Imagia

ImagiaAtypique

Voici un produit peu habituel sur les rayonnages des vendeurs de jeux de rôle : Imagia est en réalité un accessoire trans-jeux (qui peut donc servir sur n’importe quelle gamme) et qui s’utilise de différentes façons. C’est en gros une aide de jeu multiforme – une excellente idée de la part des XII Singes, un éditeur accoutumé à l’expérimentation.

Imagia est ainsi un paquet de cinquante cinq cartes. Parmi elles, quatre expliquent les modes d’utilisation, une donne les crédits et inspirations, et enfin les cinquante autres comportent chacune une illustration. Ces dessins sont très divers : des engrenages, une dague, un aigle, des bougies, un nœud, le soleil, un crâne, un outil, un caducée, etc. Ils n’ont toutefois pas été choisis au hasard : de l’aveu même de l’éditeur, ils représentent les cinquante symboles qui reviennent le plus souvent dans les contes et légendes.

La partie graphique d’Imagia (cruciale, comme on l’imagine bien) a été confiée à John Le Grümph, auteur et illustrateur bien connu des rôlistes. Son style particulier peut déconcerter celui qui n’y est pas habitué, mais il est indéniable que sa patte se ressent bien sur les illustrations d’Imagia et leur confère un certain cachet. On peut par contre regretter le choix du monochrome : les cartes paraissent un peu trop sobres (voire fades) alors qu’un tel accessoire aurait pu s’avérer plus chatoyant.

 Modes d’utilisation

Mais à quoi sert donc Imagia ? En fait, ces cartes sont livrées avec quatre façons de s’en servir.

Le « mode narration » permet aux joueurs (chacun s’étant vu remettre deux cartes au début de la séance de jeu) d’influer sur le déroulement d’une partie en introduisant le symbole de la carte dans le scénario en cours. Il doit bien sûr le faire en respectant ce que le meneur de jeu a construit jusque là : le but est d’enrichir l’histoire avant tout. Une bonne façon d’introduire à petite dose ce que l’on appelle la narration partagée.

Le « mode altération » donne aux joueurs un pouvoir inspiré d’une carte qu’ils auront choisie, et qu’ils pourront alors utiliser en commun au cours du scénario. Une fois encore, il faut respecter l’univers de jeu et faire en sorte que le pouvoir de la carte y soit pertinent et crédible.

Le « mode divination » propose d’utiliser les cartes comme un tarot divinatoire, de façon intradiégétique à la partie. Ainsi, quand un personnage doué de pouvoirs de divination fait usage de ces dons, Imagia permet au meneur de jeu de proposer des informations symboliques sous la forme des cartes tirées au sort – ou choisies avec soin.

 L’Imagia au pouvoir !

Plus poussé encore, le « mode création » se veut un outil d’assistance à la conception de scénarios. Le meneur de jeu pioche ainsi sept cartes et les dispose devant lui. Elles vont alors correspondre dans l’ordre (de gauche à droite) : au sujet du scénario, à son protagoniste principal, à son fait central, à son décor essentiel, à son moment essentiel, à une ressource-clé pour les personnages et enfin à un moyen de conclure l’histoire.

Du fait de leur symbolique, les cartes peuvent s’interpréter de très nombreuses manières – de façon à coller au genre du jeu, du médiéval-fantastique au cyberpunk en passant par l’occulte contemporain. Cette aide à la création est une excellente béquille pour un scénariste en mal d’inspiration, qui lui permet d’avoir sous les yeux une matière première sur laquelle réfléchir – ce qui permet bien souvent de débloquer les idées. Il ne lui reste plus alors qu’à densifier le tout et à trouver du liant, le squelette de sa trame lui ayant été fourni par Imagia.

 Intéressante initiative

Imagia est vraiment une belle idée, un concept des plus intéressants. Si ses différentes utilisations sont toutes sympathiques, on en retient surtout le « mode création » qui dépannera à coup sûr de nombreux meneurs de jeu un peu à sec – ou ayant besoin d’improviser rapidement une partie, leurs joueurs débarquant de façon impromptue.

Le fait de pouvoir utiliser Imagia avec n’importe quel jeu de sa ludothèque est un avantage indéniable (permettant à ce produit de s’adresser à tous les meneurs de jeu) et on ne peut que se demander quelle nouvelle idée les XII Singes vont bien pouvoir nous sortir de leur chapeau. Qu’ils soient certains que nous l’attendons avec une grande curiosité !

 Imagia

Un accessoire de jeu édité par les XII Singes

Jeu de 55 cartes en étui cartonné

9 € 90

 

 Trois questions à Franck Plasse, auteur d’Imagia

 eMaginarock (M) : D’où est venue l’idée d’Imagia ?

 Franck Plasse (FP) : À l’origine, Imagia c’est d’abord une liste d’une cinquantaine d’items fondamentaux revenant le plus souvent dans les contes, légendes et mythes. C’est un outil professionnel de storytelling, destiné à repérer des points saillants narratifs de territoires, histoires, marques, etc. ainsi qu’à construire à la volée des récits et stimuler la créativité.

Tout ceci est finalement très proche du jeu de rôle et de certaines de mes propres pratiques de joueur, actuelles ou passées. Le pas fut donc franchi naturellement. L’occasion de le faire avec Le Grümph, dont j’adore le trait noir et blanc, a été l’élément déclencheur.

 M : Quel accueil a reçu Imagia pour le moment ?

 FP : Côté rôliste, c’est vraiment un accessoire « utilitaire », donc cela réduit de plus de la moitié la cible des acheteurs. Compte tenu de ce paramètre, les ventes sont donc correctes (mais bon maintenant, que eMaginarock en parle, on commande immédiatement un retirage !). Les utilisateurs nous font plutôt un bon retour. Imagia dépasse la seule cible rôliste pour retenir l’attention de divers publics s’intéressant à la narration et aux structures narratives : c’est même là sa principale audience.

M : Les XII Singes ont-ils d’autres projets d’accessoires transjeux du même genre à l’avenir ?

FP : Sébastien Célerin et moi avons d’autres outils narratifs, existant sous forme de cartes en séries limitées dédiées au milieu professionnel (sélection d’archétypes, création d’identités narratives et de personnages, élaboration de récits prospectifs, etc.). Certains pourraient sans doute être transposés pour l’utilisation en jeu de rôle. Mais pour l’instant, je me concentre sur un troisième guide de la collection que je consacre à l’usage des histoire et des jeux dans la communication. On verra après !

 Propos recueilli par Romain d’Huissier

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