Interview de Simon Sanahujas, auteur de Nereliath

eMaginarock.fr : Bonjour Simon ! Tu n’en es pas à ton premier roman avec Nereliath puisque tu es l’auteur d’un essai sur Conan, de nouvelles, d’autres romans et de quelques récits de voyage. Et justement, Nereliath est un voyage à l’autre bout du monde. Est-ce que tu es un grand voyageur et aventurier ou n’est-ce qu’un rêve d’évasion ?

Simon Sanahujas : Il existe des gens qui voient en moi un voyageur et un aventurier parce que j’ai effectivement effectué quelques périples plutôt rock’n roll. Mais je n’ai personnellement pas du tout cette image de moi. Pour moi, un aventurier, par définition, est quelqu’un qui se trouve en perpétuel mouvement, qui n’a pas d’attache et pas de chez soi à retrouver pour se reposer de ses expériences. A l’opposé, lorsque je pars quelque part, cela a beau être pour de longues semaines délirantes dans les coins les plus perdus et méconnus du Gabon, comme j’ai pu le faire pour le livre Sur la piste de Tarzan, j’ai toujours en moi la presque certitude que je retrouverai ensuite mon chez moi. En fait, ce que je fais relève de l’illusion : je « joue » à l’aventurier pendant quelques mois, et puis ensuite je retrouve une vie somme toute assez banale et, surtout, confortable.

Par contre, cela n’enlève rien à tout le bien que je pense des voyages. Découvrir d’autres lieux, d’autres gens, d’autres cultures et d’autres modes de vie est à mon sens quelque chose de très important. Cela permet de relativiser sa propre vie, d’éviter de s’enfermer dans une certaine vision du monde qui, par son point de vue unique, ne peut qu’être fausse ou tout du moins tronquée. C’est évidemment pour cela que j’aime raconter des voyages, que j’aime mettre en scène des personnages apatrides qui parcourent sans cesse leur monde. Souvent, cela agit comme une drogue : on découvre des choses complètement différentes de ce à quoi on est habitué, on prend conscience de l’existence d’une multitude de découvertes à faire et on se retrouve alors souvent dans l’impossibilité d’en rester là.

M.net : Certains de tes écrits précédents ont été publiés aux éditions des Moutons électriques (Les nombreuses vies de Conan et Sur la piste de Tarzan). Comment cela s’est-il passé pour Nereliath ? Comment es-tu parvenu à être publié aux éditions Asgard ?

S. S. : Auparavant, j’ai publié des textes chez Rivière Blanche et chez les Moutons électriques, en effet. Mais comme Nereliath relève de Fantasy et que Rivière Blanche est pour moi une maison de SF, je n’ai pas voulu envoyer ce texte à Philippe Ward. Quant aux Moutons, je n’ai même pas songé à proposer ce roman à André-François Ruaud car il publie finalement très peu de textes et toujours des choses assez pointues. Quant à imaginer profiter du fait que j’avais déjà travaillé sur trois ouvrages avec lui, l’idée ne m’a pas effleuré une seule fois, et André n’est certainement pas le genre de personne qui ferait passer les relations avant les textes en eux-mêmes.

Quant à Asgard, je n’ai pas vu passer d’appel à texte pour la création de la maison, mais un ami qui dirige une autre de leur collection m’en avait parlé car il savait que j’avais un roman de fantasy non publié. Je le lui ai donc transmis, il l’a lu et apprécié avant de le transmettre à son tour à Thomas Riquet, le directeur de la collection « Reflets d’ailleurs ». Nereliath l’a également emballé et la suite a été très rapide.

M.net : Je trouve la couverture, réalisée par Thomas Dutertre, particulièrement réussie. Es-tu satisfait de l’aspect final de ton roman ? Comment as-tu travaillé avec lui pour cette couverture ?

S. S. : J’en suis plutôt satisfait. En tant que lecteur j’accorde beaucoup d’importance aux aspects intérieurs d’un livre, et dans le cas de Nereliath, je suis très content de la main du papier, des polices et de la maquette en général. Concernant la couverture, j’ai eu accès à différentes propositions de roughs et nous en avons discuté avant d’en choisir un avec le directeur de collection. Ensuite j’ai accompagné Thomas Dutertre dans son travail. Il m’envoyait des fichiers à différentes étapes de la réalisation et, comme il n’avait pas lu le livre, je l’orientais pour certains détails dont il n’avait pas connaissance. Pour finir concernant la couverture, je dirai juste que je préférais la première, laquelle a été refusée par l’éditeur. Si j’ai toujours eu le dernier mot concernant le texte en lui-même, il y a des domaines où ce n’est pas le cas…

M.net : Dans cet ouvrage, on fait la rencontre de Karn, un héros assez mystérieux puisqu’on ne sait pas grand-chose de lui et de son histoire. On le retrouve pour notre plus grand plaisir dans une des nouvelles bonus en tant que personnage secondaire. Sa caractéristique première, selon moi, est sa simplicité : pas de destin hors du commun, pas de pouvoirs ou de dons exceptionnels (à part celui de s’attirer des ennuis), bref il pourrait être quelqu’un comme toi et moi. Est-ce qu’il te ressemble vraiment (ou peut-être ressemble-t-il à quelqu’un de ton entourage) ou est-ce purement un héros de fiction ? Que représente-t-il pour toi ?

S. S. : C’était en effet l’un de mes objectifs avec la série inaugurée par Nereliath : raconter dans un univers de fantasy légèrement teinté de fantastique, l’histoire de personnages somme toute assez normaux, qui pourraient en effet être des gens comme toi et moi. L’idée est de permettre une identification plus aisée pour le lecteur et, au-delà, de proposer des questionnements par le biais de ces personnages qui puissent être ceux d’un être humain du XXIe siècle. Pour donner un exemple archi-connu, je suis personnellement hermétique au poids qui pèse sur les épaules d’Aragorn dans Le Seigneur des Anneaux. Le passé de ce personnage, la lignée dont il est le descendant et les qualités de surhommes des Dunedain, en font quelqu’un de bien trop éloigné de moi à mon goût. Ce n’est qu’un avis personnel mais j’ai beaucoup de mal à m’identifier à ce genre de personnage, tout comme comprendre l’ampleur et les enjeux des questionnements qui les concernent.

Au-delà, je ne construis jamais un personnage en me basant entièrement sur quelqu’un que je connais, que ce soit moi ou une personne de mon entourage. La plupart de mes personnages résultent d’un certain dosage : le point de vue d’un tel, la psychologie d’un autre, l’engagement d’encore une autre personne, etc. Par contre, je dois avouer qu’il y a un peu de moi dans Karn, en tout cas dans sa manière de voir et d’aborder la vie. C’est peut-être aussi l’image de l’aventurier que j’aurais rêvé être quand j’étais adolescent (ce qui n’est plus le cas !). Enfin, Karn est un personnage très particulier à mes yeux car, lorsque j’ai commencé à écrire à l’âge de treize ans, ce sont ses histoires que je racontais. Evidemment, il a évolué depuis et Nereliath se situe bien loin de mes écrits de jeunesse, mais le plaisir que j’ai à voir une partie de son histoire publiée aujourd’hui est plus fort que pour tous mes autres personnages, car c’est à ses côtés que je me suis lancé dans l’aventure littéraire.

M.net : J’ai pu constater que ton écriture était véritablement authentique, vivante et spontanée. J’ai eu l’impression d’une écriture facile et naturelle. Mais écris-tu aussi vite que l’action se déroule ou te faut-il du temps pour tout mettre en forme ? Lors de tes descriptions, j’ai souvent cru y être. Comment réussis-tu à donner à tes récits autant de réalisme ?

S. S. : Ça, c’est une question qu’on ne m’avait jamais posée ! Je pense que j’écris plus ou moins aussi vite que l’action se déroule, en effet. Mais, par contre, j’effectue souvent de longues poses dans ma rédaction pour réfléchir à ma scène, à mon angle d’attaque, à son déroulement. Pour prendre l’exemple d’un combat, je vais prendre un bon quart d’heure, voire plus, parfois en faisant autre chose (de la vaisselle, un café…), pour visualiser son déroulement, les positionnements, l’enchaînement des attaques jusqu’à sa conclusion. Une fois que j’ai ça, la scène s’écrit presque toute seule et très rapidement.

Concernant cela, et aussi les descriptions, on m’a souvent fait ce genre de remarque : le côté très visuel de mes scènes. On m’a souvent aussi parlé d’un côté cinématographique. Je pense que cela vient également de ma manière d’aborder ce genre de moment. Si je dois décrire un endroit, je commence par le visualiser, je choisis le point de vue, puis je décris tout bêtement l’image qui se forme dans ma tête.

M.net : Malgré tout, j’ai été un peu frustrée qu’il n’y ait pas plus de sentiments dans ce premier tome. Par contre j’ai vraiment adoré ta nouvelle A force d’imagination qui contient tous les ingrédients nécessaires : aventures, noirceur, magie, complots et… amour ! En as-tu prévu pour la suite des aventures de Karn ?

S. S. : En effet, les relationnels amoureux sont relativement absents de Nereliath, si ce n’est par le souvenir de l’un des amours de Karn, assez présent, et la relation ambigüe qu’il entretient avec le personnage d’Ayali. Mais cela changera complètement dans le prochain volet de ses aventures, qui abordera de front cette thématique, et où Karn tombera amoureux. Je m’arrête là car, si je donnais plus de détails, je gâcherais plusieurs des surprises et questionnements du prochain roman…

M.net : Une dernière question concernant Karn et ses aventures : va-t-on en apprendre plus sur son histoire dans les prochains tomes ? Est-ce que le décor sera aussi celui des pirates ou va-t-on voyager dans les univers de fantasy ?

S. S. : Chaque roman de la série, même s’il présentera à chaque fois une histoire indépendante et close, amènera des éléments nouveaux sur le passé de Karn et sur sa psychologie. Avec les éditions Asgard, nous continuerons également à adjoindre une ou deux nouvelles au roman en fin de volume, ce qui va me permettre de développer le background du personnage ainsi que des événements antérieurs à Nereliath. Enfin, la suite s’éloignera radicalement de l’univers des pirates puisqu’on retrouvera Karn dans le sud de son monde, à la tête d’une petite compagnie de mercenaires louant ses services à un royaume au bord de la révolte.

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