Fabien Clavel est l’un des meilleurs auteurs de ce qui est vu comme la nouvelle génération de l’imaginaire français. Une vingtaine de romans, une douzaine de nouvelles, font de lui un écrivain des plus prolifiques depuis le début de sa carrière. Il sort donc son tout dernier bébé au sein de la récente mais au combien intéressante collection Nouveaux Millénaires, dirigée par Thibault Eliroff, un roman aux marges de ce que nous sommes tous habitué à lire. Mais cela sera-t-il dérangeant ou bien particulièrement agréable ? La réponse ci-dessous…
La couverture est suffisamment intrigante pour que le lecteur ait envie de s’interroger. Quel est donc ce sigle nucléaire alors qu’un légionnaire romain est situé juste en dessous ? Ce fond de forêt aux couleurs mordorées n’est-il pas inquiétant ? Tout comme les ombres du visage du soldat romain.
Rien n’a jamais préparé les soldats d’Auguste à l’enfer de la Germanie : la pluie, le froid, la boue, les maladies, la hargne des Chérusques dont les attaques éclair déciment les troupes. La forêt de Teutoburg a déjà avalé trois légions et elle n’est toujours pas repue. Mais, pour cette poignée de Romains en déroute réunis par les circonstances, un espoir demeure : peut-être pourront-ils se cacher dans cette étrange pyramide, noire comme l’obsidienne, dressée au milieu du bourbier. Est-ce là le séjour d’un dieu ? Ces gens pacifiques et monstrueux qui hantent son abord sont-ils ses disciples ? Quel est cet étrange signe hélicoïdal répété à l’envi sur chacune de ses parois ?
Fabien Clavel parvient, dès les premières lignes à nous faire suivre les traces de sa troupe de légionnaires romains, perdus en plein cœur de la Germanie antique. Cette terre de vastes forêts, parsemée de villages, va être le théâtre d’une aventure étonnante. En effet l’auteur nous emmène a cœur de la canopée, au cœur de mystères particulièrement étonnants. Car Fabien Clavel maîtrise à merveille son scénario. Tout commence de manière feutrée et décousue, le récit n’ayant pas de véritable sens au départ, si ce n’est le feutré et l’inquiétant des bois germains. Puis petit à petit il place les éléments de son mystère, d’un scénario auquel le lecteur ne peut pas s’attendre. Car je suis tombé de surprise en surprise au fil des pages, l’auteur me menant par le bout du nez vers un dénouement plein d’inattendu.
D’un point de vue stylistique Furor est un roman étonnant. Fabien Clavel alterne les narrations entre les personnages entre les intériorisations et les discours. Ce qui est étonnant avec les sessions de discours intérieur c’est la manière dont l’auteur les mets en place. Placé aléatoirement et de manière très récurrente dans le texte ces passages sont en italique afin de les différencier du texte courant. Mais plus important, il leur donne un rythme en supprimant toute ponctuation, ainsi que les majuscules, créant ainsi un flot de texte, de caractères semblable à celui d’une pensée. Cette manière de faire est assez intéressante car elle change le rythme des différents éléments de texte, multipliant les sensations de lecture.
Les rebondissements et le mystère du scénario, alliés à un style des plus inattendus nous prouvent une fois de plus que Fabien Clavel est capable de surprendre ses lecteurs, de les inviter dans des voyages aux confins de l’imaginaire. Pas de temps mort pour le lecteur qui va aller de surprise en surprise, de découverte en découverte en alternant les narrations, créant à la fois une dynamique et un étonnement chez le lecteur. L’ensemble est donc excessivement cohérent et l’on ne peut que savourer ce récit aux multiples facettes. Fabien Clavel nous propose une nouvelle plongée dans son univers et je dois dire que j’ai trouvé cela particulièrement passionnant. Nouveaux Millénaires nous propose donc nombre de perles de l’imaginaire et Furor n’a pas à rougir au milieu d’elles…
Furor
Fabien Clavel
Nouveaux Millénaires
J’ai Lu
16,50 €