent, sans création de valeur. Deux voies sont possibles dans tout métier touchant aux arts, d’un côté le métier alimentaire laissant dans le meilleur des cas un peu moins d’un tiers de temps utile à l’exercice de son art, et de l’autre la prise totale de risque consistant à exercer son art à plein temps, et de le faire dans des proportions parfois inconcevables. Du moins, tant que le succès au sens médiatique du terme n’est pas au rendez-vous. Je suis dans la deuxième situation, avec le choix d’avancer avec obligation de résultat. Je dois vendre des livres pour manger et payer mes factures, je le fais le plus souvent avec la boule au ventre, mais c’est le prix, aussi, d’une liberté certaine et d’un privilège immense, celui de marcher sur ma propre route.

La dédicace, en tant qu’auteur inconnu du grand public, est un exercice difficile, long, et le plus souvent ingrat. Il faut prendre la chose avec philosophie, souffler et un bon coup, et accepter de n’être rien d’autre que ce que la personne qui passe devant votre table imagine que vous êtes… Et comme je dois vendre du livre, j’endosse ici le rôle de l’alpagueur, un rôle usant moralement et physiquement. L’exercice porte ses fruits, c’est ma 4e saison de dédicace et j’en suis au chiffre symbolique de 500 jours passés depuis le premier en librairie ou autre grande surface. 5000 heures passées à parler de mon travail, et des milliers de lecteurs convaincus, les yeux dans les yeux, acceptant de me faire confiance, de tenter l’expérience. C’est à chacun d’eux que je dois de pouvoir continuer à avancer, et ils ont tous la particularité, quels que soient leurs profils, d’avoir ce je ne sais quoi d’esprit pionnier et de ne pas se contenter de suivre les tendances ou de consommer uniquement du gros succès commercial bien rôdé. Ces efforts de la première heure commencent à porter leurs fruits. De ce bricolage initial, il reste maintenant un réseau professionnel et durable sur lequel je m’appuie, mais il me tarde de passer à l’étape suivante, celle d’avoir un véritable relais en librairie, d’avoir l’estime du libraire qui mettra mes livres en rayon parce qu’il connaît mon travail et l’apprécie. Cette étape est à un cheveu, mais il faut toujours avoir à l’esprit qu’il est très rare, pour un écrivain, de la franchir…

Donc la dédicace est un moyen efficace d’avancer, mais pratiquée comme je la pratique, c’est usant et je mets environ un mois complet à me remettre de chaque saison. Il faut imaginer parler de son travail en moyenne 90 heures par semaine pendant 4 mois consécutifs… Je dois expliquer en quelques mots mon parcours, dessiner à grands traits mes univers, et présenter mes ouvrages en moyenne 200 fois par jour… À raison d’une ou deux minutes par présentation, ça revient à parler plus de 6 heures par jour, et surtout, à répéter inlassablement la même chose. Le problème de cet exercice est que le cerveau humain est conçu entre autres choses pour se spécialiser… Et se spécialiser à répéter la même chose tous les jours durant 4 mois d’affilée revient à de la lobotomie. Autant dire que je ne pourrai pas poursuivre cet effort sur le terrain trop longtemps, ayant trouvé ici des limites bien tangibles à ce qu’il est humainement possible de faire !

En conclusion, je croise fort les doigts pour avoir une once de talent et un minimum de lecteurs pour le découvrir !

Après… les heures durant lesquelles la solitude me gagne en dédicace, faute d’affluence, j’en profite pour jeter mille idées sur le papier, une matière première très précieuse quand je me remets derrière mon clavier ! Et dernier point… Passer des milliers d’heures en librairie, au contact des libraires, des livres (en fond et nouveautés), et des lecteurs est particulièrement enrichissant sur le plan humain, et permet, si c’est encore possible, de sentir les tendances…

eMaginarock : Revenons sur ton succès récent. Ta trilogie des Kerns a été republiée en poche cette année, deux nouveaux romans dans des univers steampunk sont parus. Comment ressens-tu cet enchaînement de publication et le succès qui s’ensuit ?

Feldrik Rivat : À l’image de ce qu’est ma vie, j’avance à marche forcée. Au regard du monde du livre, les choses vont très vite, et pourtant, j’ai l’impression qu’elles traînent ! Il faut dire que j’ai commencé mon projet « Kerns » en 2002, ce qui relativise la récente accélération de ma carrière. Mais les choses vont dans le bon sens, et je perçois la parution en poche des Kerns de l’Oubli comme un adoubement : J’ai Lu, c’est-à-dire Flammarion, groupe Gallimard, reconnaît par là la qualité d’un travail et choisit de l’intégrer dans ses collections. Il donne par la même occasion crédit au travail de mon éditeur, ce qui dans le monde du livre est loin d’être anecdotique. Sans compter que ce passage en poche permet de toucher un autre lectorat, avec un prix plus accessible, de la même manière, d’ailleurs, que le passage en numérique.

En définitive, ce rythme de publication est un peu un passage obligé pour asseoir mon début de carrière. Il s’agit de montrer que je ne suis pas l’auteur d’un seul livre, et que je ne suis pas non plus enfermé dans un style ou un univers en particulier. Il s’agit aussi d’avoir une présence régulière en librairie et de pouvoir offrir plus d’un titre au lecteur qui découvre mon travail. Dernier point, je suis encore assez jeune, et je profite de cette énergie qui me permet de travailler 10 à 14 hures par jour, surtout dans les phases de premier jet. Vous avez tous en tête ce geste particulier du calligraphe japonais ? Ce geste qui consiste à tracer un idéogramme d’un seul mouvement, ou du moins en restant dans la même énergie, la même concentration ? Sur une échelle un peu plus longue, je conçois l’écriture d’un premier jet de la même manière, ce qui réclame une très bonne forme physique…

eMaginarock : Quel est le ressenti des lecteurs sur tes écrits ? Comment cela t’aide-t-il à avancer ?

Feldrik Rivat : Question intéressante… Je serais presque tenté de répondre que chaque lecture est une expérience individuelle, surtout concernant un auteur inconnu. Mon lecteur type est un lecteur qui se fait sa propre opinion, qui a confiance en son jugement, et qui est ouvert à la découverte. Par là même occasion, il accepte de trouver quelque chose qui peut potentiellement sortir des schémas classiques, ce qui résume assez bien mon écriture de manière générale. Dans les grandes tendances, ce ressenti révèle deux choses, la solidité de l’écriture et la densité des univers. Le lecteur qui aime mon travail l’aimera car il est artisanal, au sens noble du terme. Les matières sont naturelles, le texte est sans effet ni artifice, et le tout dénote d’une certaine authenticité dans la démarche. On n’est pas dans le calibré commercial, pour le dire simplement.

Est-ce que ce ressenti m’aide ? Ben non… au mieux il conforte mes tendances naturelles, au pire il me fait râler quand un lecteur passe complètement à côté du texte. Rien de bien extraordinaire, quoi. Mais parfois, il se trouve des lecteurs plus pointus ou attentifs pour venir relever un élément qui, sans que je ne sache vraiment pourquoi, va avoir un écho dans mon travail.

En définitive… mon lectorat est tout de même assez conforme à mes attentes, ce qui n’est pas pour me rassurer, paradoxalement, car si c’est un lectorat de nature à produire des succès d’estime, de ceux que l’on redécouvre parfois des décennies plus tard (trop tard du point de vue de l’auteur), il n’est pas de ceux qui permettent de voir s’envoler les ventes ! Si j’étais intelligent, je changerais vite de logiciel pour me tourner vers des projets plus abordables. Mais comme je ne le suis pas, je vais poursuivre l’effort dans cette voie encore quelques années, avant, peut-être, de me concentrer sur des projets plus consensuels… (scénarios plus simples, univers plus lissés, écriture moins à contre-pied). Mais encore faut-il avoir le talent de le faire correctement !

eMaginarock : Où en es-tu justement de ton écriture en ce moment ? Quels sont tes prochains projets ?

Par définition, je suis toujours en retard… oui, je fais partie de cette catégorie dite des « précrastinateurs », ce qui est loin d’être reposant. Alors, un petit état des lieux du projet actuel… il s’appelle Paris-Capitale, c’est un one-shot (horrible anglicisme auquel on ne trouve guère mieux que « volume unique » pour le remplacer), et il fait suite dans l’idée à La 25e Heure et au Chrysanthème Noir. L’objectif est de présenter un roman qui peut se lire indépendamment des autres pour qui ne me connaît pas, et d’offrir l’uchronie promise par le diptyque précédent à qui me connaît. Simple, quoi. Nous serons en 1910, dans un Paris planté de gratte-ciels, une cité aérienne et une vie en surface un peu chamboulée par les aléas climatiques. La vie et la société tourneront autour d’un rapport très étroit entre les morts et les vivants… Pas de zombies ni de morts-vivants, mais le retour, par le biais de technologies précises, des grands esprits d’antan, avec un partage en condominium du monde réel. Ladite technologie étant une exclusivité française, Paris se retrouve à être le seul endroit au monde où ce postulat peut être respecté, et commence à attirer à elle toutes les intelligences, pour le meilleur et pour le pire…

Utopie, uchronie, un Paris très art-déco revisité et un mélange entre science et fantastique qui cette fois nous fait clairement basculer dans un univers imaginaire (là où il était encore historique dans La 25e Heure et Le Chrysanthème Noir) : il ne reste plus qu’à l’écrire !

eMaginarock : Comment se déroule le travail éditorial avec ton éditeur ? Te laisse-t-il la liberté de créer comme tu l’entends ?

Feldrik Rivat : Chouette question, encore une fois ! Dans la vie, il faut avoir un peu de chance, sinon, tout est vraiment plus compliqué. Ma chance n’est pas celle d’avoir rencontré un homme capable d’influer les ventes en librairie et de faire ou défaire un best-seller, mais plutôt celle d’avoir rencontré quelqu’un capable de me faire évoluer de fond en comble dans mon travail. Il a senti un potentiel, il a donné au départ de sérieuses impulsions pour rayer les défauts et mettre en valeur les qualités. Dans le monde des arts, avoir un vis-à-vis, un collaborateur capable de réaliser cette prouesse est la chose la plus importante ! Le reste n’est que question de temps, d’énergie, et parfois d’argent.

Ici, mon éditeur (Dimitri Pawlowski, l’homme de l’ombre qui se cache derrière les éditions de L’Homme-Sans-Nom), me laisse aujourd’hui une liberté complète sur mes projets, les encourage, et les attend avec l’impatience d’un lecteur. On discute de tout, bien évidemment, on réfléchit beaucoup, mais le fait d’avoir pour lui une maison à échelle humaine lui permet aussi de prendre le plus grand des risques, celui de ne pas plaire à tout le monde. C’est vendeur, ça, comme argument… Et pourtant ! C’est bien dans cette catégorie que l’on peut potentiellement trouver ce qui fera les succès de demain, et c’est bien la raison pour laquelle cet éditeur commence à s’attirer les regards de la profession. Ma chance est donc de l’avoir rencontré au bon moment, là où il était encore accessible et pleinement dévoué (il appréciera !)

En terme de travail, c’est un éditeur que je qualifierais d’« à l’ancienne », dans le sens où sa grande force est son regard sur le texte en lui-même, l’écriture. La phase de correction éditoriale est sévère et dense (c’est un cagneux), et la moindre virgule peut se retrouver le sujet d’âpres discussions… Mais le grammairien qu’il est ne capitulant jamais, j’ai appris avec le temps à reprendre systématiquement ma copie pour ne pas céder à la concession, pour mon plus grand bien. Pour information, mon premier exercice au moment d’entrer dans sa maison est d’avoir dû réécrire intégralement mon roman, le premier opus des Kerns de l’Oubli… pour le purger du moindre mot qui n’était pas essentiel (6 mois de travail et plus de 15% de texte en moins).

Après, c’est un infatigable optimiste et un enthousiaste de nature !

eMaginarock : Comment travailles-tu les aspects graphiques et couverture avec ton éditeur ?

Feldrik Rivat : Ah, quel point délicat que celui de la couverture ! Surtout dans une petite structure où cette couverture est souvent l’unique argument rencontré par le lecteur de passage dans les rayons d’une librairie… Il faut viser juste, au centre de la cible, sans décourager ceux qui gravitent autour de ce centre. Ma grande chance, encore une fois, est celle d’avoir un éditeur qui aime le bel objet, et qui commence sérieusement à avoir les moyens financiers de ses ambitions. Le lecteur ne le sait pas, mais le moindre effet, sur une couverture, un vernis sélectif, une encre un peu particulière, une qualité de papier autre, sont autant de cadeaux que fait un petit éditeur.

Aujourd’hui, on réfléchit avant chaque projet, souvent près d’un an à l’avance. On choisit les collaborations possibles, faisant appel à des illustrateurs contents de travailler pour une maison qui comprend l’importance de leur rôle, incluant ici une dimension artistique.

Mais ça reste un long apprentissage pour trouver le bon équilibre entre le fond, ce que doit raconter l’image, la forme, l’impression première qui doit s’en dégager, et le résultat final, la tenue en main de l’objet… en terme de collaboration, je remercierais surtout Julien Delval, pour les nouvelles couvertures des Kerns de l’Oubli (un travail à la gouache d’une qualité rare), et Élian Black’Mor qui, avec La 25e Heure et Le Chrysanthème Noir, nous a livré des visuels que le monde du cinéma ne renierait pas !

De mon côté, ayant toujours croqué quelques croquis de mon cru pour illustrer mes projets (dessins mis en scène d’ailleurs sur les coffrets collector), je prends cette fois le risque certain d’oser une nouvelle folie : faire la couverture de mon prochain roman, Paris-Capitale. L’idée est de donner un peu de mes dessins à qui n’a pas l’opportunité d’avoir un coffret en main, et de marquer une sorte de rupture sur le plan graphique. En gros, après ça, tout est possible !

eMaginarock : Comment vois-tu le milieu des littératures de l’imaginaire actuel ? De plus en plus d’éditeurs ferment leurs portes (les éditions du Riez en sont le dernier exemple), mais pourtant la production reste toujours aussi importante.

Feldrik Rivat : Là, c’est chaud comme question. J’ai un angle de vue qui se résume à ma petite personne sur un milieu par ailleurs très riche et très complexe. Ce que je peux dire c’est qu’il y a deux mondes. Celui que connaît le grand public par le biais des librairies et des médias, souvent le fruit de grosses artilleries éditoriales (avec adaptations multiples), et de succès à ranger du côté des classiques du genre, et celui que connaît le public averti, actif sur la Toile ou présent dans les très nombreux salons qui donnent des couleurs à tous les acteurs plus modestes sur le plan économique et médiatique. D’un côté, j’ai la sensation de voir un grand public qui aime être guidé dans ses choix (la peur de se tromper), et de l’autre un lectorat plus pointu qui aime sa liberté d’action, et qui aura plus tendance chercher et trouver la nouveauté avant tout le monde.

Internet a beaucoup redistribué les cartes en explosant les codes d’autrefois et les réalités de terrain, et donne en effet aujourd’hui presque autant de moyens à un inconnu motivé de s’exprimer, qu’à un auteur confirmé. La multiplication des supports, des canaux de vente, et des possibilités de communiquer me semble donner un maximum d’opportunités à deux catégories : les très gros (le grand groupe qui a les moyens de passer « en force ») et les très petits (de l’ordre de l’échelle individuelle). Pour tous les autres, c’est un peu une course dans laquelle on reculerait sans cesse la ligne d’arrivée. Éreintant. Et ce n’est pas étonnant de voir des structures historiques, comme les éditions du Riez, être victimes en partie de ce genre de schéma…

Donc deux conséquences, l’une fâcheuse, où l’offre part dans tous les sens au risque de perdre un lecteur qui peine à percevoir l’intérêt de trouver un éditeur pour s’intercaler entre l’auteur et lui (ce qui nuit aux structures intermédiaires), et l’autre bienheureuse qui est celle de permettre à l’inconnu motivé d’exister et d’avoir la possibilité de percer un jour… Mais ne serait-ce pas là la définition même de la jungle ?

eMaginarock : Quel est ton pire souvenir en dédicace ?

Feldrik Rivat : Ouille, j’en ai plus d’un en lice ! Je dirais que le pire pour moi est de passer une journée entière à voir défiler des clients satisfaits de tenir en main le dernier succès du moment, sans prêter gare à la nouveauté, et d’enchaîner sur « le » lecteur de fantasy ayant passé une heure dans le rayon qui choisit d’ignorer superbement ma tentative stratégique de rapprochement, sous prétexte qu’il ne me connaît pas… Mais comment peut-elle être qualifiée de « pire souvenir », alors que cette situation est quotidienne ? Après, j’ai des quantités industrielles de situations cocasses, qui ne peuvent pas non plus être qualifiées de « pire souvenir », comme le client fâché de me voir dans l’incapacité de le renseigner lâchant avec emportement un démonstratif « en voilà encore un qui est payé pour être assis le cul sur sa chaise ! ».

Le pire… faire 12km à pied pour rejoindre un lieu de dédicace et signer 12 exemplaires ? Simple reflet d’une motivation certaine. Plier ma voiture contre celle de devant lors d’un freinage d’urgence dans un embouteillage ? Non, c’est hors magasin et donc hors sujet…

Non, le pire reste de présenter mon travail dans un lieu inapproprié, mais ça, je ne le dois qu’à moi-même !

eMaginarock : As-tu un conseil à donner à ceux qui souhaiteraient devenir auteur ?

Feldrik Rivat : Se lever de bonne heure ou se coucher tard ? Garder à l’esprit que le mot « travail » dans ce genre d’activité se conjugue avec du 90/100 heures par semaine ? Ou ne jamais cesser de prendre du plaisir ? Ou que chaque parcours est unique et qu’il n’y a pas de recettes miracles (outre le facteur chance, paramètre fortement aléatoire sur lequel il ne faut absolument jamais compter… Il paraît qu’elle sourit aux audacieux, je vous confirmerai ça dans quelques années avant de vous conseiller d’en être) ?

En dernier lieu, je dirais qu’il ne faut pas perdre de vue qu’avoir un texte en main a de la valeur pour quelqu’un. Que ce soit un professionnel, comme un éditeur, ou un lecteur, il trouvera forcément une certaine résonance. Mais pour ne faire perdre de temps à personne, il est important d’avoir conscience que de proposer une première collaboration demande autre chose que de bonnes intentions : le projet présenté réclame souvent d’être plus abouti que ce que vous allez trouver en librairie… car si vous êtes seul, sans réseau et inconnu, il va vous falloir convaincre ! Parler avec un éditeur est comme parler avec un potentiel employeur. Postuler à un poste est rarement irréfléchi. Proposer son texte, souvent le fruit de plusieurs années de travail en solitaire, doit suivre une intention nette et précise. Si vous aimez le travail d’un éditeur, sa ligne, ses choix, il est plus fortement probable que vous sachiez comment le lui dire, et que la réciproque soit vraie.

Enfin… éviter de viser les grosses structures. Et fréquenter les petits salons : les éditeurs ont souvent plus le temps de vous écouter

eMaginarock : Merci d’avoir pris le temps de répondre à ces quelques questions, et à très bientôt aux détour des pages que tu nous feras le talent de noircir de belles histoires !

Feldrik Rivat : Merci à vous pour cette plage d’audience sur la Toile, maintenant je vais me relire, histoire de faire le compte du nombre d’âneries écrites ici… J’espère que vous ne m’en voudrez pas trop ?

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