Entretien avec Patrick Eris, auteur de Les arbres en hiver

 

 

Patrick Eris, homme aux casquettes multiples, nous fait l’amitié de cet entretien autour de ses écrits, de ses traductions, de ses coups de cœur, de ses découvertes et du milieu de l’édition en général.

eMaginarock : Bonjour Patrick, tout d’abord merci de nous accorder de ton temps pour répondre à nos questions ! Pour ceux qui ne te connaîtraient pas encore, peux-tu te présenter en quelques mots ?

Patrick : Patrick Eris. Auteur de romans populaires (et fier de l’être) et de nouvelles depuis… longtemps ! Sous un autre nom, il m’arrive de publier, traduire ou chroniquer les petits camarades…

eMaginarock : Tu as récemment traduit plusieurs nouvelles pour le numéro 46 de Galaxies paru en mai dernier et dont le sujet était la science-fiction africaine, thématique qui m’intéresse particulièrement. Connaissais-tu déjà les auteurs que tu as traduits ? As-tu pris plaisir à découvrir et à faire découvrir des auteurs qui ne sont peut-être pas très connus pour nous ?

Patrick : Ça, c’est l’entité Thomas Bauduret, tout ce qui n’est pas l’écriture (change de casquette). A vrai dire, c’est Ketty Steward qui a dirigé le dossier et donc qui a fait la sélection. Mais oui, en plus de l’article, c’était intéressant. Et dire que certains ethnocentristes reprochent à Galaxies son travail de prospection ! (De publier des métèques, quoi…) La nouvelle de Lesley Neeka Arimah était très forte, on la sent ancrée dans le folklore local… Je ne lis plus beaucoup de SF, mais sans forfanterie, j’aime celle que me propose généralement Galaxies, il y a souvent une grande qualité littéraire, comme Aliette de Bodard que j’ai également traduit, sa façon de construire des univers par petites touches en donnant le point de vue de personnes pour qui tout ceci relève du quotidien. Récemment, j’ai été marqué par « Toxique » de Sofia Samatar, impressionnante, c’est un plaisir de traduire des textes d’une telle qualité ! Et j’ai pu voir l’auteur aux Imaginales, elle est adorable, ce qui ne gâche rien !

eMaginarock : Un de tes derniers romans, Ceux qui grattent la terre, a été publié en 2016 au Riez, maison d’édition qui a fermé cette année. Quel est ton ressenti concernant les difficultés financières et les fermetures successives de petites maisons d’édition ? Qu’elles en sont les conséquences sur tes activités de traducteur et d’auteur ?

Patrick : Je ne suis pas dans le secret des dieux, mais il y a quelques constantes. D’abord le darwinisme ambiant qui veut qu’il n’y en ait que pour les « gros », créant un paradoxe : avec l’impression à la demande, il n’a jamais été aussi facile d’éditer des livres et jamais aussi difficile de les placer ! Les distributeurs/diffuseurs étranglent en prenant une part trop importante, la plupart des prix littéraires sont noyautés par les « gros » et les lecteurs, du moins ceux qui restent, ne semblent vouloir que de la tête de gondole… Cela dit, il y a aussi des éditeurs qui ne savent pas gérer leurs affaires, comme dans toutes les entreprises, même si je doute que ce fut le cas du Riez. Il y en a aussi qui semblent s’imaginer qu’en cassant les autres, ils se feront mousser alors que c’est le genre tout entier qui en souffre…

eMaginarock : As-tu des projets d’écriture ou de traduction en cours ? Si oui, peux-tu nous en parler ?

Patrick : Écriture, bien sûr, la vraie vie m’a un peu ralenti, mais j’ai quelques petites choses à écrire, en fantastique comme en polar. Y’a plus qu’à, comme on dit. Mais comme mes deux derniers éditeurs ont mis la clé sous la porte, ça revient à repartir une fois de plus à zéro, donc à quoi bon en parler ? Je viens d’avoir une nouvelle acceptée pour une antho, c’est déjà ça. Et en traduction, il y a de gros projets, comme cette fameuse traduction de la bio de Lovecraft de S.T. Joshi chez ActuSF, le financement participatif a bien démarré. Là, en plus de Galaxies, je fais quelques petites choses pour Rivière blanche, c’est toujours un plaisir de travailler avec eux

eMaginarock : Ton dernier roman, Les arbres en hiver, a été publié chez Wartberg en fin d’année dernière. Cette histoire, très intrigante, oscille entre plusieurs genres. Peux-tu nous en parler ?

Patrick : En effet, c’est un projet que je portais depuis des années, situer un roman dans ce Jura que j’aime tant, et lorsque par l’intermédiaire de Philippe Ward (d’où le remerciement dans le roman), j’ai eu le contact de l’éditrice et qu’elle m’a dit de foncer, je me suis dit qu’il n’y a pas de hasard, même si je savais qu’il serait difficile à écrire ! C’est donc une histoire de tueur en série qui massacre avec une mise en scène macabre des familles entières sans lien apparent entre elles. Mais l’enquête est menée par un gendarme du coin, quelqu’un qui a priori, n’a aucune expérience ! J’ai été marqué et inspiré par le film coréen Memories of murder, qui pour moi, n’est pas un polar (il est d’ailleurs tiré d’un fait divers), plutôt l’analyse d’une obsession, celle de flics qui deviennent fous à force d’impuissance à résoudre l’affaire ; et lorsqu’on leur envoie un as de la ville, leur folie devient contagieuse ! En ce sens, la scène finale et même le dernier plan du film sont magistraux, s’ils n’offrent pas de résolution policière (ce n’est pas déflorer, je dirais même qu’il vaut mieux le savoir dès le départ pour mieux apprécier le film.) — même si mon roman, vers sa conclusion, s’insère directement dans le suspense à l’état pur ; c’est le « prestige » des magiciens ! J’aime l’idée de quelqu’un d’ordinaire mis dans des circonstances extraordinaires et qui réussit non pas parce qu’il est un crack, mais à force d’acharnement. L’élément fantastique vient de cette relation que l’enquêteur entretient, ou croit entretenir, avec la forêt. Comme c’est un narrateur, on a le droit de penser qu’il n’est pas cent pour cent fiable, comme le disent quelques indices disséminés dans le roman, et j’avoue que ça ne fut pas toujours facile d’être dans la tête, la logique de ce type pendant les six mois d’écriture. Quant au mélange de genres, disons que si on accepte l’élément fantastique, certains passages du récit deviennent plus crédibles. Il y a aussi un léger élément SF ou anticipation qui, je crois, est dans l’air du temps… Mais n’en disons pas trop.

eMaginarock : Quartier libre ! Peux-tu faire la pub pour les prochains rendez-vous où nous pourrons te rencontrer, de la pub pour les copains, ou tout simplement partager avec nous des sujets qui t’enthousiasment ?

Patrick : Mon dernier coup de cœur ? Sans hésiter, L’homme maigre de Xavier Otzi, chez mes amis des éditions Luciférines, qui prennent un bel essor. Et ils le méritent ! J’ai aussi découvert Hervé Commère, qui n’est pas loin d’être déjà un grand. Sinon, mon prochain rendez-vous est au salon de Sèvres, comme chaque année.

eMaginarock : Merci Patrick pour tes réponses et à très bientôt au détour d’un roman !

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