Annihilation – Alex Garland

Lorsque son mari disparaît au cours d’une mission secrète, une biologiste se joint à une expédition dans une région mystérieuse, bouclée par le gouvernement américain. 

Ce film est une adaptation du roman du même nom.

Autant être claire tout de suite : il s’adresse essentiellement aux lecteurs du livre et/ou aux amateurs de ce genre de films, à savoir des productions fantastico-bizarres assez expérimentales à petit budget. Bien qu’Annihilation soit en effet présenté comme de la science-fiction, il serait en réalité illusoire d’imaginer des combats d’épées laser sur fond d’effets spéciaux ultra réalistes. Si j’ai été conquise dans l’ensemble, certains plans sont maladroits et les images de synthèses ne sont pas toujours de la meilleure qualité. Cela ne m’a cependant pas posé problème, car l’intérêt réside ailleurs.

J’ai trouvé dans l’ensemble que le film restait plutôt fidèle au livre. C’est probablement ma plus grande surprise : Annihilation est sans doute la dernière œuvre littéraire que j’aurai choisie d’adapter. Contemplatif, onirique, introspectif ; il semblait en effet bien difficile de retranscrire en image l’ambiance si particulière qui s’en dégageait.

Sur ce plan, le film s’en sort plutôt bien : j’ai tout à fait retrouvé l’atmosphère qui m’avait séduite au fil  des pages, les descriptions fabuleuses de ce monde irréel et l’impression glaçante que les protagonistes ne ressentent rien ou presque, interchangeables dans leur identité comme dans l’immuabilité de leurs émotions.

L’aspect horrifique de l’œuvre est également très bien respecté : certains moments m’ont paru assez tétanisants de par leur violence physique ou psychologique, sans qu’on ne tombe jamais pour autant dans un gore gratuit.

J’ai également beaucoup apprécié le traitement fantastique l’histoire. Le mystère demeure de bout en bout, et c’est un point sur lequel il est important d’insister : comme dans les meilleures trames du genre, aucune explication ne sera véritablement donnée, ni sur l’origine de la zone X ni sur une éventuelle résolution de la situation. En ce sens, Annihilation s’adresse véritablement aux amateurs d’un fantastique au sens le plus pur du terme : déstabilisant, incertain et frôlant l’incompréhension.

Ce voyage entrepris par les protagonistes relève-t-il de la réalité ou de l’illusion ? Ces arborescences multicolores, ces créatures aux mutations poétiques ou monstrueuses sont-elles le fruit d’une erreur humaine, d’une invasion extraterrestre, de l’imagination des protagonistes ou d’autre chose encore ? Nous n’en saurons rien et en un sens, c’est tant mieux : toutes les hypothèses demeurent ainsi envisageables.

Enfin, et c’est assez rare pour être notable, Annihilation est un film où toutes les héroïnes sont des femmes. Les hommes y sont relativement peu présents, et sont en définitive relégués au rang de second rôle qu’on attribue habituellement aux individus féminins. Ce contraste avec l’ordre établi ajoute encore un peu au bizarre de l’ensemble.

Pour qui sait lire les indices disséminés au fil du scénario, Annihilation est donc loin d’être aussi simple qu’on pourrait le croire de prime abord. La personnalité des uns et des autres tant que la chronologie de l’histoire ou la réalité des faits y sont interrogés de bout en bout.

Attention cependant : ce film s’adresse à un public averti, amateur cinéphile de films étranges à (tout) petit budget où se dévoile un véritable fantastique, auquel la réponse ne survient jamais. Il risque donc de décevoir certains spectateurs aux attentes plus conventionnelles et/ou de science-fiction qui s’imagineraient un blockbuster au scénario sans temps morts et aux effets spéciaux impeccables.


Annihilation

de Alex Garland, d’après l’œuvre originale de Jeff VanderMeer

Natalie Portman, Jennifer Jason Leigh, Oscar Isaac,…

Skydance Productions

2018

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